La fille sans nom

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En rentrant chez Pansy après avoir enlacé Hermione et lui avoir promis qu'il la tiendrait au courant, Harry était de meilleure humeur.

Le soutien indéfectible de ses amis ne cessait de le surprendre, parce qu'il restait au fond de lui le petit garçon seul qui avait grandi en étant traité de monstre. Celui qui n'avait pas eu le droit d'avoir d'amis, à cause de son stupide cousin. Et même toutes ces années après avoir enfin connu les joies de l'amitié, il craignait toujours d'être abandonné.

Lorsqu'il arriva, Pansy tournait en rond, visiblement hors d'elle, un parchemin serré dans la main.

Harry soupira, comprenant qu'il s'était produit quelque chose. Lorsqu'elle le vit, elle se précipita, les joues rouges, les yeux emplis de larmes de rage.

Elle lui tendit le parchemin avant de quitter la pièce et de claquer furieusement la porte de sa chambre.

Le brun se demanda si c'était une habitude ancrée chez les vert et argent, cette manie de prendre la fuite en claquant les portes.

Cependant, toute envie de plaisanter disparut quand il prit connaissance du message.

Le propriétaire de la boutique que Pansy louait sur le chemin de Traverse, la boutique qui avait été ravagée par un feudeymon, l'informait qu'il refusait dorénavant de lui céder le bail. Apparemment, l'homme avait reçu suffisamment de menaces pour l'effrayer et il lui conseillait d'abandonner son projet pour ne pas déranger le monde magique.

Harry resta un long moment à fixer le mot, empli d'incrédulité. Jusqu'à présent, il n'avait pas mesuré l'ampleur du problème, pensant que c'était uniquement des agressions isolées. Rien d'organisé.

Visiblement, les actions menées envers les enfants de Mangemorts allaient bien plus loin, visant à démolir leurs vies méthodiquement.

Blaise Zabini avait perdu son emploi, et maintenant Pansy perdait sa boutique.

En levant la tête, il rencontra le regard acier de Drago.

— Il y a plus que les agressions, n'est-ce pas Malefoy ?

Le blond détourna les yeux en haussant les épaules. Il répondit d'un air faussement indifférent, mais la crispation de son dos en dévoilait assez sur ce qu'il ressentait.

— Je n'ai pas de diplômes. Je n'ai... pu intégrer aucun apprentissage, quel qu'en soit le domaine. Heureusement pour moi, je n'ai pas besoin du moindre diplôme pour reprendre les affaires de mon père.

Harry jura, stupéfait.

— Aucun d'entre vous n'a pu passer ses Aspics ?

— Non. Les années inférieures... ont pu retourner à Poudlard, mais ils ont été... ostracisés.

Le brun vacilla, et secoua la tête, effaré.

— Je n'ai rien vu de tout ça ! Je...

— Potter ! Tu n'es pas responsable. À une époque, j'aurais aimé t'accuser de tout ce qui ne va pas dans ma vie, mais... tu as fait de ton mieux.

Amer, l'auror haussa les épaules.

— Visiblement, ce n'était pas suffisant. J'imaginais que la fin de Voldemort... que tout irait bien. C'est la réalité, nous sommes loin du conte de fées.

Drago laissa échapper un ricanement triste.

— Dans tout affrontement, il y a un vainqueur et un vaincu. Et en règle générale... le vaincu n'a pas vraiment son mot à dire. C'est le cas pour toutes les guerres moldues, non ? Alors pourquoi ça serait différent pour le monde magique ?

Harry se mordilla la lèvre puis il fronça les sourcils.

— Il doit y avoir un moyen. Ils auraient dû se contenter des Mangemorts enfermés à Azkaban ! Bon sang, ils ont décimé une bonne partie des familles Sang-Pur du monde magique !

Drago croisa les bras sur sa poitrine et le fixa, songeur. Puis il eut un rictus amusé.

— Alors, dis-moi, Potter. Qu'est-ce que tu aurais fait toi ?

Harry renifla.

— Voldemort était un... orphelin avide de vengeance. Certains Mangemorts étaient des fanatiques qui devaient être neutralisés comme Bellatrix ou Greyback parmi les pires. D'autres... n'étaient que des opportunistes. Ils méritaient d'être punis pour leurs actes bien évidemment, mais une condamnation à Azkaban à vie est... Démesurée.

— Donc tu penses que mon père qui a essayé de te tuer devrait pouvoir sortir un jour de prison ?

— Ton père est un stupide opportuniste manipulateur. Il est avide de pouvoir. Mais je ne pense pas qu'il serait prêt à prendre la place de Voldemort pour ranimer la guerre. En le tenant à l'écart du Ministère... Et bien, je suppose qu'il pourrait reprendre sa vie. Sous conditions bien évidemment.

Harry eut un sourire en coin.

— Enfin. Concernant les enfants des Mangemorts... pourquoi devraient-ils payer les choix de leurs parents ? Bon sang, ils n'ont pas décidé d'eux-mêmes, ils ont juste suivi ce qui leur a été enseigné depuis leur naissance.

Drago le fixa longuement, sans dire un mot. Harry lui sourit tendrement, avant de se diriger vers la chambre de Pansy pour la réconforter.

Il frappa doucement et entra. La jeune femme était à son bureau, un dossier de comptabilité — s'il se fiait aux colonnes de chiffres — ouvert devant elle. Cependant, il ne fallait pas être devin pour comprendre qu'elle n'était pas vraiment concentrée, puisqu'elle avait le regard dans le vague.

Harry approcha lentement et lui posa une main sur l'épaule.

— On va trouver une solution, Pansy. Je te promets.

Elle eut un rire amer, et renifla, passant rapidement la main sur son visage comme pour effacer des traces de larmes.

— À Poudlard, j'étais la fille sans nom. L'ombre de Drago Malefoy. J'étais celle qui voulait lui mettre le grappin dessus. Même quand... quand nous sommes devenus réellement amis, je n'existais pas vraiment. Après la guerre, quand je suis arrivée côté moldu, j'ai travaillé dur pour me faire un nom. Je ne pouvais pas compter sur le nom de ma famille, et... je n'avais pas beaucoup d'argent puisque mon père a dilapidé une bonne partie de sa fortune dans ses idéaux stupides. Sans compter que le ministère a ponctionné pas mal pour reconstruire. Mais je me suis accrochée à... mon entreprise, malgré les difficultés. Je voulais montrer que j'étais capable de quelque chose, que je pouvais exister par moi-même et ne plus être l'ombre de quelqu'un.

Le brun enlaça ses épaules pour la serrer contre lui.

— Et tu as réussi, Pansy. Tu peux être réellement fière de toi, tu sais. Tu as accompli quelque chose d'extraordinaire, n'en doutes jamais.

— Mais tout s'écroule. Combien de temps avant qu'ils ne s'en prennent à ma boutique moldue ?

Protection rapprochéeWhere stories live. Discover now