Plus rien...

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Je marche dans la rue, seul, j'ai mal. Une douleur impitoyable, qui ne donne aucun instant de répit. La peur de regarder la cause de celle-ci grandit à chaque seconde. Ouais, je suis un putain de peureux, ça changera jamais.

Je finis par m'écrouler, quelqu'un me relève.

— Merci... Tu m'as...

Mes yeux reflètent ma stupeur, la personne en face de moi, ensanglantée. Ma douleur disparaît, mes blessures aussi. Un couteau apparaît dans ma main, imbibé de sang. Le visage de l'homme m'est si familier. Son sourire malsain, ses yeux exorbités suite aux multiples coups de poignard qu'il a subis.

— Papa...

Son visage change, son corps aussi. Eileen est là, souriante, rayonnante, comme elle l'a toujours été. Le feu, lui aussi est présent, il consume lentement Eileen, ses larmes s'évaporent, son corps brûle, elle se désagrège. Je crie, hurle, pleure.

Pas toi...

— Naël qu'est-ce qu'il y a ? interroge Eileen, alarmée

— Un cauchemar...

Elle s'approche de moi, m'embrasse, se blottit contre mon corps. Sa peau contre la mienne, quelle drogue. La meilleure came qu'il soit.

— Je suis là mon amour... Ça va aller...

Mon père, même mort il revient toujours quand je vais mal. Il me torture depuis mon enfance, il me détruit, me reconstruit. Je suis un jouet, celui de ma propre psychologie. J'ai été conditionné pour imploser. J'y repense toujours.

"N'y pense plus..."

C'est ce que me disent Sarah, papa, maman, ma vraie famille. Pourtant, mon géniteur est le seul que j'écoute. Il me disait que j'étais né pour tout foutre en l'air. Ce que je fais quotidiennement.

Le lendemain, le réveil est rude, même plus besoin de cuite pour être maussade dès le matin, je prends instinctivement mon téléphone. Un message de ma mère.

— Nous sommes partis en vacances avec George, Aiden a été envoyé chez ta grand-mère, il aura le traitement qu'il mérite.

C'est pour ça qu'ils ne répondaient pas ? Je leur renvoie un message puis me dirige vers la cuisine. Les appeler est inutile, ils ont besoin d'être tranquille après tout ce qu'Aiden a fait. Eileen mange son petit déjeuner silencieusement, je la préviens que nos parents vont bien. Elle paraît tout de suite plus rassurée.

— Ils auraient pu nous prévenir... Je m'inquiétais moi.

— Ils ont dû se dire qu'on est grands et qu'on se débrouille. C'est comme ça la vie ma chérie.

— On devrait au moins les appeler...

— On va pas les déranger s'ils sont en vacances, autant les laisser profiter.

— T'as raison... concède-t-elle, la mine triste.

**

Naël est parti à l'appartement, je suis seule. Très seule. La solitude me ronge quand il est loin de moi. Je me rends compte que je n'ai plus d'attache, plus de pilier. Je finis par me confier à mon amie de toujours.

— Lylia... Quoi que je fasse, j'ai toujours l'impression d'être seule... Je reste enfermée dans la tension de l'orphelinat. Comme si je n'en étais jamais sortie...

Mon regard se porte vers les tatouages, bizarrement, je me sens mieux.

Dehors, en campagne, l'air est pur, l'ambiance silencieuse. Non loin de la maison, la route, en face de celle-ci, un chemin menant à une petite forêt. Le bruit des criquets, la sensation de la terre sur mes chaussures et la brise fraîche me font un bien fou. Mon esprit s'apaise. Dame Nature a plus de chose à offrir que Mademoiselle la Vie.

N'y pense plusWhere stories live. Discover now