Chapitre 30 : La renaissance d'une lignée

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— Ils sont surtout jaloux que Dieu ait confié une telle tâche à des femmes. Car Notre Seigneur connait le courage qui habite dans chaque cœur. Si cette noble tâche est revenue à ta famille, Éléonore, alors ce doit être pour une bonne raison.

Peut-être avait-elle raison, mais pour l'instant, je ne voyais que l'horreur que cela avait apporté dans ma vie. Si je n'étais pas issue d'une telle lignée alors rien de tout cela ne serait arrivé ! Ni mon père, ni ma mère, ni Francesco ne seraient morts ! Ni l'enfant d'Antoinette ! N'était-ce pas plus une malédiction qu'une bénédiction ?

— Mais à quel prix ? soufflai-je.

— Le chemin des élues est souvent jonché de sacrifices ...

— Tu n'avais pas à être le mien ...

Un sourire un peu mélancolique étira les lèvres rosées de mon amie. Sans un mot, je la pris dans mes bras et la serrai fort contre mon cœur, lui rappelant que j'étais là, auprès d'elle, et que je le serai toujours. Dès qu'elle aurait besoin de mon aide, je serai là.

Antoinette se laissa aller à mon étreinte, pleurant contre mon épaule. Elle était courageuse. Si courageuse ... Et je savais maintenant ce qu'il me restait à faire. Si je n'avais pas pu la protéger, je pourrais au moins la venger. Sang Bleu devait payer pour chaque goutte de sang versée, pour chaque larme. Pour tous ceux qui n'étaient plus.

*                  *                   *

L'ombre

Il vit sans les voir les trois tombes à ses pieds sous le grand chêne du Clos Lucé. Trois tombes de trois élèves de Léonard, morts durant l'incendie qui avait servi de diversion. Personne n'aurait dû survivre à cette attaque. Personne. Mais il avait sous-estimé la fille, ignorant qu'il y avait un passage secret reliant le Clos Lucé à Amboise. Comment avait-il pu l'ignorer ? Il serra les poings autour de sa longue cape sombre. S'il avait réussi cette fois-là, alors tout serait différent.

Il sursauta quand il entendit des pas derrière lui et sortit brusquement son épée. Qui donc pouvait décider de venir ici en plein cœur de la nuit ? Plus personne n'avait remis les pieds au Clos Lucé depuis l'attaque. Il y avait eu tant de malheurs. 

Mais il rangea rapidement son épée en reconnaissant la silhouette de l'homme devant lui. Que diable faisait-il ici ? Malgré son masque qui lui recouvrait le visage, l'homme dut comprendre son étonnement.

— Allons allons ! Tu ne croyais tout de même pas que je resterai à Paris, sourit Gabriel de Dieulafoy, rejetant le capuchon de sa longue cape bordée de fourrures sombres dans son dos. Cela fait fort longtemps que je n'ai plus de nouvelles de toi ...

— Je ne me cachais pas, se dédouana l'homme masqué.

— Comment pourrais-tu te cacher de moi ?

Il semblait seul, mais l'ombre savait pourtant que ce n'était pas le cas. Il y avait sans doute d'autres adeptes dissimulés autour d'eux, prêts à défendre leur maître si quoi que ce soit se passait. 

L'homme masqué tourna son regard vers la simple croix en bois à ses pieds où était inscrit le nom de Francesco Melzi.

— Aurais-je une raison de douter de toi ? demanda alors Dieulafoy d'une voix en apparence douce, mais qui ne cachait que le venin d'un serpent.

— Bien sûr que non, Maître.

— Alors explique-moi pourquoi tu ne m'as pas dit que la fille était enceinte.

Un long silence suivit sa dernière phrase. Que ... ? Comment pouvait-il le savoir ? Dieulafoy émit un rire méprisant devant son hébètement.

— Aurais-tu oublié que j'ai le bras long ? Tu es peut-être mon arme, mais j'ai des yeux et des oreilles dans tout le royaume. Je sais que la fille de Vinci est enceinte.

La flamme de la SalamandreWhere stories live. Discover now