Chapitre 23

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Ma conversation avec Martin me laisse pensive, si bien que le soir, en rentrant chez moi, je commence à me renseigner sur le Venezuela. Je vais jusqu'à refuser l'invitation de Valentin et Cécilia, trop absorbée par mes recherches. Je suis à la fois fascinée par les paysages et la culture que je découvre, et révoltée qu'un si beau pays ait pu basculer dans une telle crise.

Le lendemain, je décide de me rendre à la plage pour me changer les idées. Installée dans une petite crique, j'appelle Martin pour lui proposer de me rejoindre, mais il décline : toujours sans nouvelles de sa grand-mère, il a besoin d'être seul. Tout aussi satisfaite de ma propre compagnie, j'abandonne mes affaires sur les rochers pour aller profiter un peu des vagues.

La houle me rappellera toujours ma plus tendre enfance, celle où mon père était encore présent et qu'il m'emmenait à la mer. Si nous avons au moins un point commun, c'est que nous préférons tous les deux une mer chahuteuse à des eaux calmes. En plongeant pour me laisser porter par le courant, je me revois faire la compétition avec lui pour tenter de glisser le plus loin – duel où il ne me laissait jamais gagner.

Les années ont beau passer, je n'ai jamais cessé d'aller glisser sur les vagues les jours de houle. Au départ, je persistais par espoir de pouvoir battre mon père le jour où nous surferions de nouveau ensemble. Puis, progressivement, j'ai fini par abandonner cette éventualité. Aujourd'hui, je pratique cette activité par simple plaisir et, parfois, par nostalgie.

L'après-midi passe en un clin d'œil et, lorsque je rentre, le soleil a déjà commencé à baisser. Caché derrière la colline du château qui surplombe le port, il projette désormais des ombres étirées sur les bateaux. Sereine, je m'engage dans ma rue en fouillant mon sac de plage à la recherche de mes clés.

— Salut, Kaïa ! Tu es allée profiter un peu de la plage avant notre super soirée ?

Mon trousseau en main, je m'arrête pour relever les yeux. Samuel, adossé contre la façade du Comptoir d'Azur, m'offre un sourire railleur. Je me souviens alors de notre fameux pari.

— Tu sembles bien confiant, pourtant, je ne vois toujours pas de chat à l'horizon.

— Notre ami se fait un peu désirer, mais il ne devrait pas tarder.

— Et qu'est-ce qui te fait dire ça ?

En guise de réponse, Samuel pointe un coin de la terrasse où sont disposés des coussins ainsi qu'une petite coupelle remplie du jus d'une boîte de thon.

— C'est quoi cet attrape-chat ? C'est de la triche !

— De la triche ? Je dirais plutôt de la ruse.

— Bien sûr. Enfin bon, si ça t'amuse de perdre ton temps, libre à toi...

— Je me donne juste les moyens de faire venir ce chat, et j'y crois. Tu as déjà entendu parler de la loi de l'attraction ? C'est en visualisant les choses et en faisant comme si elles étaient déjà en chemin que tu les attireras à toi.

Je hausse un sourcil dubitatif.

— Je n'aurais pas pensé que tu étais du genre superstitieux.

— On a pas mal de croyances, en Colombie. Je ne marche pas pour toutes, mais celle-ci a fonctionné plus d'une fois pour moi. Essaie et tu verras !

— Hm, alors, qu'est-ce que je suis censée faire ? Visualiser ce coussin en train de brûler ?

— Ah, non, ce ne serait pas très fair-play.

— Si tu le dis... Dans ce cas, je vais me contenter de rentrer chez moi et, dans une poignée de minutes, le soleil sera tombé, réduisant à néant tes dernières chances de gagner ce pari. Si j'étais toi, je chercherais de quoi m'occuper ce soir...

Un été pour se chercher [Terminée]Where stories live. Discover now