— Tout ça, c'est toi qui as eu la force de l'accomplir, soupira Victor. Je ne suis qu'un lâche. L'écriture nous a beaucoup aidés, je n'y suis pas pour grand-chose...

— Non. Tu aurais pu fuir. Tu ne l'as pas fait. Tu es resté avec moi. Jusqu'au bout. Sans jamais m'abandonner.

— Je... Je t'ai lâché plusieurs fois, quand on s'est engueulé...

— Tu m'as permis de prendre conscience de certaines choses. Ne regrette rien, même pas nos disputes. Sans toi, j'aurais déjà abandonné.

Le terrible orage qui tempêtait dans le lagon de son regard ne mentait pas. Combien de fois aurait-il baissé les bras s'il n'avait pas été à ses côtés ? Victor prit conscience de ces mots. Quelques larmes brouillèrent l'image de Yann, vite cueillies par ce dernier.

— Ne pleure pas... Je déteste te voir pleurer... Puis... Tu m'as sauvé, tu le sais ?

Yann passa sa main dans les cheveux corbeau de Victor. Ce dernier dodelinait de la tête pour approuver les paroles de son petit ami.

— Tu m'as sauvé, répéta Yann. C'est tout ce qui compte.

— Je t'ai sauvé... Mais au final... Tu vas partir quand même... Je ne veux pas que tu partes...

— Je suis là. Encore. Je serai toujours là, dans ton coeur.

— Mais ça me suffit pas, moi...

Conscient que les mots ne suffisaient pas, Yann se rapprocha davantage de son petit ami et le serra un peu plus contre lui. Victor s'agrippa à son bras, seule bouée de sauvetage qu'il lui restait. Noyé dans son chagrin, il resta longuement prostré ainsi. Sans même pleurer. Ses larmes bloquées au fond de sa gorge, il ne pouvait que s'enivrer du parfum de Yann.

— Je sais... Je sais...

Victor se blottit un peu plus dans contre l'épaule de Yann. Il n'arrivait même pas à sangloter ; il ne voulait pas. Il restait juste là, assis, la tête contre celui qui avait incarné son roc pendant tant d'années. Il inspira, cherchant au fond de ses entrailles le souffle qu'il lui manquait. Un souffle qui ne venait pas.

La prise du blond se resserra. Victor ferma les yeux, profitant de l'étreinte. Il se ratatina un peu plus sur lui-même quand Yann continua de passer ses mains dans ses cheveux. Il aimait tellement quand il perdait sa main contre son crâne. Il ne le touchait jamais qu'avec un amour incommensurable, un amour qui ne connaissait aucune limite. Au creux de ses bras, il le savait : jamais aucun endroit dans ce monde ne serait plus confortable. Il répéta cette pensée, s'imprégna de cette sensation jusqu'à en être repu — si toutefois c'était possible de l'être.

Il se leva et expira avec lenteur toutes les ondes négatives qui le torturaient. Il baissa les yeux vers Yann, toujours assis sur son fauteuil. Il le regardait, un grand sourire solaire sur le visage.

Il avait toujours été comme ça ; l'air rayonnant, solaire. Il portait dans ses yeux la conviction des titans, les affres des rêves. Toute la poésie du monde pendant à ses lèvres. Il était son espoir, son amour, sa Muse ; celui qui lui inspirait ses plus belles tirades, celui qui enfantait en son coeur le désir de se lever chaque matin ; il levait le soleil pour lui, et réveillait la lune ; il liait les constellations à la seule force de sa plume. Pour lui, le monde n'était qu'un vaste terrain de jeu pour ses mots.

C'était peut-être pour ça, et pour mille autres raisons encore, qu'il l'aimait davantage chaque fois que ses yeux se posaient sur lui.

— C'est incroyable qu'on en soit arrivés là. Tout le chemin qu'on a parcouru...

— Oui, acquiesça Victor. Je n'en reviens toujours pas. Quand tu es venu me voir...

— Ouais. C'était dingue.

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