Année IV, Chapitre 14 : La dernière des Morstan

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Il régnait dans la cave une odeur abominable qu'il valait mieux ne pas identifier. La seule lueur provenait d'une torche accrochée au mur humide. Mary et John restèrent silencieux, mais au fur et à mesure que les heures s'écoulaient et que leur frayeur augmentait, ils décidèrent de se rapprocher et de se blottir l'un contre l'autre, lovés dans leurs manteaux. Ils entendaient des bruits sourds au-dessus de leurs tête et John s'en sentait encore plus impuissant : il savait que, quelque part dans cette maison, son ami avait désespérément besoin de lui et qu'il ne pouvait pas l'aider.

Et lorsque soudain, le silence revenait sans prévenir, il craignait le pire.

Ils étaient sur le point de s'endormir quand la clé tourna dans la cellule et Sherlock fut poussé au sol. L'homme le contourna et posa une chaise pour s'asseoir face aux deux autres. John s'approcha avec précaution de Sherlock et l'aida à se lever.

Il fit mine de ne pas voir le sang et les bleus qui couvraient le corps du brun.

"Je ne le répéterai pas deux fois, averti l'homme. Dites-moi où est la Baguette. Si vous êtes sages, je vous laisserais tous les deux partir. Vous ne vous souviendrez de rien et vous reprendrez vos petites vies insignifiantes comme avant."

"Et Sherlock ?" fit John.

"Oh. Lui, l'Ombre veut l'avoir."

"Je ne sais pas où elle est." dit Mary.

L'homme se leva et alla chercher ce que John identifia comme un gant serti de clous dont les pointes luisantes indiquaient qu'ils avaient déjà servi. Il chassa cela de son esprit pour l'instant et tenta de panser les blessures de Sherlock. Soudain, le blond sentit de nouveau une douleur dans la nuque.

"Ça va ?" s'alarma Sherlock.

"Oui... Ce n'est rien. Une abeille m'a piqué."

Sherlock insista cependant pour examiner son cou et constata que le dard était toujours en place. Il le retira en prenant garde à ne pas appuyer sur la poche de venin. Cependant la piqûre était déjà bien enflée, mais n'en dit rien pour ne pas effrayer John. Les sourcils froncés, il examina le dard.

L'homme revint, après avoir enfilé ses gants, et saisit John au col.

"Laissez-le ! beugla Sherlock. Il n'a rien à voir avec tout ça !"

Persuadé de sentir bientôt les clous transpercer sa peau, John ferma les yeux. La piqûre de l'abeille gonflant de plus en plus, il commença à suffoquer. Cependant l'homme le lâcha et se tourna vers Sherlock qui brandissait son collier dans sa main tendue.

"Prenez-le et laissez John et Mary tranquilles. Ils ne savent pas où est la Baguette, Khan Morstan l'a cachée avant de mourir. Avec ça vous pourrez avoir une chance de lui faire avouer où il l'a mise."

L'homme contempla le collier comme s'il s'agissait du Graal et s'en saisit. Sherlock alla retrouver John qui paniquait alors que l'air peinait à se frayer un chemin jusqu'à ses poumons.

"John ! John ! Suis ma respiration : inspire, expire... Voilà, doucement. Tout va bien aller, je vais vous sortir de là, je te le promets."

Il prit sa main dans la sienne et le fixa droit dans les yeux. Ceux de John, d'ordinaire brillant de joie, étaient trempés de larmes de panique.

Sherlock se tourna vers Mary :

"Dès que le mangemort commence à hurler, chuchota-t-il, cours vers la sortie. Je te suis avec John. On doit se dépêcher de trouver de l'aide, il est allergique aux piqûres d'abeilles."

Mary acquiesça et prit l'autre main de John qui avait cessé de se débattre, épuisé.

Le mangemort, parti en retrait, le collier toujours dans la main, se mit à parler d'une voix douce. Mary écouta et il lui sembla qu'il parlait à un enfant ; pourtant il n'y avait personne d'autre dans la pièce.

"Non ! Ne pars pas !" cria-t-il soudain.

Mary regarda Sherlock, se demandant si c'était le signal, mais il lui fit signe d'attendre.

Le mangemort passa le collier autour de son cou, et il sembla qu'on l'étranglait : il se débattit furieusement, tentant d'arracher la chaîne du pendentif, et fonça sur un mur. Il s'écroula et convulsa au sol en hurlant.

Mary se rua vers la sortie. Sherlock redressa John et passa un bras au-dessous de ses épaules pour le soutenir. Sa respiration rauque indiquait qu'il lui fallait des soins en urgence. Ils montèrent à un rythme lent les escaliers.

Apercevant leurs trois baguettes sur une table recouverte d'un fin drap blanc, Mary s'en saisit et les passa à Sherlock.

"Accio pendentif !"

Le collier mit quelques secondes à lâcher sa proie, remonter les escaliers et atterrir dans la main de Sherlock. Ils atteignirent la sortie, Mary fermant la marche. Ils pénétraient dans le labyrinthe, quand la femme mangemort les appela :

"Vous ne partirez pas comme ça ! Avada Kedavra !"

Une lumière verte balaya le jardin et s'éteignit dans un grand craquement.

Sherlock entendit quelque chose s'effondrer derrière lui. Il ne se retourna pas.

Il devait sauver John.

De sa main libre, il agrippa le fil rouge et s'enfonça dans le labyrinthe. Après quelques virages en angle droit, John souffla :

"Où... Mary ?"

Sherlock l'ignora et continua d'avancer. Un grognement féroce, cependant, le fit s'arrêter. Il vit une silhouette abominable se dresser face à lui. Une ombre féline dont les deux queues puissantes balayaient l'air tels autant de serpents venimeux. Une manticore.

Pour ne rien arranger, John avait pratiquement perdu connaissance. Derrière eux, la sorcière qui venait d'assassiner Mary progressait. Sherlock n'eut pas d'autre choix que de quitter la protection du fil de Mary.

Il avança à pas rapides dans les chemins, sachant pertinemment que ses capacités d'orientations ne serviraient à rien : les haies semblaient former un plafond vert au-dessus de sa tête.

Pour se rassurer autant que pour maintenir John réveillé, il lui parla, lui promettant qu'il le sortirait de là, que tout irait mieux...

Il trébucha sur une racine et tous deux tombèrent lourdement au sol. Sherlock resta immobile, écoutant les sons autour de lui, persuadé que leur chute avait signalé leur position.

"John." murmura-t-il, et seule la respiration douloureuse de son ami lui répondit.

Il voulut se relever, mais une étreinte à sa cheville l'en empêcha : il éclaira sa jambe et vit que les racines des arbustes l'étreignaient. Il tenta de se dégager, mais elles rampaient toujours plus vite. Elles le tirèrent vers les haies et il ne put que regarder le corps inerte de John être tiré de l'autre côté.

Les racines tentèrent de l'ensevelir sous terre. Il se débattit furieusement et parvint à attraper sa baguette :

"Reducto !"

Les racines le lâchèrent et se recroquevillèrent comme des asticots qu'on aurait tenté d'écraser. Sherlock rampa pour s'éloigner le plus possible d'elles et regagna le sentier.

"John !" appela-t-il à mi-voix pour éviter d'alerter leur poursuivante et les autres créatures qui auraient pu se trouver dans le dédale. "John !"

Il essaya de suivre les traces qu'avaient laissé les racines en traînant John dans la terre. Il le retrouva à moitié enterré, étreint dans un cocon de racines. Il chassa les plantes indésirables et tira John hors de leur portée.

"John ? John !"

Il colla son oreille sur sa poitrine et fut rassuré d'entendre le cœur de John lui répondre timidement. Il pointa sa baguette vers le ciel et lança un jet d'étincelles rouges, espérant alerter les voisins. Puis il chargea John sur son dos et il crut pleurer de soulagement quand il trébucha sur le fil rouge.

Fin de l'année 4 : Le Signe des Trois

Début de l'année 5 : Le détective affabulant

Les chants de la Mort - Sherlock fanfictionWhere stories live. Discover now