La journée de la veille s'était déroulée dans une sorte de flou artistique général. Aya se rappelait simplement ne pas avoir pris de petit-déjeuner pour éviter de croiser ses professeurs et son directeur. D'avoir passé sa première heure de cours, ruée de coups de coude dans les côtes par Emilia, assise à côté d'elle et décidée à ne pas la laisser s'endormir. Puis d'avoir passé la deuxième heure de cours à ruer de coup une Emilia qui somnolait à son tour, par pure vengeance.
À midi, la blonde avait suggéré d'aller rendre visite à Willem à l'infirmerie, mais Aya avait refusé. Emilia n'avait pas insisté et l'avait suivi au réfectoire. À peine assises, leurs paupières étaient devenus lourdes et elles avaient recommencé à sombrer. Elles s'étaient réveillées entourées d'une partie de l'équipe des Dyr, en train de parier que la tête d'Emilia tomberait en premier dans son assiette.
Fortes de leur micro-sieste, elles s'étaient rendues à leur cours de Légilimencie et Psychisme l'esprit un peu plus vif. Aya n'adressa pas un mot à Rakseï-Un, ni même un regard. Elle avait passé tout le cours la tête penchée sur son cahier, à gribouiller en maltraitant sciemment la pointe de sa plume. Pour une fois, il ne lui avait montré aucun signe d'intérêt et Aya avait presque eut envie de le remercier. Mais cela entrant fortement en contradiction avec sa volonté de l'ignorer, elle s'en était bien évidemment abstenu.
Le dernier cours fut celui de trop pour la rousse comme pour la blonde. De ce qu'elle se souvenait Aya s'était endormie à peu près au moment où son professeur d'histoire de la magie avait commencé à parler, si bien qu'elle aurait été incapable de dire quel avait été le sujet du cours. En revanche, elle se rappelait très bien de son professeur lui tapotant le bras en lui demandant s'il ne la dérangeait pas trop. Profondément endormie, elle avait évidemment répondu « si, là, un peu ».
Dix minutes plus tard, Emilia et elle étaient dans le couloir en direction du bureau de leur directeur de maison, Aya tenant dans sa main un petit parchemin roulé.
- T'aurais pu te retenir, avait marmonné Emilia, les yeux rougis par la fatigue.
- Quelle personne censée répondrait « non, ça ne me dérange pas qu'on me réveille » après la nuit qu'on a passé ? s'était renfrogné Aya.
Lorsqu'elle avait toqué à la porte du bureau, il y avait tellement de fatigue, de colère et d'appréhension en elle, qu'elle se souvenait à peine de son nom et de ce qu'elle faisait là.
- Entrez, avait lancé le professeur depuis l'intérieur.
Aya et Emilia avaient échangé un regard incertain avant de se décider à ouvrir la porte.
- Miss Malefoy, dit Katlitz assis derrière son bureau, en lâchant aussitôt sa plume. Et Miss Klirke. Nous étions très inquiet hier soir.
Ni l'une ni l'autre n'avaient répondu, raides comme des piquets, immobiles devant le bureau, elles se contentaient de le regarder.
- Ne devriez-vous pas être en cours à cette heure-ci ?
Aya se décida à avancer pour donner le parchemin à son professeur, et revenir fissa à sa place le temps qu'il le lise.
- Je vois, dit-il après un moment en froissant le parchemin dans sa main avant de le jeter dans le feu de la cheminée sans ménagement. Je vous donne un simple avertissement pour l'instant, si cela se reproduit dans les jours à venir, vous aurez une retenue.
Elles échangèrent un regard perplexe, puis acquiescèrent sans un mot.
- Je suppose qu'il est inutile de vous rappeler que les Animagi ont l'obligation de s'enregistrer auprès du Ministère de leur pays.
- Vous supposez bien, répondit simplement Aya qui avait suffisamment de chose en tête pour se soucier de cela.
Elle s'était même surprise à penser pendant un bref instant, que se faire enfermer à Azkaban loin de tout, n'était peut-être pas une si mauvaise option. Katlitz resta muet, le visage impassible.
- Nous garderons donc ceci entre nous, finit-il par dire. Nous en ferons de même pour Miss Klirke, et Mr Wolfgung. Vu vos notes en métamorphoses, je ne doute pas que vous ayez réussi cet exploit à trois.
Emilia pâlit mais soutien le regard du professeur, toujours incapable de parler.
- C'est tout ? Demanda Aya, en sentant son corps s'engourdir à force de rester debout.
- Non. Vous aurez une retenue le trente, ici-même, dit-il en s'adressant à Aya. Votre premier cours avec les jumeaux Rakseï se déroulera le cinq. En prévisions d'éventuels débordements, il aura lieu à l'extérieur. Nous discuterons des détails plus tard. D'ici là, je ne vous demanderais que trop peu de faire profil bas. Tout particulièrement jusqu'au départ de notre cher directeur.
- Très bien, avait répondu Aya d'un ton las.
Il avait fait un simple geste de la tête pour leur donner congé, et elles s'étaient aussi exécutées. Elles retournèrent dans leur chambre sans passer par le réfectoire et tombèrent épuisées dans leur lit où elles s'endormirent habillées.
Mais en se réveillant le lendemain matin, un épais brouillard obscurcissait toujours les pensées d'Aya. Le corps encore plus lourd et fatigué que la veille, elle assista à ces cours de la matinée sans parvenir à se concentrer sur quoi que ce soit. En arrivant dans le réfectoire d'un pas traînant à l'heure du déjeuner, elle vit Willem -avec ses cheveux et ses yeux habituels- accompagné de Gustav, assis tous les deux à une table. Ils levèrent la tête d'un même mouvement en l'apercevant. Avant qu'Emilia n'en place une, Aya fit demi-tour en filant vers la salle commune, prétextant que c'était à son tour de nourrir leur Fléreur.
Installée en tailleur sur son lit, dos au mur, avec le minuscule bébé confortablement calé entre ses jambes croisées, le biberon en lévitation devant sa petite tête aux yeux encore clos, Aya glissa machinalement une main sous son oreiller pour attraper son Miroir. Elle savait que Drago devait être en cours à cette heure-ci, et ne comptait pas vraiment l'appeler, ce ne fut pourtant pas son reflet qu'elle vit en regardant le miroir, mais bien celui aux cheveux blonds presque blancs de son frère qui la regardait avec un oeil inquisiteur.
- Enfin ! Où étais-tu passé ? Lança-t-il aussitôt sans même essayer de masquer son ton de reproche.
- Je... Salut, frangin, fit-elle avec un sourire en coin après un moment d'hébétement.
- Qu'est-ce que tu foutais ? Continua-t-il sur le même ton, sans se soucier des formalités d'usage.
- Occupée, grogna-t-elle.
- Mais encore ?
- T'es pas en cours normalement à cette heure-ci ? Il est quoi, dix heures à Poudlard ? Fit-elle en regardant sa montre.
- Et demi. Je sèche. Binns ne lève jamais la tête de sa liste quand il fait l'appel, Crabbe répondra présent pour moi. Et n'essaie pas de changer de sujet !
- Drago, fais pas chier. Je suis désolé, ça n'arrivera plus, d'accord ?
- Même si tu t'amusais bien avec tes supers copains de Durmstrang, tu aurais pu penser à moi, ronchonna-t-il la mine boudeuse.
- Mes oreilles m'abuseraient-elles ou tu es jaloux ?
Pour toute réponse, Drago grogna en plissant le nez.
- Je ne m'amusais pas, d'accord, dit-elle avec un sourire amusé qu'elle perdit aussitôt. Il y a eu... un accident pendant les duels...
- C'était toi l'accident ? Demanda-t-il goguenard après l'avoir scruté un instant.
- Oui.
- Qu'est-ce que t'as fait encore ? Lança-t-il déjà plus jovial en se détendant un peu dans l'un des luxueux fauteuils de la salle commune des Serpentard.
- Trois fois rien... marmonna Aya
- Tu as eu des ennuis ?
- Pas encore, le rapport de Karkaroff doit être en chemin pour le manoir à l'heure actuelle, éluda-t-elle.
- Et Karkaroff lui n'a rien dit ?
- Si, je suis collée avec Katlitz jusqu'à nouvel ordre...
- C'est tout ?
- Yep.
- T'es sûr ?
- Affirmatif.
- Pourquoi tu fais cette tête alors ?
- Quelle tête ?
- Celle-là, dit-il en pointant un index sur le reflet de sa soeur.
- Ma tête est normale, se renfrogna Aya.
- T'es sûr que ça va ?
- Bien sûr, répondit-elle en essayant d'avoir l'air le plus naturel et convaincant possible.
Elle ne pouvait se résoudre à raconter la fin désastreuse de sa journée d'anniversaire. Elle savait que cela n'apporterait rien de plus que des complications. Il était même fort possible que sa première réaction soit d'envoyer une lettre à leurs parents, ou pire encore, courir jusqu'à Severus pour obtenir des explications en bonnes et dues formes. Sans parler qu'il risquait une peur panique si d'aventure Aya oubliait encore de donner des nouvelles. Elle manquait cruellement de détails sur ce qui lui arrivait pour le rassurer, ou se rassurer elle-même sur sa condition, elle préférait donc se taire. Mais mentir effrontément à Drago, était bien plus compliqué que d'embobiner Emilia ou Gustav.
- Tu me caches un truc toi.
- Ben, voyons, soupira-t-elle en feignant l'exaspération.
- Si, j'en suis sûr, continua Drago en la scrutant les sourcils à nouveau froncés, puis soudain ses yeux gris s'écarquillèrent et un sourire malin se dessina sur son visage. Oh-oh, je vois. Comment il s'appelle ?
- Qui ça ? S'étonna Aya sans comprendre.
- Le garçon pour lequel tu as lâchement laissé tomber ton frère, évidemment.
- Qu... non ! Enfin, n'importe quoi...
- Je passerais l'éponge pour cette fois, dit-il le nez en l'air. Mais que ça ne se reproduise plus.
- Drago ?
- Mh ?
- Je t'ai déjà dit que t'es un idiot ? Demanda-t-elle avec un demi-sourire.
- Oui, je crois bien en avoir un vague souvenir, confirma-t-il en mimant une intense réflexion.
Aya laissa échapper un petit rire, mais le coeur serré de jouer la comédie avec lui, elle prétendit devoir retourner en cours pour couper court à leur conversation. Elle rangea son miroir, et attrapa le petit fléreur dans ses mains pour le lever à la hauteur de son visage.
- Tu es peut-être bien le seul être vivant à qui je n'ai pas besoin de mentir, dit-elle tristement à la boule de poil, qui bâilla longuement avant de se pelotonner dans le creux de ses mains.
Aya resta plusieurs minutes, immobile, à regarder le ventre du fléreur se soulever au rythme de sa respiration. Elle se demandait ce qui lui arriverait si elle décidait elle aussi de sécher, pour rester ici quelques heures, seule avec sa créature magique. Dans le meilleur des cas, Katlitz lui attribuerait une nouvelle heure de colle, dans le pire, l'information remonterait jusqu'aux oreilles de Karkaroff lui donnant un prétexte de la priver de Quidditch.
Aya soupira en se redressant, si on lui enlevait le Quidditch par dessus le marché, elle était sûre de ne pas finir l'année à Durmstrang.
Après avoir usé de toute sa concentration pour parvenir à esquiver Emilia et Willem en cours de botanique, puis en celui de potions, Aya était retourné directement dans sa chambre sans manger. Ignorant du mieux qu'elle pouvait son estomac qui se tordait pour manifester sa désapprobation quant à cette nouvelle manie.
Au bout d'un certain temps, allongée sur le flanc, face contre le mur, les yeux grands ouverts sans trouver le sommeil, Aya entendit quelqu'un toquer à la porte, ce qui, il fallait le reconnaître, était très rare dans ces dortoirs. Mais elle ne bougea pas, et se contenta de fermer les yeux.
Une minute passa, puis la porte s'ouvrit et se referma doucement.
- Je t'ai monté à manger, tu n'as rien avalé depuis avant-hier d'après Emi, fit la voix fébrile de Willem.
Elle l'entendit faire de la place sur le bureau pour poser quelque chose dessus, mais plongée dans son faux sommeil, elle ne réagit pas. Son estomac, lui, cependant, décida de s'exprimer par un long gargouillement sonore qui retentit clairement dans le silence de la chambre. Il était inutile de faire semblant, Willem devait parfaitement se douter qu'elle était réveillée mais elle ne changea rien à son attitude. Si elle lui parlait, elle le savait, elle allait encore devoir mentir et manipuler. Elle n'en avait pas envie, et d'ailleurs, elle n'avait envie de rien du tout.
- Je voulais juste te dire que je suis désolé... j'espère qu'on pourra en parler, mais en attendant, tu n'es pas obligé de rester toute seule, lança-t-il.
Aya attendit.
- J'ai raisonné Gustav, il avait besoin d'une bonne nuit de sommeil, il ne pensait pas ce qu'il t'a dit. Ça serait bien que vous vous parliez tous les deux avant qu'il parte, on n'a jamais voulu... enfin, je ne veux pas t'embêter. On est dans la salle commune, si tu changes d'avis, abandonna-t-il alors qu'elle l'entendait repartir vers la porte. N'oublie pas de manger en tout cas.
Aya rouvrit les yeux au moment où la porte claqua. Elle était décidée à ne pas manger, mais après une minute à contempler la lumière vacillante de la bougie sur le mur en face d'elle, son corps agit de lui-même pour attraper l'un des gros sandwichs que Willem avait posé sur le bureau.
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Mille excuses pour le retard, pour faire court c'était pas du tout ma semaine cette semaine. Même si les chapitres sont écrits à l'avance je fais toutes les corrections juste avant publication, comme la vérification ultime si vous voulez, et j'ai absolument pas eu le temps de m'en occuper cette semaine ! Il me reste un chapitre à corriger pour avoir les 7000 mots, mais mes yeux commencent à se fermer donc je vous poste déjà ces deux-là au cas où je m'endors sur le clavier !
À toute à l'heure, ou peut-être demain, avec toutes mes excuses encore un fois !