𝟾 | 𝚌𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚌𝚒𝚗𝚚𝚞𝚊𝚗𝚝𝚎-𝚗𝚎𝚞𝚏

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Bonne lecture !

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Arrête de faire ça.

Oikawa, je sais ce que tu penses, arrête de faire ça.

Oikawa.

Oikawa.

Tooru.

Un soupire tremblant passa ses lèvres, et Oikawa releva la tête. Ses yeux trouvèrent ceux de son meilleur ami, qui s'était installé juste à côté de lui sur l'une des chaises de la salle d'attendre. Les doigts croisés, crispés entre eux, il se força à arrêter de réfléchir.

– Oikawa, dit-il à nouveau, à voix haute cette fois.

Il ne savait pas vraiment depuis combien de temps ils attendaient, mais Iwaizumi n'avait cessé de l'appeler. Dès que ses pensées se perdaient, dès que l'idée qu'il était la raison a tout ça (peut-être pas la raison entière, mais une part importante tout de même), dès que ses lèvres recommençaient à trembler ; à chaque fois il entendait la voix de son meilleur ami qui essayait de le faire revenir.

Il tentait de ne pas faire ça. Ce n'était pas son moment, ce n'était pas lui la victime : tout ce qu'il avait, c'était un bras en écharpe, le visage tuméfié, et une ou deux côtes cassées. Pour le nombre de coups qu'il s'était pris, c'était vraiment ridicule. Daishou était peut-être en train d'y passer, et il ne pouvait s'empêcher de s'en vouloir. D'attirer l'attention d'Hajime. De faire son intéressant, comme d'habitude.

Sa lèvre recommença à trembler, et quand il releva légèrement les yeux, son regard tomba sur Kuroo qui sanglotait à l'autre bout de la salle, calé entre le distributeur à boissons et le mur. Son cœur se serra.

Un genou vint taper contre le sien, et l'épaule de son partenaire se colla à la sienne.

Il ne dit rien de plus, mais Oikawa ne put s'empêcher de lui demander :

Tu penses qu'il va s'en sortir ? T'as vu la taille de sa blessure...

J'ai vu, oui. Mais c'est Daishou. Avec lui, on sait jamais vraiment. Je suis sûr qu'il ne laisserait pas Kuroo.

Il a l'air au bout. Tu crois qu'ils vont s'en remettre ?

J'en sais rien, Oik'. Les liens, c'est quelque chose de particulier. Solide et fragile. Si le leur est brisé....

Du coin de sa vision, il vit la bouche d'Iwaizumi se tordre.

Si Daishou s'en sort, ils auront le temps de reconstruire tout ça. C'est pas ton problème. Toi, tu dois juste prier pour que ton ami s'en sorte, t'excuser quand il se réveillera, et le laisser te frapper s'il en a envie.

Étrangement, qu'Hajime ne lui dise pas quelque chose comme « ça n'est pas ta faute, pas du tout » le rassura. Se prendre une beigne, ça il pouvait le faire. Le juste retour des choses. Il aurait largement préféré que Kuroo se lève pour lui foutre son poing dans la tronche, plutôt que de pleurer en tremblant.

Quand les infirmières l'avaient ramené dans la salle d'attente, alors qu'il avait été le dernier à se faire soigner, Kuroo avait marché jusqu'à une chaise, à côté d'une vieille dame, et s'y était laissé tomber. Il avait regardé dans le vide, les mains ballantes, puis s'était relevé en vitesse pour aller vomir le contenu de son estomac dans la corbeille non loin de là.

Les autres personnes présentes avaient grimacé, certaines avaient commencé à se plaindre, puis Iwaizumi leur avait dit de la fermer. Une fois Kuroo éloigné, il avait pris la corbeille et était descendu la jeter dans une benne à ordure.

Iwa, je vais le dire une fois. Je te jure que ça sera la dernière, et qu'après je ne ferais plus chier personne.....

Une larme roula sur sa joue, et il l'essuya en vitesse. Les sanglots n'étaient pas loin mais ce n'était pas le moment.

Je suis désolé. Je suis si désolé. Je pensais vraiment... je sais même pas ce que je pensais. Je suis arrogant, ça, c'est sûr, et pendant un moment j'ai vraiment cru que j'étais différent, que moi je pourrais mettre un terme à tout ça. Que si je ne prévenais personne, je pourrais rentrer discrètement et personne n'allait être au courant. Je voulais que tu sois la dernière personne au courant, parce que j'avais l'impression que si je te mentais encore une fois, tu allais t'éloigner. Quand tu m'as rejoint dans la rue, j'ai cru mourir.

Arrêter les larmes était beaucoup plus dur que prévu : sa gorge était si serrée qu'il ne pouvait rien faire à part poser sa main valide devant ses yeux.

Je t'aime tellement, tu sais ? Je sais que je ne suis pas un cadeau, et que même si je suis fier qu'on soit les meilleurs, j'aurais jamais cru que ça nous amènerait à ça. Et tu sais le pire ? J'ai presque du mal à regretter. Oui, j'ai pensé que j'aurais pas dû les laisser intervenir, mais j'arrive pas à me dire que j'aurais simplement pas dû sortir. Le Soul Eater est entre les barreaux, ils l'ont enfin arrêté, maintenant c'est fini. Et Daishou est dans un bloc, les organes à l'air. Franchement, je saurais même pas quoi changer si on revenait en arrière.

Par leur lien, ils pouvaient parler sans se soucier de leur voix ou de leur état physique ; bien heureusement, car Oikawa n'aurait pas été capable de ne serait-ce qu'ouvrir la bouche. Il s'en voulait de pleurer ainsi alors que Kuroo était aussi mal et qu'Iwaizumi se forçait à rester de marbre, mais en sentant ce dernier entourer son corps de ses bras le barrage céda sans autre forme de procès.

Un câlin, une étreinte bienvenue, dans laquelle il se réfugia comme un dernier repère.

Je suis désolé, Hajime. Je voulais pas ça, pas ça du tout. Je voulais juste que ça se termine, je voulais lui montrer, je voulais venger ma...

Soudain, il sursauta. Reprenant peu à peu son souffle au milieu des sanglots, il sauta presque sur ses pieds en laissant échapper une grimace de douleur due à ses côtes.

– Ma sœur, croassa-t-il.

Sa voix était tout enrouée, alors que son partenaire ouvrait de grands yeux.

– Elle....

– Elle est ici, continua-t-il en se raclant la gorge. Il faut que j'aille la voir. Je vais aller.... marcher. Puis la voir. Je reviendrais ensuite.

Tu veux que... je vienne avec toi ?

Oikawa secoua la tête.

Il faut que tu gardes un œil sur Kuroo. Et que tu m'appelles si jamais y'a du nouveau pour Daishou. Il faut que quelqu'un reste.

Puis, en visant la joue bleuie de son meilleur ami, son œil gonflé et le bandeau blanc qui entourait sa tête, ajouta :

Et ne te force pas à faire le fier. Si ça va pas, appelle-moi.

Il se pencha, les joues humides et les lèvres gercées, pour l'embrasser tendrement. Le contact ne dura que quelques secondes à peine, et Hajime ne se recula pas : il ferma les yeux à son tour, et soupira contre ses lèvres.

Quand Oikawa s'éloigna, ils échangèrent un dernier regard avant qu'il ne tourne les talons pour retourner à l'accueil.

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Papermoon || KuroShouWhere stories live. Discover now