Oliver et le mythe du Prince Charmant

Chapitre 16 : Et maintenant ?

Parmi les millions de personnes sur Internet et les centaines d'étudiants à Longdale High, il fallait que je tombe sur un de mes meilleurs amis. Évidemment. J'aurais dû m'en douter, étant donné que le destin adore me lancer des imprévus ces derniers temps. Mais je dois dire que cette révélation est le plus gros imprévu auquel j'ai dû faire face.

Je continue de regarder Flynn, cherchant ma voix en vain. Je dois associer tout ce que je sais à propos d'Isak à cette personne que je croyais déjà connaître. Oui, c'est la migraine assurée. Mais quelque part, tout cela a du sens. Il y a toujours eu un lien entre Flynn et moi. Je me suis toujours convaincu que c'était de l'amitié car c'était la seule chose à faire, mais maintenant... Je ne sais plus quoi penser.

Tout ce que je sais, c'est que le garçon que je désespérais de rencontrer se tient devant moi en ce moment même.

— S'il te plait, murmure Flynn, dis quelque chose.

— Pourquoi tu ne me l'as pas dit dès le début ? demandé-je, car c'est la première question que je parviens à formuler.

— Je... Je voulais garder mon compte secret et quand j'ai vu ton message, j'ai paniqué. Mais tu avais besoin de moi... enfin d'Isak pour ton article, alors j'ai voulu t'aider. Je ne pensais pas qu'on allait se mettre à parler tous les jours, de tout et de rien, et je ne pensais pas qu'on s'entendrait si bien.

— Comment ça ? On est amis, Flynn. Pourquoi tu en doutais ?

— Parce qu'on n'a jamais vraiment... parlé. La plupart du temps, on est avec le reste du groupe et, c'est vrai, parfois on discute, mais ça n'a jamais été comme nos discussions sur Instagram. J'avais enfin l'impression d'apprendre à te connaître et de pouvoir être moi-même. C'est... c'est difficile à expliquer.

Je hoche la tête. Cela pourrait paraître incompréhensible pour n'importe qui d'autre, mais je comprends parfaitement ce qu'il essaye de me dire. Si je connaissais Flynn aussi bien que je le pensais, j'aurais pu deviner que les messages venaient de lui. Mais je n'en avais pas la moindre idée.

— Dès que les choses sont devenues plus sérieuses, reprend Flynn, j'ai voulu te dire que c'était moi. Je voulais t'en parler à la soirée, vendredi dernier, mais tout s'est compliqué. Et ensuite, Matt a posté le message à propos de toi sur le groupe du lycée, et je ne voulais pas te rajouter d'autres soucis. Mais quand j'ai lu ton message hier, j'ai... Je ne pouvais pas continuer de me taire. Je te devais la vérité, moi aussi.

Ça fait déjà beaucoup d'informations à digérer. Je prends une longue inspiration, essayant de remettre de l'ordre dans mes pensées. Je repense au contenu du long paragraphe que j'ai envoyé et je suis à deux doigts de rougir. Je reviens sur ce que j'ai dit : je suis déjà en train de rougir.

— Donc, tu... dis-je. Tu me dis tout ça pour me faire comprendre que tu n'es pas intéressé, c'est ça ? Ça ne fait rien, comme je l'ai dit, je savais que je prenais un risque. Enfin, je ne savais pas que le risque était si énorme, mais... Je vais juste avoir honte pendant quelques années, voire quelques décennies, mais ce n'est pas grand-chose. Il faut que...

— Quoi ? Oliver, stop. Ce n'est pas ce que je veux dire !

— Ah bon ?

— Non, pas du tout. Je voulais te dire que c'est réciproque. Je n'étais pas sûr de ce que je ressentais, au départ, mais maintenant je le suis. Et la soirée qu'on vient de passer me l'a confirmé davantage. J'adore te parler, j'adore passer du temps avec toi... Et j'ai aussi le sentiment que tu es plus qu'un ami pour moi.

J'ai l'impression que le temps s'arrête autour de moi. Je commence à me demander si j'ai bien compris ce que Flynn vient de dire, mais son regard est sans équivoque. Mes sentiments confus sont réciproques.

Soudain, une pensée me fait froncer les sourcils. J'ouvre la bouche pour parler, mais Flynn prend les devants.

— Tu te demandes pourquoi j'ai eu un rendez-vous avec une fille, pas vrai ? me demande-t-il comme s'il était télépathe.

— Oui, je... Oui.

— Ça fait un moment que je suis perdu en ce qui concerne ma sexualité. J'ai passé beaucoup de soirées à faire des recherches ridicules sur Google, comme si un algorithme pouvait mieux comprendre ce qui se passe dans ma tête. Je crois que je suis bisexuel. Les filles m'intéressent, mais les garçons aussi. Et évidemment, il y a... toi. Je dois avouer que la confusion n'a fait que s'amplifier quand tu nous as fait ton coming-out.

Je fixe mon regard sur Flynn, pas sûr de comprendre où il veut en venir.

— Je te trouve tellement courageux, explique-t-il face à ma confusion. J'aimerais être aussi sûr de ce que je ressens. Mais quand tu nous as dit que tu étais gay, ça m'a fait penser au moment où je suis arrivé à Longdale. Tu étais dans mon tout premier cours cette année-là. Je ne savais pas pourquoi, mais je ne pouvais pas te quitter des yeux. Puis tout à coup, tu es venu me parler pour me souhaiter la bienvenue. J'étais terrifié. Je ne sais même pas comment j'ai fait pour te répondre.

— Sérieusement ? Je croyais que ça n'était arrivé qu'à moi. J'étais... J'avais un faible pour toi, à l'époque.

Les yeux de Flynn s'illuminent comme si son plus grand rêve venait de se réaliser. Il se gratte l'arrière de la tête, comme toutes les fois où il est nerveux. Un silence s'installe entre nous. Je pense que nous avons tous les deux besoin d'une minute ou deux pour se remettre de toutes ses secousses. À côté de cela, les attractions à sensations fortes tout autour de nous sont une véritable promenade de santé.

Cette soirée ne s'est absolument pas déroulée comme je m'y attendais. Mon plan parfaitement établi a été jeté par la fenêtre. Mais peut-être que le destin m'a fait une faveur, cette fois-ci. Peut-être qu'il n'y a pas que du mauvais dans l'imprévu.

— Et maintenant ? demandé-je pour briser le silence.

— Maintenant, j'imagine qu'on va essayer de découvrir ce qu'on est l'un pour l'autre. Et ce qu'on pourrait être.

Je ne peux qu'acquiescer puisque Flynn vient d'utiliser mes propres mots. De toute manière, je n'ai pas la moindre envie de protester.

— J'adore cette idée, dis-je.