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[Amy Stroup — In the shadows]

« je faisais tout pour que les gens me détestent, mais ils finissaient par m'aimer

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« je faisais tout pour que les gens me détestent, mais ils finissaient par m'aimer. »

Daniela

Mes yeux étaient fixés sur l'horizon que m'offrait la fenêtre arrière droite de la voiture. L'horizon, une étendue d'arbres qui me brouillait finalement la vue. Je connaissais cette route par cœur, j'aurais pu conduire la voiture de Papa jusqu'au pensionnat les yeux fermés. Cette route, je la faisais, aller-retour, chaque vacances scolaires, depuis trois ans.

J'avais espéré un jour ne plus retourner entre ces murs fades et sans joie, mais il fallait croire que c'était peine perdue. Voilà que je revenais à Woodton pour ma toute dernière année. Après ça m'attendait la fac, ma gloire et mon succès.

À vrai dire, je ne pouvais pas vraiment blâmer mon pensionnat. Il formait les meilleurs élèves dans l'ombre pour que leur lumière n'éclate qu'une fois dans les études supérieures. J'avais toutes mes chances d'intégrer Harvard, Yale ou Stanford après avoir fini mon année. Enfin, encore fallait-il que je survive entre ces murs qui enveniment chaque fois plus mon exaspération et mon impatience.

— Allez, souris, c'est ta dernière année ! s'enquit ma mère en me jetant un regard joyeux dans le rétroviseur.

Je soupirai en collant ma tête contre la vitre. Je ne voulais pas revoir toutes ces araignées affreuses qu'étaient mes camarades. J'en avais assez de les supporter, cela faisait deux ans déjà que je prétextais être amie avec la plupart d'entre-eux, et mon hypocrisie commençait à m'étouffer. Ils ne voyaient pourtant rien, comme si j'étais la plus admirables des filles qu'ils avaient pu rencontrer alors que je n'étais que celle qui avait la plus grande toile. Une toile auxquels mes cauchemars ne voulaient se décrocher, et qui allait finir par m'asphyxier.

— J'aurais pu retourner dans un lycée public, murmurai-je.

Ma déclaration ne passa pas inaperçue aux oreilles de mon père qui, par le biais du rétroviseur, me lança un regard sévère rempli de sous-entendus. Je savais ce qu'il allait me dire que si j'allais à Woodton, c'était pour mon bien, et que si je n'avais pas voulu venir ici, j'aurais dû réagir avant et m'ouvrir un peu plus aux autres.

— Daniela, tu sais très bien pourquoi tu es là, me répondit durement mon père.

— Et puis tu oublies Madison et Jessica, que feraient-elles sans toi ? surenchérit ma mère.

Sûrement autre chose que cracher sur le dos des autres élèves.

Mais je gardai cette réplique pour moi, mes parents ne savaient pas quelle peste je pouvais être une fois les portes du pensionnat passées. Je m'étais forgée une réputation plutôt paradoxale : je faisais tout pour que les gens me détestent, mais ils finissaient par m'aimer. Madison et Jessica étaient mes seules vraies amies là-bas, elles me connaissaient telle que j'étais, même si elles ignoraient tout de ce que j'avais vécu avant. C'était bien la seule chose dont je ne parlais jamais, mon passé. J'évitais la plupart du temps d'y penser, même s'il était toujours là, derrière moi comme une ombre à me suivre qu'importe où j'allais. Il était lié à ma présence dans ce stupide pensionnat depuis trois ans. Comme une coquille vide, avant ça j'étais renfermée sur moi-même, et depuis que Madison et Jessica étaient là, mes parents pensaient bêtement que j'allais mieux et que cette école était la réponse à tous mes soucis. D'un côté, ce n'était pas tout à fait faux, j'allais mieux. Mais je n'étais pas encore complètement reconstruite.

Woodton Suspect [EN RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant