Chroniques Frivoles d'un Royaume Modeste

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En fin d'après-midi

        Persévérant dans son entêtement, Brenda avait marché sur les talons d'Inigo toute la journée. Elle ne l'avait pas quitté d'une semelle. Elle marchait dans ses souliers, au sens quasi littéral du terme. Depuis le début de la matinée, la guerrière accompagnait ainsi le maitre d'armes sans relâche, partout où il allait. Même lorsqu'il allait au petit coin, elle restait à proximité des latrines*.

        En ce moment toutefois, et malgré tous ses efforts, elle se retrouva seule. Le chef de l'armée royale avait été convoqué par le roi. Brenda avait bien tenté de le suivre, mais le regard que lui avait lancé le petit homme était sans équivoque. Elle reconnaissait avoir poussé l'audace à ses limites, un pas de plus et elle dévalait la falaise. Ce moment qu'Inigo passa avec le roi sembla durer une éternité pour la femme qui marchait de long en large devant les portes closes. Mais que pouvaient ils se dirent de si important ? Est-ce qu'ils préparaient une controffensive sur le dragon ? Est-ce qu'ils planifiaient l'exploration de terres lointaines ? Est-ce qu'ils négociaient un plan d'invasion secret ?

        Finalement les portes s'ouvrirent après de longues minutes. Inigo en sortit le visage long et inexpressif. Pour la guerrière en quête d'action, cette figure grave ne pouvait qu'augurer de bonnes nouvelles. Plus les sujets discutés étaient sérieux, plus grandes étaient ses chances d'être impliquée dans une nouvelle aventure.

— Et alors, quelle est notre mission ? ne put s'empêcher de questionner aussitôt Brenda.

        Sortant des limbes, Inigo remarqua soudainement la présence résiduelle de la jeune guerrière à ses côtés. Afin de s'éclaircir les idées, il secoua énergiquement la tête. Le maitre d'armes observa la femme imposante qui se tenait devant lui. Un sourire calculateur imprégna alors son visage ridé. Il la fixa d'un regard soutenu et lui annonça sur un ton important.

— J'ai une mission pour toi.

        Brenda du retenir ses genoux pour ne pas bondir de joie.

— Ce soir, tu seras de garde aux portes du château !

        La guerrière tenta de déceler une trace de moquerie dans le regard du petit maitre d'armes. Mais rien, pas la moindre poussière de raillerie ne lui piquait les yeux. Il était vraiment sérieux... La seule chose que Brenda trouva à répondre fut :

— Oui, mon capitaine ! acquiesça-t-elle accompagnée par un rigide salut militaire.

        Inigo leva les yeux au ciel et poursuivit son chemin, seul finalement. Estomaquée, Brenda était restée sur place, immobile, le regard fixé dans le néant**. Son moment était enfin venu, on lui avait assigné une mission. L'après-midi était déjà bien avancé, elle n'avait que peu de temps pour se préparer. Émergeant de sa stupeur, elle se lança d'un pas énergique en direction de l'armurerie. Elle devait se préparer.

* Mais cela elle ne le referait plus jamais. Au nom de tous les effluves de ce monde, elle ne s'approcherait plus jamais des latrines lorsqu'Inigo s'y trouve. Ho non, plus jamais.

** Regarder le néant est une drôle d'activité en soi. Elle s'apparente aux autres occupations telles que : marcher dans le vide, déplacer de l'air ou parler pour ne rien dire. Je suis spécialement efficace dans cette dernière.