Le château - Partie 6

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— Et officieusement ?
— Officieusement ? J'ai pu lire les lettres qu'elles s'échangeaient quand Madeleine s'absentait pour rendre visite à son vieux père et j'en ai rougit jusqu'aux oreilles.
— Ooooooooh, seriez-vous pudibonde madame ?
— Pas du tout ! Mais tu en aurais fait autant : elles sont très très TRÈS explicites. Et ces femmes ne manquaient pas d'imagination. Ou de pratique. Ou les deux. Enfin. Marie y encourageait aussi Madeleine à se réconcilier avec Sophie, avec des arguments si bons que notre châtelaine a fini par accepter.
— Quels genre d'arguments ?
— En gros ? Que Sophie n'avait probablement pas eu le choix face à son mari, et qu'il était horrible d'éprouver de la rancœur contre une victime de viol à cause les circonstance dudit viol.
— Évidemment, présenté comme ça Madeleine n'avait pas trop le choix. Sophie a apprécié ?
— Elle a été heureuse de retrouver son amie d'enfance, sans en souhaiter davantage. Son époux était mort depuis peu quand Madeleine est revenue vers elle pour s'excuser. Un peu plus tard, vers soixante ans, elle s'est remariée avec un veuf peu fortuné qui la rendait très heureuse, de ce qu'elle écrivait à Madeleine. Toutes les trois ont continué cette petite vie tranquille pendant une dizaine d'années, puis Madeleine est décédée dans son sommeil. Marie a été remerciée par les neveux de Madeleine avec une somme assez conséquente pour lui permettre de finir sa vie confortablement. Mais elle a préféré se retirer dans un couvent et est morte peu de temps après. Sophie était présente aux deux enterrements malgré son âge, je n'ai pas trouvé beaucoup de traces d'elle après cela. Si j'en crois les archives de l'église elle a vécu jusqu'à plus de 80 ans et connu ses arrières petits enfants.
— L'un dans l'autre, ce sont de belles vies.
— Oui. Un peu solitaires quand même. Les frères de Madeleine ont refusé tous contacts avec elle quand les rumeurs ont commencé à se propager, et ont bien entendu tenu leurs enfants loin d'elle également. Sa sœur devait mentir pour lui écrire et, rarement, la voir. Madeleine était très proche des enfants de celle-ci quand elle vivait encore avec leur père et n'a plus eu de contacts avec eux après son déménagement. Elle était plutôt heureuse, mais avait quand même des regrets quand aux enfants qu'elle n'a jamais eu, et ceux de sa famille qu'elle n'a pas pu connaître. Elle y incluait les enfants de Sophie.
— Et ça n'a pas tant changé que ça.
— On est moins nombreuses à être mariées de force aujourd'hui, quand même.
— C'est vrai, on s'en sort mieux.

Aurore lança un regard surpris à Leila, qui lui sourit. Elle sourit en réponse.

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