ψ Chapitre 29 ψ

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Gab se tient face à moi, stoïque, entouré de quatre gardes. Je l'observe et j'ai comme un pincement au cœur. Quel est cette douleur ? Je me retiens de porter ma main contre ma poitrine, je ne veux pas lui montrer que je souffre. Il a beaucoup changé, et pas seulement son regard. Ses cheveux sont rasés de près, ses joues sont presque creusées. J'ai l'impression qu'il est plus grand que dans mes souvenirs. En tout cas, il est bien plus musclé, ça c'est sûr. On dirait qu'il a subit un entraînement intensif. Il ne bronche pas d'un poil, et ne tremble pas lorsqu'il pointe son arme face à moi.

— Rends-toi, m'ordonne-t-il sévèrement.

Je lève un bras à l'horizontal, à l'attention des personnes derrière moi. En effet, le bruit que leurs armes viennent de faire m'indique qu'elles sont chargées, et pointés sur le petit groupe. Je cherche mes mots.

— Est-ce qu'on peut parler ? Tenté-je.

Il essaie de cacher une grimace de dégoût, mais je l'ai vu.

— Je ne veux pas te parler, crache-t-il. Sale traîtresse.

Ses mots me blessent plus qu'ils n'auraient dû. J'ai envie de pleurer, de m'effondrer, de lui dire de redevenir le Gab que je connaissais. Mais je ne fais rien de cela.

— Tu ne comprends pas, dis-je calmement en baissant mon bras. Atkins te monte la tête, il a effacé ta mémoire. Tu as donc vraiment oublié qui je suis ? Tous les moments que nous avons passé ensemble ? L'expérience ?

Il hésite.

— Il m'a prévenu que tu dirais ça. Je ne te laisserais pas me monter la tête.

— Alice ! Qu'est-ce que tu attends pour le tuer ! Rugis Karla. Tu vois bien qu'il n'a rien à faire de ce que tu lui dis !

A ces mots, les armes de mon groupe s'élèvent à nouveau, canons béants pointés sur Gab.

— Le premier qui touche à un cheveu de Gab en subira les conséquences, les menacé-je les dents serrés.

Je vois dans leur regard de la peur. En effet, je remarque une énergie bleutée émaner de mon corps. Je me calme et la lueur disparaît. Je me retourne face à Gab.

— S'il te plaît, le supplié-je. Viens avec nous, les autres t'attendent !

Et à ce moment, tout se passe très vite. Un coup de feu, une douleur atroce, et me voilà un genou à terre. Je n'ai pas rêvé, il vient de me tirer dessus, et le sang qui s'écoule du trou dans ma cuisse me confirme que c'est bien réel. Il m'a tiré dessus, me répété-je en boucle dans ma tête. Je me relève, et vais chercher de mes doigts la balle logée dans ma cuisse. Je l'en extirpe, et le trou commence déjà à se résorber. Puis, je prends la balle entre mes doigts et l'observe un moment.

— Ça fait mal, dis-je calmement à Gab. Je suis désolé, mais je te ramènerais avec moi, même si c'est par la force.

Je fais monter l'énergie qui est en moi jusqu'au bout de mon index et de mon pouce. La balle est là, en équilibre entre mes doigts. Je donne une pichenette, et la voilà partie à la vitesse de la lumière. Elle va se loger dans la tête d'un soldat près de Gab, traversant son casque. Ce dernier laisse tomber son arme, puis chute sur les genoux, avant de s'écraser à plat ventre sur le sol. Gab grimace et me tire à nouveau dessus. Je ne sais pas ce qui me prend, mon corps agit de lui-même. Je lève ma main, et une sorte de bouclier bleu se dessine devant moi, arrêtant la balle.

— S'il te plais, supplié-je une dernière fois. Ne m'oblige pas à te faire mal.

— La ferme ! Rugit-il. Tu vas mourir !

La rage au fond de moi commence à grandir. Je la sens prendre possession de chacun des pores de ma peau, glisser jusqu'au sol, se répandre dans l'atmosphère. Karla pose sa main sur mon épaule, et je la retire plus violemment que je n'aurais dû.

— Continuez le travail, grondé-je. Je m'occupe d'eux. Karla, fait grimper tout le monde dans les Terbang.

— Mais...

— Fais ce que je dis ! Hurlé-je.

Je n'ai plus aucun contrôle, et il vaut mieux que les autres s'éloignent de moi. Je bouillonne de rage, j'ai l'impression d'être en feu. Gab tente d'arrêter mon groupe à coup de fusil, mais j'érige un bouclier. Il continu de tirer, et la balles continuent de se heurter au mur bleuté devant moi. Je peux voir la rage émaner de lui, tandis qu'il continu de vider son chargeur sur moi, devant le regard dépité de son groupe. Les trois soldats restants commencent à reculer.

— Restez où vous êtes, leurs ordonne Gab.

— Désolé commandant... bégaye un garde derrière son masque.

Ils prennent le camion et le laisse ici, face à moi. Je sens derrière moi les ouvriers remplir les Terbang des cœur d'Iclahomas.

— Gab... Essayé-je une dernière fois. Comment as-tu pu oublier tout ce que nous avons vécu tout les deux... Dans la forêt, avec Méléna, Léon, Allan et les autres... Tu ne te souviens pas de notre rencontre dans cet hôpital ?

— Tais-toi ! Hurle-t-il en jetant son arme à court de munition. Tu ne comprends rien !

— Alors explique-moi !

— J'ai vu les vidéos ! J'ai vu ce que tu as fait à mes parents ! Tu es un monstre !

Ces mots me brisent le cœur. Atkins lui a bel et bien lavé le cerveau. Mais comment lui prouver que j'ai raison ? Je viens de mener mon peuple ici, pour attaquer et enlever les paysans de cette caste. De son point de vu c'est moi la méchante.

— Tu sais, tu m'avais promis que tu ne me laisserais jamais tomber. Qu'on serait ensemble quoi qu'il arrive. Mais c'est moi qui t'aie abandonné... Je suis désolé...

Je ne peux plus contenir mes larmes, et ma barrière cède en même temps que mon courage.

— J'aurais dû te protéger, si seulement mes pouvoirs c'étaient déclarés avant... J'aurais dû t'écouter le jour où tu as proposé qu'on s'enfuis ensemble... Je suis tellement désolé...

Il ne me répond pas, il reste juste planté là, bras ballant. Il me tourne le dos et commence à partir.

— Tu ne veux plus me tuer ?

— Je ne sais pas. J'ai des choses à vérifier et à faire, mais on se reverra.

— Non attends, ne retourne pas auprès de lui, viens avec moi !

Il se contente de me faire un signe de main, et s'en va. Je suis tenté de lui courir après, de lui sauter dessus, de le ligoter et l'emmener. Mais je ne veux pas que ça se passe comme ça, je veux que ce soit lui qui retrouve confiance en moi. J'ai instauré le doute en lui, je le vois. Sa colère, comme une fumée noire autour de lui, se dissipe.

— Alice... Est-ce que ça va ? Demande une petite voix.

Je me retourne et observe Karla.

— Non... pleuré-je.

La jeune fille, aux longs cheveux bruns, me prend dans ses bras. Son étreinte est chaleureuse, elle me redonne du courage.

— Tout est près, nous pouvons partir. Warren m'a dit de te dire que le caisson est avec nous. Je ne comprends pas.

— Parfait.

Je regarde sur ma droite, et observe Warren, adossé contre l'entrée du Terbang le plus proche. Nous le rejoignons avec Karla. Puis les portes se referment derrière nous, et nous prenons de la hauteur. Je me colle au hublot, et observe une silhouette marcher dans un champ, en direction du centre de la bataille. Il a dit qu'on allait se revoir, j'espère qu'il à raison. Lorsque nous arrivons au niveau du trou dans le plafond de verre, mon peuple à déjà pris la fuite. Nous traversons le verre brisé, et nous voilà de nouveau dans un décor de sable. La première offensive vient de se terminer.

Les Survivants IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant