Ψ CHAPITRE 16 Ψ

993 114 8
                                    

Je me pose les mêmes questions que mes amis. Je me demande si je ne m'en pose même pas plus. Ils me regardent, silencieux. Que suis-je supposée faire ? Je replie mes jambes près de ma poitrine et ferme les yeux. Je n'arrive pas à réfléchir. Méléna coupe alors le silence pesant.

- Alice, qu'est-ce que tu compte faire ?

Je jette un regard à Ayden.

- Et bien... J'ai beaucoup de choses à faire à vrai dire. Je dois sauver mon... frère... Libérer les habitants des souterrains, faire en sorte que nous soyons à l'abri...

- Alice, me coupe Allan. Tu parle comme si tu étais la seule à avoir ce genre de responsabilités.

Je remets une mèche de cheveux derrière mon oreille.

- C'est parce que c'est le cas. C'est moi la bizarrerie ici. Vous n'y êtes pour rien.

Léon soupire alors bruyamment. Puis, il se lève face à nous tous.

- Tu es la bizarrerie ici ? Tu rigoles ? Regarde moi, regarde mon visage. Moi je suis bizarre. Regarde Jana, elle, elle est bizarre. Tu n'es pas la seule, tu n'es pas obligé de vivre tout ça toute seule.

- Nous sommes là pour toi Alice, l'appuie Ayden.

- Nous sommes tes amis, continue Giana. Tu nous as tous aidé d'une manière ou d'une autre. Nous sommes liés, nous allons t'aider à trouver des réponses.

Je porte mes doigts humide à mes lèvres. Les mots ne sortent pas. Je n'arrive pas à parler.

- Ecoute, me demande Méléna. Peut-être que la pièce manquante se trouve près de ton frère. Peut-être que tout va se débloquer là-bas. Peut-être que ça va nous aider nous aussi.

Je hoche la tête, c'est ce que je pense aussi. Mais...

- Je ne peux pas vous demander de risquer vos vies pour moi. Jamais je ne pourrais vous demander une chose pareille.

- Alice, m'interrompt Karla. Je vais te dire quelque chose. J'ai toujours voulu comprendre ce qui s'était passé dans mon village. J'ai toujours voulu me battre, me défendre contre ces bêtes. Mais je n'en ai jamais eut le courage. Et toi, tu as foncé tête baissé dans la ville, remplie de Coahomas, parce que tu voulais retrouver tes amis, qui étaient peut-être morts. Je n'ai jamais rencontré quelqu'un d'aussi fidèle et d'aussi courageux. Je donnerais ma vie pour toi s'il le faut, si cela peut te permettre de sauver tout les autres. Je n'ai plus rien à perdre.

Je reste sans voix. Le discourt de Karla m'a un peu plus émue que prévu. "Donner sa vie pour moi" ? N'importe quoi !

- Je suis d'accord avec elle, lance Méléna. Tu as fait preuve de plus de courage que nous tous ici. Tu nous a sauvé de la prison, tu as survécu à Atkins, à un immeuble qui s'effondre à quelques centimètres de toi, et j'en passe. Tu représente parfaitement ce en quoi l'on croit, tu es le parfait exemple d'une Survivante.

- Mel'... Je...

- Je n'ai pas fini, reprend Méléna en se levant. Je pense qu'il est temps que je passe le flambeau.

Mais qu'est-ce qu'elle raconte ? Pourquoi tout le monde hoche la tête ?

- Alice, me dit-elle. Veux-tu... Devenir notre nouveau chef ? Tu en es bien plus apte que moi.

Ma bouche est grande ouverte. Moi ? Un chef ? Jamais de la vie ! Je n'arrive pas à comprendre qui je suis, ni ce que je dois faire. J'ai ce permanent sentiment de couler dans une mer noire et épaisse, dont je ne peux me sortir. Comment pourrais-je m'occuper d'eux ?

- Mel'... Je n'en suis pas capable voyons...

- Bien sûr que si ! Chantonne Billy. Tu aime bien donner des ordres, et puis, c'est toi qui sait ce qu'il faut faire maintenant.

- Mais...

Allan pose sa main sur la tête du garçon.

- La vérité sort de la bouche des enfants.

En quelque seconde, je suis devenue le nouveau chef des Survivants. Ce statut peut paraître sans importance, futile. A notre échelle, qu'est-ce qu'un chef ? Je dirais plutôt que je suis le capitaine d'une équipe. Voilà pourquoi j'ai demandé à ce qu'on ne m'appelle pas chef, mais capitaine. Je ne sais pas pourquoi, mais pour moi il y a une plus grande notion d'égalités entre les membres de mon groupe et moi, si on m'appelle ainsi.

Il ne nous a pas fallut beaucoup de temps pour commencer à élaborer un plan. Les sacs, au centre, furent bougés sur les côtés et la carte de Karla fut posée à même le sol au centre.

Tout le monde se tiens en cercle autour, tandis que je suis debout, face à mes amis.

- Bon, voilà ce que je vous propose : à l'extérieur, nous avons laissé un tank avec un Iclahomas, Adriel.

- Ils ont des noms ? S'interroge Giana.

- Un tank ? S'extasit Joshua.

Je hoche la tête.

- Je vais entrer avec lui dans le tank, Josh', il te reste des holographes ?

- Oui Capitaine.

Il fouille dans son sac et m'en tend un, je le prend rapidement.

- Une fois à l'intérieur, je vous contacterais. Adriel nous conduira auprès du prince, vous nous suivrez avec le Terbang. Si jamais la zone en ville est trop dangereuse pour atterrir, ou même pour la survoler, nous iront nous poser plus loin. Une fois au sol, une fois sortis des machines, nous sommes des morceaux de viandes vulnérables. J'espère que vous comprenez les risques que nous encourrons.

Je ne voulais pas que les jeunes viennent avec nous, mais ils ont fortement insisté. Ils ne voulaient pas être mis à l'écart, et il est vrai que se séparer serait une mauvaise idée.

- Tout le monde à bien compris le plan ?

- Oui Capitaine, répondent-ils en cœur.

Dans ce cas, en route. Je jette mon sac sur mon épaule, et m'empare du Katana qu'Arun m'a laissée. J'espère qu'elle va bien, qu'Atkins ne lui a pas fait de mal. Je chasse cette pensée, je dois me concentrer sur la mission. Sauver le prince, et avoir des réponses.

Je me met en route, seule, et fait le chemin inverse de la grotte au tank. Il me faut une bonne quinzaines de minutes avant d'enfin arriver. L'engin est toujours là, sa carcasse métallique foncé faisant contraste avec le paysage orangé. La chaleur m'étouffe presque, je n'imagine même pas ce que je vais ressentir en entrant dans cette boîte de conserve.

- Adriel ?!

J'entend un déclic, puis le visage radieux du garçon apparaît. Il est si jeune. D'un bond, il sort de l'engin en se projetant dans les airs, avant de retomber devant moi, pliant un genoux.

- Majesté.

- Nous y allons, je t'expliquerais en chemin. Allons voir le prince.

Il relève la tête, et l'étincelle d'espoir que je vois dans ses yeux fait battre mon cœur. A quel point le prince est-il important au yeux du peuple ? Adriel ne se fait pas presser et m'aide à grimper sur l'engin. Il le fait par politesse, il sait très bien que je peux le faire toute seule, de la même manière que lui. Une fois dans l'engin, je m'installe du mieux que je peux. Je transpire déjà sous la chaleur et l'air lourd. C'est presque insupportable. Mais pas le temps de se plaindre. J'attrape mon holographe, l'allume et la tête d'Ayden apparaît.

- Capitaine ? Dit-il, un sourire en coin.

Il aime beaucoup m'appeler ainsi. Son sourire fait battre mon cœur tellement fort.

- Monsieur Ayden, dis-je sur le même ton que lui. On est partit, allons-y.


Les Survivants IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant