trente-deux

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Aucun affront, c'était soulageant et à la fois inquiétant. J'avais presque eu l'impression qu'elle évitait tout contact visuel ou physique avec moi. Dans un sens, ça me permettait d'éviter de faire éclater une nouvelle dispute, cette fois-ci à  propos de Madame Seo. Son silence paraissait pourtant me dire autre chose, que je pensais pouvoir interpréter mais qui risquait probablement de me conduire vers de fausses conclusions. Je ne la connaissais pas aussi bien que je le pensais, au final; alors je ne pouvais plus rien déduire quoi que ce soit d'implicite venant d'elle.

Même son regard avait changé, et c'était une chose dont j'étais certain. Mon attitude a eu l'impact que je désirais sur elle : je n'étais plus son petit garçon bien docile qu'elle pouvait manipuler.

Même si, pour l'heure, tout ça m'était complètement égal. Au lycée, assis à ma place habituelle, avec mon fichu cahier à spirales qui se décomposait au fil des semaines. Tant pis.
La classe était au complet, les cours commençaient, j'étais détendu dans cet univers que je n'affectionnais pas particulièrement mais auquel j'étais si accoutumé, conditionné depuis mon enfance.

Les minutes passaient, dans ma boîte crânienne fusante des phrases de retard que le prof déblatérait à une vitesse phénoménale, et que je n'avais pas encore eu le temps d'écrire, tentant de les garder en mémoire en même temps que de nouvelles s'y ajoutaient continuellement. Je ne voulais même pas imaginer à quoi ressemblera l'Université l'année prochaine.
Soupirs, plaintes, abandons étaient les seuls sons provenant des alentours et j'avais permuté ma méthode avec une autre, plus efficace, qui était simplement d'écrire les termes importants, de façon succincte voire abrégés.

Réfléchir à ce que le prof disait me permettait de faire abstraction du poids d'un regard très insistant sur ma personne provenant d'une personne dont j'avais malheureusement déjà deviné l'identité. Je savais que j'allais de nouveau y avoir droit, et que, cette fois-ci il ne prendrait certainement pas le risque de s'en prendre à moi en public ce qui rendaient maigres les chances que quelqu'un en soit témoin. Il allait falloir que je me défende tout seul, bien que je ne me soie jamais battu en dix-huit ans de vie et que je sache ne pas faire le poids contre Mark seul.
J'étais terrifié quant à ce qui allait suivre, mais ne devais surtout pas le montrer. Il devait sentir la peur de loin.

C'était la pause, et ma vigilance avait triplé bien que je garde mes yeux rivés sur l'écran de mon portable afin de garder un air naturel. En passant devant les toilettes des garçons, la porte s'ouvrit et je reconnus Donghyuck.

Il était en larmes. Tirait le col de sa veste sur sa gorge pour la cacher.

Sans hésiter, j'accourus vers lui, l'attrapant par le bras pour être sûr qu'il ne m'échappe pas.

-Hey, Hyuck, qu'est-ce qu'il t'arrive? demandais-je en n'obtenant évidemment que des sanglots comme réponses. Viens avec moi.

Il me suivit sans émettre de résistance, continuant de se cacher le plus possible le visage, jusqu'à un renfoncement de mur à l'abri des regards et je me mis face à lui, faisant en sorte qu'il ne baisse pas la tête. Qu'il me regarde.

-Qu'est-ce qu'il s'est passé? Donghyuck, j'ess-

-Tu vas être en retard. tenta-t-il de dire sur un ton froid, ferme, fort; mais sa voix craquait.

Je secouai la tête, en signe que je m'en moquais pas mal. Il avait le même âge que moi mais j'étais en devoir de d'écouter ce qu'il avait à dire; même si cela ne me concernait pas. Sans le vouloir, je ressentais une certaine compassion indépendante de mon propre gré, pour lui et également Jisung; un besoin de les aider, de les sortir de la situation risquée dans laquelle ils se trouvent.

Last Row || nominOù les histoires vivent. Découvrez maintenant