Code Céleste ( partie 2 )

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Il fouille dans sa poche en quête de la clef de la cave. Il se demande si durant ses quelques heures d'absence, elle a touché à son assiette ou si en guise de défi, elle lui a laissé remplie. Il penche plus pour la dernière option, bien que, guidée par la faim, elle pioche un jour ou l'autre dans son plat. En agissant ainsi, elle désire qu'il cède. Qu'il la relâche. Une chose qui n'arrivera pas.
La porte grince lorsqu'il la pousse. Comme à son habitude, il appuie sur l'interrupteur. La petite pièce s'illumine. Il cherche du regard sa précieuse astrophysicienne. Doute une seconde de sa vue. Recommence et parcourt entièrement le lieu. Rien. Trop tard, il saisit ce qui vient de se passer.

“La peste… “

Combien de temps a-t-elle patienté, plaquée à côté de la porte à attendre qu'il la rejoigne ?
Des heures selon elle, une éternité… Mais en de tels événements, elle le sait, on perd la notion du temps…
Il lui semblait que ses battements de cœur parvenaient jusqu'aux oreilles de son ravisseur, qu'à la dernière minute il devinerait son plan et pénétrerait dans la pièce, hors de lui.

Les pieds à présent hors de l'endroit dans lequel elle subsistait, ces derniers jours tous ses sentiments d'angoisse lui paraissent décuplés. Elle tremble comme une feuille. Mais elle ne s'arrête pas. Elle ne doit pas. En aucun cas. Transportée par l’adrénaline, elle court. Elle se déplace aussi vite que possible dans une sorte de sous-sol. À quelques mètres d'elle, une porte. Une unique qui pour son plus grand soulagement, s'ouvre. En constatant qu'elle débouche sur des escaliers elle manque de se figer, mais le son des lourds pas de l'homme derrière elle et sa respiration haletante lui redonnent de l'élan.

Partir

Ce feu, ce souhait l'anime. Elle ne renoncera pas. Son fils l'attend. Qu'importe son travail, l'amour accordé à un enfant vaut plus que tout. Elle n'aspire qu'à serrer son petit dans ses bras, entendre son rire, et sentir son odeur. Il lui manque… Ce n'est pas au ciel qu'elle rêve mais à son étoile qui illumine ses sombres nuits.
Elle atterrit dans un salon. Du moins elle prend ça pour un salon. Aveuglée par la lumière du jour, elle peine à se mouvoir dans son environnement et se cogne à une table. Elle cligne des paupières à plusieurs reprises ses prunelles larmoyantes et déroutée par ce changement de décor marque une demie seconde d'arrêt. Fatale.

Deux bras musclés enserrent son corps et la soulève du sol. Elle se débat. Proteste. Supplie. Mais que lui importe... Il ne lâche mot et s’enfonce dans les profondeurs de sa maison. Retour à la case départ.
Son espoir s’efface comme il est venu. Elle sent qu’il la dépose à terre mais ne fait pas mine de bouger. Elle observe juste l’ouverture se refermer avec désolation. L’homme se place face à elle, à son niveau, l’ancien astronome lui permet de lire sur son visage l’exaspération et la fatigue causées par l’effort de sa tentative d’évasion. Mais elle ignore ce dernier point, plus inquiète à cause du premier.
La voix dure qui s’élève renforce son appréhension :

“ Ne refaites plus jamais ça où je me verrais dans l’obligation de sévir.

Le coup la surprend. Si violent que les larmes envahissent instantanément ses iris. Elle porte la main à sa joue qui commence à se consteller de petites taches rouges et hoche presque mécaniquement le menton. Trop abrutie par le geste de son locuteur elle ne songe même pas à protester. L'homme sourit, satisfait de son attitude.

– Très bien… Croyez-moi Professeur, je n'aime pas m'armer de telles méthodes... Mais avec une personne comme vous, qui se borne à garder son savoir pour elle…

Elle ne répond pas. Ne l'écoute même plus. À quoi bon ? Cette nouvelle descente aux enfers a raison d'elle. Pupilles closes, ses pensées dérivent. La mènent ailleurs, loin d'ici… Près de son fils… Un de ces jours où elle profite de son temps libre avec lui, allongée par terre, ses documents d'astrophysique sur son bureau, désistés pour son plus beau trésor. Elle le contemple faire ses premiers pas, considérer l’herbe avec intérêt, les étoiles de sa chambre avec amusement. Elle rit et lui répète qu'un jour il découvrira à son tour la beauté de l'univers. Elle le berce, longuement…

Son astrophysicienne ne lui prête plus attention. Comme si soudain elle venait de se déconnecter du monde. Et ça ne lui plaît pas. Pour ses travaux il a besoin de toute la concentration de la femme. Pas d'une coquille vide. Il la secoue par l'épaule afin de la rappeler à l'ordre :

– Professeur Gill !

Elle papillonne des paupières et le fixe, courroucée. Mais cette fois-ci, les rôles s’inversent : c'est à son tour de ne pas réagir. Son cerveau fonctionne à cent à l’heure. Frappé de plein fouet par une nouvelle trouvaille, un silence s'installe. Il réfléchit à toute vitesse, essaye de vérifier son raisonnement mais préfère s'en assurer auprès de la personne à l'origine de tout ça :

– "Gill" c'est d’ascendance galloise, non ?

Ses sourcils se froncent et elle acquiesce, perturbée par le changement de sujet. L'excitation s'empare peu à peu de lui tandis qu'il se félicite pour son astuce. Il ne s'arrête pas là pour autant et déterminé à valider sa théorie, il renchérit :

– Vous parlez couramment cette langue, je me trompe ?

La bouche de l'astrophysicienne qui s'entrouve pour aussitôt se sceller, confirme sa réflexion. Ce bref moment d'hésitation où elle comprend la raison de ces questions lui est fatidique. Désormais, il sait. Lui comme elle sont en mesure de décoder les informations tant convoitées.

Il la quitte. Pourquoi perdre son temps avec elle maintenant ? Il reviendra plus tard…  En cet instant des centaines de rapports plus enrichissant les uns que les autres l'attendent.
Elle le retient. Debout, elle pose une main sur son bras ses traits ternis par le désarroi :

– Il n'est pas bon de révéler certains secrets… “

Il l'écarte de son chemin sans délicatesse et sort avec prudence. Il se précipite dans son bureau, impatient, et s'empare de son ordinateur. Là, il clique sur le premier fichier venu. Evidemment crypté. Mais muni d'un peu de patience, il programme un logiciel de décodage qui au bout de longs, longs instants en fini enfin avec le premier document.

Lieu d'atterrissage : Forêt Amazonienne, Brésil à 15,67 km de la frontière du Pérou.
Nom donné : SELEN
Fragment étudié d'une sidérolithe de 651 grammes.
Densité : 30 % de fer, 9 % de magnésium, 21 % de nickel, 30 % matière inconnue.
Analyse en cours. Rapport avec le système Kepler-90 ? Kepler-90h ?

Toutes ces informations, il les parcourt avec avidité, tandis que chargent d'autres données. Il ingurgite tout ça avec passion, fait en sorte de se remémorer chaque détail, chaque information. Il n'en revient pas de tout le travail fourni. Toutes ces connaissances hors de portée de tas de gens… Un tel gâchis...
Une notification de son poste lui indique qu'un autre dossier est désormais disponible. Poussé par la curiosité et décidé d'en apprendre plus il clique dessus. Avant de se pétrifier, ahuri par ce qu'il lit :

bl olbbɹ ɾʌbɐɹ ʎʇunә

Programme fin du monde.

6 / 05 / 18

Sous les nuages du ciel bleu...Where stories live. Discover now