Chapitre 32

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Le cerf se cabra et le Traître et moi échouâmes à terre. Mon dos heurta le sol avec violence et je vis des étoiles. Le Traître se releva rapidement, tira sur mon bras pour que je fasse de même. Je titubai derrière lui, tentant de reprendre mes esprits.

- Allez ! Secoue-toi !

Il accéléra, m'obligeant à le suivre. Je courbai les épaules alors qu'une flèche passaient entre nous. Le Traître me poussa droit dans un fossé. Je me retrouvai tête première dans l'eau croupie. Je recrachai ce qui était entré dans ma bouche.

- Reste accroupie. Ils ne peuvent pas nous voir d'ici.

Il disait vrai. Les longues branches tombantes d'un peuplier nous gardaient hors de vue des archers si l'on restait sans bouger.

- Ils doivent nous prendre pour des éclaireurs pour le reste de l'armée ou je ne sais quoi, soupirai-je. Ils veulent sûrement empêcher les Faes sur place d'avoir le moindre renfort.

- J'aurais tendance à penser que tu as raison et j'ajouterais même que le village a été pris. J'ignore comment, mais ce village n'est plus Fae et je serais prêt à parier ma liberté là-dessus.

Lux aurait-elle réussi à pousser son armée à conquérir une partie de la Faerie, aussi infime soit-elle ? Pour ce que je me souvenais de cette femme changeante, aux deux visages si diamétralement opposés, cela me paraissait impensable. Si elle avait réussi à obtenir ce village, ce n'était sûrement pas grâce à ses ordres mais à travers ses généraux.

- Par où allons-nous passer ? Ils sont partout en haut du mur, ils vont continuer à nous tirer dessus !

- C'est toi, la guerrière, jeune Aderleen ! Je suis un homme de Cour et un paria, moi !

Je roulai des yeux.

- Vous avez plus de quatre cents ans et vous vous en remettez à une gamine de vingt ans ?

- Je n'ai pas le choix et ça ne me plaît pas plus qu'à toi ! Le combat en face à face, je peux faire. Ça – il désigna l'espace vide devant nous, le mur, les archers – je ne sais pas faire ! Peu importent les années accumulées si l'on a jamais été sur le terrain, ma jolie.

Parfait ! En plus d'une légion d'archers, j'avais un poids mort à traîner. Quoi que s'il se faisait percer d'une flèche... Je n'allais pas m'arrêter pour lui.

- Toujours utile à savoir, grogna-t-il.

- Ne tentez pas de me faire croire que ça vous étonne.

- C'est sûrement le pire : ça ne m'étonne pas.

Je bougeai pour m'approcher de l'ouverture tout en m'arrangeant pour rester hors de portée des flèches. Ma colonne vertébrale hurlait de rester penchée après le choc qu'elle venait de subir. Je serrai les dents, cherchant un moyen d'avancer, de retrouver les autres sans finir embrochée. Passer par le village était impensable. C'était là qu'ils étaient concentrés. Donc, il fallait le contourner. Nonobstant, je doutais que Naseok et Ryker aient décidé de contourner le village. Ils en reviendraient au même point. L'armée humaine ne les laisserait pas approcher sans essayer de les tuer.

Ils devaient être passés ailleurs. Peut-être même avaient-ils fait demi-tour pour faire un arc suffisamment large pour éviter toute cette partie dégagée et les archers qui la surveillaient. C'était sûrement la seule option. Nous allions devoir faire demi-tour. Cette perspective me laissait frustrée et agacée. Nous étions si proches ! Si proches et, pourtant, il allait falloir que je revienne sur mes pas, que je retourne en arrière.

Je me résignai. Je n'avais pas le choix. Si je voulais retrouver Ryker et Addy, je devais rester en un seul morceau et, pour ça, je devais faire demi-tour, tout contourner, supporter de nouvelles longues heures de voyage.

L'Arme du Roi (Le Grand Royaume #2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant