Chapitre 16

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La journée de Luciole fut très rude. Ses mains étaient meurtries par le travail qu'il effectuait dans les serres. C'était un de ses nombreux métiers. Il n'avait pas le choix s'il voulait survivre. Il était quinze heure passées lorsqu'il arriva en ville. La serre se trouvait dans la ville voisine , en rase campagne. Il était obligé de faire du covoiturage pour s'y rendre et revenait généralement à pied. Son ventre lui rappela qu'il n'avait rien avalé depuis un petit moment.

Il se rendit dans le seul restaurant qui l'acceptait, sans le juger : La Petite Affaire. Luciole ouvrit la porte et s'assit à une table dans le fond du restaurant, à l'abri des regards indiscrets. Il regardait la carte lorsqu'une voix forte le fit sursauter. Devant lui se tenait Patrick, le patron du bar. Toujours aussi souriant et avenant avec lui. Luciole le regarda un court instant avant de se replonger dans la lecture du menu pour la quatrième fois.

- T'as envie de connaître le menu du jour petit ?

Luciole ferma la carte et hocha la tête.

- Ok. Alors au menu aujourd'hui nous avons une salade de lentille avec son œuf mollet suivi de son poulet basquaise accompagné de tagliatelles fraîches. Nous finirons par un flan à la vanille avec son trait de caramel ! Qu'en penses tu gamin ?

Luciole semblait emballé par le menu, son estomac grondant était du même avis. Sa mine se fit plus sombre en se rendant compte qu'il n'aurait jamais les moyens de se payer un menu complet. A regret, il désigna juste le plat du jour plutôt que  le menu.

- Je te sers ça tout de suite, dit Patrick en se dirigeant vers la cuisine.

Il revint avec l'entrée quelques minutes plus tard. Luciole le regarda interloqué et se mit à écrire  frénétiquement sur son ardoise.

"Mais ce n'est pas ce que j'ai commandé  ! "

- T'inquiète pas gamin c'est la maison qui régale ! Ça me fait plaisir de te voir !

Luciole se recroquevilla. Il était sur la défensive. Pourquoi lui offrait-on un repas ? Depuis qu'il venait, ça n'était jamais arrivé.

- Mange gamin ! dit Patrick le sentant sur le point de prendre la fuite.

Mal à l'aise, il s'exécuta avec dans l'idée de partir au plus vite. Quelque chose avait changé mais il ne savait pas quoi. Cela l'inquiétait. A la première bouchée, il se sentit revivre. Il prit le temps de fermer les yeux et s'imprégner de toutes les saveurs.  Il savoura son entrée avec délice. Il commençait à se détendre lorsque Patrick lui déposa une assiette débordant de poulet basquaise et tagliatelles fraiches. Il y en avait au moins une double portion. Le jeune homme était reconnaissant pour cette générosité impromptue mais ne pouvait s'empêcher de s'inquiéter. Pourquoi le patron était-il si gentil avec lui ?

- Dis moi, ne serais-tu pas...

Luciole sursauta lorsque Patrick vint s'assoir face à lui en lui déposant une part de flanc avec un café. Son interlocuteur d'habitude si jovial semblait hésitant tout à coup. Il se racla la gorge et reprit.

- Tu ne t'appellerais pas Luciole Myndis à tout hasard ?

A cet instant, Luciole pris de panique, se leva d'un bond et tenta de s'échapper mais Patrick le rattrapa par le bras. Luciole se débattit poussant de petits cris de détresse. Patrick sentit son coeur se briser face à la terreur qui était inscrite sur le visage de son hôte. Il ne s'attendait pas à une telle réaction. Malgré tout, il voulait en avoir le coeur net.

- Calme toi gamin ! Calme toi ! Je ne te veux aucun mal. Je veux juste t'aider !

Luciole se débattait de plus belle, tentant désespérément de se dégager de la prise de Patrick. Il étouffait et se sentait piégé. Il aurait aimé pouvoir hurler de tout son soul et s'enfuir. Les larmes coulaient sur ses joues sans qu'il ne puisse rien y faire. Il se sentit partir, devenir de en plus lourd et sombrer.

Dans le plus beau silenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant