Chapitre 17 - Seconde Partie

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Ce soir là, Candy éprouva tout le mal du monde à trouver le sommeil tant l'excitation de ces retrouvailles avaient été intenses ! Revoir Petit John après toutes ces années l'avait bouleversée. Elle avait quitté un petit garçon et avait retrouvé un jeune homme qui avait perdu jusqu'à son accent du Michigan, s'exprimant dans un phrasé des plus British. Impatients de tout savoir l'un de l'autre, les questions avaient fusé dans une véritable cacophonie, les empêchant de comprendre ce qu'ils se disaient. Ils avaient fini par se calmer, riant de leur enthousiasme, et s'étaient assis face à face pour discuter à leur aise. Candy n'avait eu de cesse de le toucher comme pour s'assurer qu'elle n'était pas en train de rêver et que c'était bien son petit frère de cœur assis devant d'elle.

- Raconte-moi tout, John. Je savais que tu avais été adopté par un forgeron et que vous aviez quitté la région. Explique-moi donc ce qui vous a conduits à Londres !...

Le jeune homme avait acquiescé en soupirant, comme si le récit de sa vie n'était pas si aisé à livrer. Il avait levé les yeux vers elle, ses noires prunelles survolant son épaule pour se aller se perdre dans le jardin qu'on voyait à travers la grande fenêtre derrière elle. Il le contemplait sans vraiment le regarder, absorbé dans ses pensées qui s'agitaient dans son esprit.

- J'ai bien peur de te décevoir avec mon histoire, Candy...

- Pourquoi cela, John ?

- Parce-qu'elle n'a pas été aussi parfaite que j'ai bien voulu vous le faire croire...

- Mais, dans les lettres que tu envoyais à la Maison Pony, tu disais aimer ta nouvelle vie et être ravi des parents que tu avais...

- Je ne voulais pas que nos mères s'inquiètent. A quoi bon les tourmenter avec la triste réalité ?...

- Tu me fais peur, John! – avait fait Candy, d'un air alarmé – Que t'est-il donc arrivé après avoir été adopté ???

Elle avait saisi sa main et l'avait serrée très fort.

- A vrai dire... - avait-il fini par répondre - Tout allait bien au début. C'étaient les grandes vacances et je prenais plaisir à aider mon père à la forge en attendant la rentrée des classes. Mais à la fin de l'été, quand je demandai dans quelle école j'allais aller, mon père me fit bien comprendre que je n'y irais plus et que je travaillerais désormais avec lui... J'essayai bien de contester mais je reçus en retour une telle correction que plus jamais je n'osai réclamer quoi que ce soit.

- Ton père te battait ?!!!... – gémit Candy, d'un air horrifié - Mais, ta mère, ne te défendait-elle pas ???

- Si, bien sûr, mais il la frappait elle aussi, surtout quand il buvait, et comme il buvait souvent...

- Mon pauvre petit John... Je suis si triste pour toi! Je suis tellement désolée de n'avoir pu t'aider!

- Oh, détrompe-toi, tu m'as beaucoup aidé, Candy! Je n'avais pas oublié ce jour où je t'avais rendue visite chez les Legrand et où j'avais découvert la façon dont ils te traitaient. Tu avais gardé la tête haute malgré tout ce qu'ils te faisaient subir. Alors, je m'accrochais à ce souvenir, à cet exemple de force et de courage que tu m'avais donné, et j'ai essayé de faire comme toi, de tenir le coup en attendant un jour meilleur...

Les larmes coulaient sur le visage de Candy et elle avait commencé à palper sa robe en quête d'un mouchoir qui tardait à apparaître.

- Tiens ! – avait fait Petit John en lui tendant le sien qu'il avait sorti de la poche de sa veste. Il avait haussé les épaules d'un air gêné – Excuse-moi, il y a des taches de peinture dessus mais je n'ai pas mieux.

Lettres à JulietteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant