Chapitre 25

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Ils n'étaient pas plus tôt dans la voiture que Candy réalisa l'état avancé de la grossesse d'Annie. Elle était tellement choquée par ce qu'elle venait d'apprendre sur Albert, qu'elle n'avait même pas remarqué le gros ventre de son amie.

- Tu ne peux pas faire une aussi longue route dans ton état ! Tu dois retourner à l'hôtel et te reposer.

- Je vais très bien, je t'assure, Candy.

- Tu es enceinte, Annie ! Et ce n'est pas bon pour toi de faire un si long trajet ! Je refuse que tu prennes ce risque !

- Mais non, je peux très bien....

- Je t'en supplie, Annie !... - l'interrompit Candy, la mâchoire serrée. Le ton qu'elle avait employé, empreint de colère et de désespoir, ne laissait aucune équivoque. Il valait mieux céder...

- Soit... - fit Annie en soupirant – Nous prendrons le premier train demain... Et avec couchette !... - ajouta-t-elle avec un demi-sourire. A ces mots Candy émit un grand soupir de soulagement et prit la main de son amie qu'elle embrassa avec reconnaissance.

- Merci pour ta compréhension, mon amie. Je n'aurais pas tenu cinq secondes de plus. Ne m'en veux pas. Je suis déjà au bord de la crise de nerfs quand je pense à Albert. Je ne peux pas m'inquiéter pour toi aussi, pas maintenant...

De grosses larmes roulèrent sur ses joues et elle éclata en sanglots. Assis en face d'elle, Terry lui prit les mains et les serra très fort. Il aurait donné n'importe quoi pour faire accélérer le temps et faire qu'ils soient déjà au chevet de leur ami. Un sentiment d'impuissance et d'injustice montait en lui, ne faisant qu'accroitre son désarroi.

Discrètement, Archibald fit un signe de tête au chauffeur qui détourna sa route en direction de leur hôtel. La séparation fut brève, sans grande effusion, avec la promesse de se donner des nouvelles au plus vite.

Comme l'avait promis Archibald, Chicago fut atteint au petit matin en dépit des quelques arrêts nécessaires pour s'approvisionner en carburant mais aussi pour changer de conducteur. Le pauvre chauffeur aussi professionnel qu'il fût, ne pouvait rouler douze heures à la suite sans un peu de repos, c'est pourquoi, pour plus de sécurité, Terry lui avait proposé, puis insisté pour le remplacer. Ils avaient donc alterné régulièrement, s'octroyant quand la route le permettait, quelques pointes de vitesse.

Candy était dans un tel état de nervosité qu'elle avait fini par accepter le calmant qu'Annie avait confié à Terry en prévision, ce qui lui avait permis de dormir quelques heures. Elle avait rouvert les yeux en approche de Chicago.

- Nous voilà enfin arrivés ! - se dit-elle en se redressant. Mais à mesure que son esprit s'éveillait, le sentiment d'angoisse qui l'avait habitée tout le long du trajet reprit en vigueur, oppressant, crispant chacun de ses muscles à l'en faire grimacer de douleur.

- Tu ne te sens pas bien, mon aimée ? - demanda Terry, le front plissé d'inquiétude.

- Je me sentirai bien mieux quand je serai auprès d'Albert... - fit-elle dans un souffle en tournant la tête vers la vitre. Elle ne pouvait croiser le regard de Terry de crainte d'y lire son propre tourment, les mêmes incertitudes. Dans quel état allait-elle le retrouver ? Serait-il à jamais cloué dans ce lit, inerte comme une plante verte ? Dans l'exercice de son métier, elle en avait vu si souvent dans ce cas... Elle savait aussi très bien que bon nombre ne récupéraient jamais et s'éteignaient peu à peu comme une chandelle... Non, non ! Cela n'arriverait jamais à Albert ! Elle se battrait pour lui, s'occuperait de lui jour et nuit, et il redeviendrait le Albert fort et courageux qu'elle avait toujours connu, celui qui l'avait toujours soutenue et protégée, comme un grand frère, comme un père... Non, jamais elle n'accepterait de le perdre !!!

Lettres à JulietteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant