22. Mon âme est tienne

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Je regrette. Tellement de ne pas avoir pu lui dire plus tôt tout ce qui me passe par l'esprit. C'est de ma faute si elle souffre, c'est de ma faute si je ne lui ai pas clairement exprimé mes ressentiments. Mais m'en a-t-elle laissé l'occasion ? Je ne voulais pas lui faire mal. Elle ne mérite pas ça.

Ça m'atteint.

Ça me ronge.

Ça me bouffe.

Je sors une clope, presse le briquet que je lui ai pris la dernière fois et je flambe l'extrémité.

Mon arrivée au gymnase pour ce stupide bal d'hiver n'était pas prévue, je savais qu'elle y allait parce qu'elle a rougis quand je lui ai demandé la dernière fois que j'ai chopé la crève. Elle mentait. Je refusais qu'un sale con pose ses mains sur elle, alors je l'ai surveillée toute la soirée après de longues négociations avec Lukas.

J'ai fait pire, j'ai eu l'audace de faire passer une de ses musiques. Je me suis souvenu du titre lorsque je lui ai volé un écouteur dans le bus et j'ai retrouvé le son sur Internet. Je voulais qu'elle sache que j'étais là, qu'elle pense à moi au moins une fois dans la soirée et qu'elle refuse toute danse avec quelqu'un d'autre que moi sur cette musique que j'écoute désormais en boucle, comme pour m'assurer qu'elle m'appartient déjà.

Je vais la détruire si je ne lui avoue rien maintenant. Tout ça à cause d'un foutu livre volé.

* *

Lundi. Les cours de la journée sont terriblement longs, je ne fais que penser aux deux dernières heures de théâtre, et je prie qu'Emy soit enfin là aujourd'hui. J'ai besoin de lui parler. Elle a complétement disparu, je ne la croise plus sur le campus de la fac.

Dès que l'heure est terminée, je me taille de l'amphithéâtre et croise Marisol dans les couloirs. Elle me fait un signe de la main, je fonce vers la salle de théâtre et ouvre brusquement la porte.

Le groupe de morveux et Lukas sont déjà installés.

Tout le monde est là.

Sauf elle.

Je jure un milliard de fois dans mon crâne.

J'ai une folle envie d'agripper le col de son con de meilleur ami pour qu'il m'explique clairement ce qu'Emy a depuis deux semaines et où elle est.

Ça suffit. Dernière carte, en espérant qu'elle soit bonne.

Je me place au volant de ma bagnole sur le parking, j'y reste jusqu'au moins 18 h et mets le contact pour rentrer chez moi. Une bonne bière me ferait du bien. Une nuit blanche également. Je passe mon temps à regarder les étoiles quand je n'arrive plus à dormir, comme elle avant de fermer les yeux, comme nous sur la colline. Merde...

Ça fait mal ce truc. Je ne pense pas avoir ressenti cette chose pour quelqu'un. Pas aussi fort, pas si oppressant, pas si épuisant.

Je prends mes couilles pour lui envoyer un message et des flashs de nous dans sa chambre me reviennent encore une fois en pleine face.

— Bordel.

* T'es où, putain ?

Je reste éveillé au cas où elle me répondrait et mon portable vibre dans la minute qui suit.

* Occupée.

Je jure et frappe dans le cadran de ma fenêtre de cuisine. Elle ne trouve que ça à me dire alors qu'elle ne me donne pas de nouvelles depuis Thanksgiving, en soit trois semaines ? C'est une éternité, merde ! J'allume une clope pour essayer d'apaiser mes nerfs et bois une gorgée de bière.

Alchimie littéraireWhere stories live. Discover now