22. Mon âme est tienne

5.6K 441 110
                                    

ELIJAH

— Ta gueule.

Ma sœur squatte encore mon appartement. Normalement elle vit avec mon frère de 26 ans, Roni, mais elle adore venir ici pour me casser les couilles depuis qu'Emy m'a viré le lendemain où j'ai couché avec elle.

— Va t'occuper en commençant à réviser ton bac, grogné-je en montant le son.

Elle rit jaune et disparaît dans la cuisine. Bon vent !

Je ferme les yeux en balançant la tête sur le dossier du canapé et je me souviens encore de son visage lorsque j'étais en elle. Ce dernier exprimait tellement de choses... La sensation lui plaisait, elle ne contrôlait plus ses membres. C'était pur. Et j'ai aimé ça. Son prénom rôde dans tête comme une mélodie infernale, c'est insupportable. Si je pouvais défoncer un mur en cognant ma tête dessus, je pense que ce serait déjà fait.

— Bon tu vas aller la voir ou pas ?

— Non.

Je sais qu'elle me fuit et elle y arrive avec brio. À chaque fois que je croise Judith, sa coloc, elle me dit qu'elle ne sait rien, mais je suis parfaitement conscient qu'elle me ment effrontément. Je ne lui en veux pas, elle le fait pour protéger son amie. Mais putain, ça m'énerve qu'Emy soit si inaccessible.

— T'es lâche, m'accuse Mila en se baladant dans mon salon.

— Mila, je te jure que si je t'entends encore une fois me dire cette saloperie, je me casse d'ici.

— Vas-y, c'est chez toi après tout. T'as les clés pour revenir donc bon, pas grave.

Je la fusille, mais elle ne dit rien. Elle a enfin compris que ce n'est pas le moment de me gonfler, je suis suffisamment sur les nerfs comme ça. Oui, j'ai été con, mais si je ne lui disais rien de ce que Dallen suggérait, j'allais la perdre plus durement.

Elle sait, maintenant. Elle sait que je n'ai cherché qu'à détruire psychologiquement cet enfoiré de Winslet, mais elle n'a pas encore compris que je n'ai pas été aussi loin avec elle pour cette raison. J'ignorais encore si c'était exactement ça, et c'est lorsqu'elle est sortie de ma voiture en courant la dernière fois que j'ai compris.

— Tu abandonnes Emy. Tu imagines son état, à elle ? Eli, t'as une réputation de coureurs de jupons, c'est normal qu'elle ne veuille plus te voir si tu ne lui dis rien.

Je la foudroie, saisis mon sweat bordeaux et l'enfile par-dessus mon t-shirt gris foncé. Je claque la porte derrière moi, furax, descends les escaliers en bois et cours jusqu'à la colline. J'essaye d'oublier le visage d'Emy dans mes bras prenant son pied pendant que je la baisais, mais c'est impossible. Cette nana m'a fait mal quand elle m'a balancé qu'elle croyait n'être qu'une femme parmi tant d'autres à mes yeux. Je ne savais pas quoi lui répondre pour qu'elle comprenne que ça n'a jamais été le cas.

Au bout de vingt minutes de course, je pousse la grille et grimpe, essoufflé. Chaque fois, j'espère qu'elle vienne se recueillir ici, mais je ne l'y ai jamais vue. Je frotte mes yeux, m'allonge sur le sol en regardant les nuages et respire longuement pour me calmer. Son absence est insupportable et si je ne la vois pas lundi, je n'aurais d'autres choix que jouer ma dernière carte pour qu'elle cède.

Elle a provoqué tellement de changements en moi, j'en suis le premier surpris. Je participe à son cours de théâtre, rien que pour voir ce putain de sourire fier me faisant bander, j'improvise un dîner dans sa cuisine pour l'impressionner et je panse sa brûlure alors que j'étais sur le point de l'embrasser. Et putain je sais qu'elle s'en souvient. J'ignore dans quel état elle se trouve maintenant.

Je suis certain qu'elle chiale, mais est-ce qu'elle me hait parce que j'ai détruit le peu de confiance qu'elle m'offrait ?

Je fais l'enfoiré depuis le début, mais je ne savais pas comment réagir convenablement. Je la teste, je sauve son cul du feu, je pousse ses limites, je l'entraîne dans son lit sans hésiter, j'envoie le premier message parce qu'elle me manque terriblement et je ne suis pas foutu de lui dire ce que je ressens.

Alchimie littéraireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant