Amnésie

Chapitre 51

Les jours suivants, Harry put sentir l'anxiété de Théo, qui faisait écho à la sienne. Ils s'attendaient tous les deux à rencontrer des obstacles, probablement.

Comme Théo, Harry avait l'habitude de se voir arracher tout ce qu'il aimait.

Cette fois, cependant, ils purent rénover les maisons du village abandonné — qui était désormais celui de Harry — tranquillement. Presque chaque jour, leurs amis venaient. Au début, Serpentard et Gryffondor se croisaient prudemment, alternant leurs visites sans vraiment communiquer.

Puis, Hermione et Daphnée avaient bousculé un peu leurs habitudes et les premières rencontres avaient été... froides.

Cependant, l'enthousiasme de Harry et de Théo ne se tarissait pas et il devint rapidement contagieux. L'idée de vivre tous ensemble dans le même village ne semblait plus aussi surréaliste que les premiers jours.

Hermione annonça qu'elle était enceinte alors qu'ils étaient tous rassemblés — ce jour-là, même Drago était venu, un peu boudeur, mais sans montrer la moindre agressivité. Les félicitations avaient fusé et ça avait été une première étape dans la grande réconciliation des anciens ennemis.

La Magie permettait d'accélérer les travaux, au point que la toute première maison — celle choisie par Harry et Théo - fut prête après moins d'une semaine. Déterminé à emménager aussi vite que possible, Harry laissa Théo l'espace d'un après-midi pour régler les choses dans le monde magique. Il devait à Kingsley une longue explication après tout, ainsi que des excuses pour son comportement passé.

En arrivant dans le monde magique, près du Ministère, Harry fut ébloui par un flash d'appareil photo. Sans surprise, un journaliste de la Gazette se précipitait vers lui, voulant probablement en savoir plus sur sa récente « disparition ».

Le jeune homme accéléra le pas et s'engouffra dans le ministère, ignorant la jeune femme à l'accueil. Pour une fois, il profita de sa notoriété pour se faufiler jusqu'au bureau du ministre, évitant au maximum les curieux qui voudraient lui poser des questions.

La secrétaire de Kingsley le fit entrer presque immédiatement et Harry la remercia d'un sourire chaleureux.

En le voyant, Kingsley fronça les sourcils.

– Harry. Que me vaut le plaisir de ta visite ?

Le jeune homme hésita avant de soupirer.

— Je... venais m'excuser en premier lieu. Je me rends compte que je ne t'ai pas rendu la tâche facile.

Le ministre se renversa dans son fauteuil et il éclata de rire, amusé.

— Ça, c'est l'euphémisme du siècle, gamin. Et apparemment, ton amie Hermione avait encore raison à ton sujet...

Harry cligna des yeux, perplexe. Kingsley lui adressa un petit clin d'œil moqueur.

— Allons, tu ne crois pas que j'allais rester sans nouvelles tout ce temps ?

Harry se laissa tomber sur le siège que lui désignait l'homme et il haussa les épaules.

— Ouais. Elle était un peu en colère après moi, non ?

Kingsley ricana.

— Plutôt, oui. Mais aux dernières nouvelles, elle était ravie parce que tu semblais avoir retrouvé tes esprits. Ta présence ici me dit qu'elle ne s'est pas trompée.

Harry se passa nerveusement la main dans les cheveux, puis il hocha la tête, avant de soupirer.

— Je ne suis pas sûr que tu sois toujours aussi content de ma visite quand j'aurai terminé, Kings...

L'homme renifla, sans que son amusement disparaisse.

— Tant que tu ne m'annonces pas que tu comptes envahir le monde magique...

Harry roula des yeux, avant de grimacer.

— Non. Mais je compte m'éloigner du monde magique.

Kingsley ne sembla pas surpris et il hocha juste la tête.

— À quel point ?

Harry hésita avant de souffler.

— Au point de créer ma propre communauté.

Kingsley posa les mains sur son bureau et se pencha légèrement, fixant Harry.

— Vraiment ?

Le jeune homme hocha la tête, avec une expression déterminée.

— Je sais que c'est légal. Nous suivrons les règles du monde magique, mais nous aurons notre propre territoire. Je suis fatigué d'être traqué sans cesse par la Gazette et...

Kings l'interrompit.

— C'est à cause de cette histoire de mariage ?

Harry haussa les épaules avec une expression fatiguée.

— Ça et le reste. J'étais à peine arrivé devant le Ministère qu'un journaliste me prenait en photo et me courait après... Je veux juste vivre une vie paisible avec ceux que j'aime.

Kinsley haussa un sourcil moqueur.

— Ainsi qu'un jeune homme cher à ton cœur si j'ai bien compris ?

Harry s'empourpra, mais il releva la tête, le menton en avant et le regard empli de détermination.

— Ainsi que Théo Nott, oui. Il ne mérite pas d'être... obligé de vivre dans l'Allée des Embrumes.

Kingsley soupira.

— La guerre a laissé beaucoup de cicatrices, Harry. Et je parle de toute la population sorcière, peu importe les allégeances passées.

Harry se tendit, mais il hocha prudemment la tête, attendant la suite. Finalement, Kingsley secoua la tête avec une expression épuisée.

— Nous ne pouvons pas imposer aux sorciers d'apprécier certaines personnes, même si nous savons qu'il s'agit d'innocents. Pas sans mettre une cible sur eux sans pouvoir garantir leur sécurité.

Harry fronça les sourcils.

— Tu veux dire que mes anciens camarades Serpentard auraient été plus en danger dans le monde magique que dans l'Allée des Embrumes ?

Kingsley se rembrunit et il hocha la tête.

— La justice magique est restée très discrète sur ce sujet particulier, de crainte de déclencher des émeutes, mais il y a eu certains groupes de sorciers qui ont décidé de mener des expéditions punitives après la guerre. Contre des familles de Mangemorts, contre des Serpentard, contre des gens qui ne se sont pas assez... battus. Certains s'en prenaient même à des sorciers qui n'avaient pas perdu de proches, comme si leur survie les rendait complices des atrocités commises...

Harry vacilla légèrement, avant de souffler, horrifié.

— Je ne savais pas...

Kingsley hocha la tête.

— Tu n'avais pas besoin d'avoir ça sur les épaules en plus du reste, Harry.

Le jeune homme se passa la main sur le visage et il soupira.

— C'est terminé au moins ? Qu'est-ce que vous avez fait pour les arrêter ?

Kingsley haussa les épaules.

— Le monde magique est plus calme. Mais parfois, il suffit d'une étincelle pour relancer d'anciennes querelles. Nous avons identifié les plus grands fauteurs de troubles, ceux qui appelaient à la vengeance et nous les avons fait enfermer. Pas de publicité, pour éviter une escalade. Que pouvions-nous faire d'autre ?

Harry souffla, ses yeux, perdant leur éclat habituel.

— Alors ils ont été sacrifiés et chassés du monde magique...