Chapitre 41

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Des mèches de cheveux dans les yeux, c'est aveugle que je me réveille, surpris de respirer encore.

Je m'ébouriffe le crâne, retrouvant la vue.

Je panique et cherche du regard Camille, qui a été emportée avec moi.

Je la retrouve quelques mètres plus loin, allongée nue sur le sable rendu lisse par le retrait de la mer.




Je prends une grande bouffée d'air frais, l'avalant comme s'il m'avait manqué durant des millénaires.

Sans surprise, je me mets à tousser et me redresse sur mes avant-bras, cherchant par ce simple geste la preuve de ma survie.

Mon corps m'obéit péniblement, alors l'image de Valéryan se faisant emporter par la mer me revient et l'adrénaline me saisit.

Je me retourne à la hâte, paralysée par l'idée qu'il ne soit plus.

Pour mon plus grand bonheur, il se trouve derrière moi, avançant un pas après l'autre à ma rencontre.




Arrivé à son niveau, je me laisse tomber sur le sable.

Je lui souris, exprimant mon soulagement d'une façon qui n'appartient qu'à nous.

Elle pose mollement son bras sur mon torse et son contact éveil en moi les secrets de ce monde.

Sa peau sous la mienne me fait l'effet d'une décharge et le silence cède sa place aux souvenirs.

De la création du monde à notre profond sommeil,

Je me souviens de tout.

Les images de notre périple défilent devant mes yeux, me dévoilant l'histoire des sept royaumes comme aucun homme ne l'a jamais connu.

De la première guerre à celle à venir, je me souviens de tout.

Cette omniscience nouvelle n'est que la preuve de la renaissance de mon âme.




Je me souviens de lui.

De son corps mort que je tenais dans mes bras il y a sept mille ans de cela.

Je me souviens de nos erreurs, nos paresses et nos faiblesses.

Je me souviens des hommes et des femmes qui nous haïssaient, profanant notre œuvre en y déclenchant la guerre.




Je me souviens d'elle.

De ses regards tristes et de son âme seule.

Je me souviens de notre première rencontre, de l'amour qui naissait dans ses yeux émeraudes.




Je me souviens de ses jours qui n'étaient que bonté et courage.

De la puissance de son optimiste, allant jusqu'au rejet du jugement d'autrui.

Je me souviens de son désarroi face à l'avenir promis à notre monde.




Je me souviens de ses nuits qui n'étaient que partage et chaleur.

De la noirceur de ses pensées, allant jusqu'à bannir des hommes et des femmes selon leur comportement.

Je me souviens de la promesse que nous nous étions faites sur mon lit de mort —celle du chaos.

ORIGINELS [ Les enfants de la lune vermeille ]Opowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz