Chapitre 12

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Nous préparons notre voyage avec application, traînant parfois de nombreuses heures sur des détails que je trouve insignifiants. Valéryan ne veut rien laisser au hasard. J'aime cette passion qu'il met dans tout ce qu'il entreprend, allant jusqu'à stipuler sur le comité d'accueil qui nous attendra au port de Cepa.

C'est la première fois depuis bientôt deux semaines que nous prenons le temps de nous balader dans le château. Rydstorm nous en avait fait la visite mais nous ne nous étions pas attardés plus que cela, focalisés sur la tâche qui nous incombe.

Aujourd'hui les choses sont différentes.

Nous partons demain pour Cepa et souhaitons profiter de ce dernier jour à Pariendi pour nous imprégner des lieux et emporter de nombreux souvenirs avec nous.

Les rares fois où nous nous sommes baladés, nous allions dans les rues de la capitale à la rencontre des citoyens de ce royaume. Valéryan n'était jamais très loin même s'il ne m'adressait pas un mot. Sans doute avait-il peur que je m'échappe par je ne sais quel moyen saugrenu.

La météo maussade de cette après-midi ne nous permet pas de jouer les badauds et je n'aime pas suffisamment la neige pour la laisser m'engloutir si je reste immobile trop longtemps.

Les printemps d'Avia me manquent.

— Ce château est bien plus vivant que celui de ton père, plaisante Quentin en poussant une énième porte qui nous mène sur des escaliers plutôt sombres.

Le château d'Avia est aussi vivant que l'est le père de Valéryan. Quentin se rend compte de son manque de tact et se reprend dans la foulée :

— Le fait que Rydstorm en laisse l'accès libre est une bonne chose, tu ne trouves pas ?

— Si je faisais de même, quelqu'un en profiterait pour y pénétrer et me tuer dans mon sommeil.

— Ou profiter de la chaleur de ton lit, rit Krüs qui ferme la marche. Les femmes de Pariendi aiment surprendre Ryd en pleine nuit, quitte à se heurter à un homme qui n'a pas envie de se livrer à des ébats nocturnes.

Je fais les gros yeux, choquée par l'audace des femmes de ce royaume. Comment peuvent-elles se permettre une telle chose sans l'autorisation du principal intéressé ?

Je m'arrête au milieu des escaliers, trop ahurie pour me taire :

— Vous voulez dire qu'il ne ferme pas sa chambre à clef ?

Krüs secoue énergiquement la tête de droite à gauche.

— Il reste toujours disponible pour ses semblables.

Les garçons rient bêtement tandis que je me questionne sur la signification de la disponibilité telle qu'elle est ici abordée.

— Et s'il ne veut pas ?

— Il lui suffit alors de dire non, tout simplement. C'est assez logique finalement.

J'encaisse l'information, toujours abasourdie par le fonctionnement de ce curieux roi.

— Cela dit, reprend Krüs arrivé en bas des escaliers, je vous déconseille de jouer à ce petit jeu-là avec lui. Non pas que cela le dérangerait, mais il souhaiterait éviter une guerre diplomatique.

— Elle est libre de faire ce qu'il lui plaît, rétorque immédiatement Valéryan d'un ton froid, et d'en assumer les conséquences.

— Je n'y comptais pas.

— Ce que vous comptiez faire m'est bien égal.

Krüs étouffe un rire qui n'a pas sa place dans la conversation et nous guide dans les couloirs des sous-sols du château. Il y a bien moins de lumière une fois que les vitres laissent place au bois et à la terre, et je me complais dans cette atmosphère qui me correspond bien mieux. Par bien des aspects cela me rappelle la Braise.

ORIGINELS [ Les enfants de la lune vermeille ]Where stories live. Discover now