Chapitre 23

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Peu à peu, je reprenais conscience de tout ce qui constituait mon environnement. Comme si mes sens avaient décidé qu'il était temps de refaire surface et d'affronter, après une légère absence, le chaos que j'avais engendré, il me parvint à nouveau des odeurs, des sensations et malheureusement pour moi, des souvenirs.

Mon cerveau qui, il y a encore quelques minutes, se complaisait dans une léthargie protectrice, me giflait maintenant d'images toutes plus horribles les unes que les autres.

La première qui s'imposa à moi fût le haori de Tôshirô aux mains d'une personne qui n'aurait jamais imaginé vivre suffisamment longtemps pour le voir être destitué un jour.

Je sentis une larme couler le long de ma joue. De tristesse, de désespoir, de remord. La culpabilité me rongeait et, même s'il ne faisait aucun doute qu'elle était en partie responsable des ténèbres dans lesquelles j'étais plongée, un rayon de lumière à la fin de l'interminable couloir qui se dressait en face de moi m'indiqua qu'en réalité, c'était la cellule dans laquelle je me trouvais qui me privait de mes sens.

D'une partie du moins. Car si mes yeux n'étaient pas capables de voir, mes oreilles, elles, percevaient nettement le bruit des gouttes d'eau qui se fracassaient au sol, comme les éclats de mon coeur en lambeau.

L'humidité dans l'air me piquait le nez mais c'est ma gorge serrée qui lui donnait ce caractère suffoquant. Peut-être aussi ma façon d'être recroquevillée contre ce mûr gelé.

Je ne me souvins pas d'avoir été amenée ici. Pendant le trajet, mon esprit s'était perdu dans les méandres d'un gouffre dont il n'était pas encore prêt de sortir et tout autour de moi s'était fait vaporeux. La dernière chose dont je me souvenais, c'était la silhouette de Tôshirô qui disparaissait derrière un croisement alors qu'on nous conduisait ici.

Un sanglot à moitié étouffé franchit la barrière de mes lèvres mais la culpabilité et la tristesse n'arrivaient en rien à prendre le dessus sur la colère et bientôt, mes mains quittèrent mon visage et je me levais pour venir abattre violemment mes poings contre les barreaux de ma cellule. Le bruit assourdissant du métal résonna au loin comme un ricanement diabolique et je serrais la mâchoire.

- Putain mais qu'elle idiote !

J'aurais pu en vouloir au destin ou même à ceux qui m'avaient enfermé ici, sauf que non, je n'en voulais à personne d'autre qu'à moi-même. J'étais la seule responsable de cette situation.

Comment j'avais pu être aussi stupide !? Comment j'avais pu me laisser avoir de la sorte !? Pourtant, rien n'était crédible ! Tôshirô qui m'attaque sans raison ? Mon frère qui s'écarte pour le laisser me tuer ?

Je n'aurais pas dû utiliser l'une des techniques de Tôshirô et mobiliser les pouvoirs de Hyōrinmaru. J'aurais dû être capable de me défendre seule, par moi-même. Mais surtout, j'aurais dû comprendre que j'étais encore dans la simulation.

Je n'avais pas la moindre idée de ce qu'il allait nous arriver ni de où se trouvait Tôshirô, mais une chose était sûre, il ne s'était pas défendu. Il n'avait pas cherché à s'expliquer. Il avait abandonné. Est-ce qu'il n'avait rien dit parce qu'il savait que personne ne nous écouterait ?

Mais les choses ne pouvaient pas se passer comme ça ! Chez moi, les gens sont innocents jusqu'à ce qu'ils soient reconnus coupables ! Et ils ont au moins la possibilité de se défendre même s'ils le sont !

Sauf que personne ne nous avait demandé quoi que ce soit. On nous avait directement condamné.

Une autre vague de coup de poings partie et à chacun d'eux, le métal froid et rouillé m'écorchait les mains. Je savais que la violence ne pouvait rien résoudre mais elle me permettait d'évacuer la frustration alors je continuais jusqu'à ce qu'une voix me fasse sursauter.

HitsuKarinWhere stories live. Discover now