Chapitre 15

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Lorsque ce genre de chose arrive dans les mauvais films à l'eau de rose, on oublie de décrire les douleurs que cause ce genre de chute. En entourant mes bras autour de son cou alors que je basculais en avant, mes coudes étaient les premiers à heurter le sol dur. Et même si le torse de Toshiro avait amortie la chute du reste de mon corps, les os de mes bras eux, sentaient bien le coup passer. Et je ne vous faisais même pas l'offense de vous parler de mes genoux !

J'avais essayé d'ignorer la douleur et de faire en sorte qu'elle ne transparaisse pas dans ma voix lorsque je lui avais ordonné de parler. Mais comme il ne répondait pas, lorsque les picotements cessèrent, j'en profitais pour me relever sur les mains. Quand mon visage fit face à celui du jeune capitaine, les rougeurs sur ses joues me firent rire intérieurement. Le contraste avec sa peau pâle était vraiment saisissant et il me semblait que c'était la deuxième fois que je le voyais rougir. Il était vraiment craquant.

J'aurais aimé me moquer de son malaise mais j'avais peur que de le lui faire remarquer brise cet étrange moment. Nous nous fixâmes quelques secondes pendant lesquelles je le détaillais. D'abord ses yeux, toujours et sans doute, éternellement magnifiques. En y regardant de plus près, je remarquais qu'ils avaient des nuances que je n'avais encore jamais vu jusque là. (Ce n'était pourtant pas faute de les observer souvent). Au fond de ses pupilles, sur le coin intérieur, des petites touches de vert se parsemaient tellement épisodiquement qu'il était impossible de les remarquer sans y faire vraiment attention. Mes yeux se posèrent ensuite furtivement sur ses lèvres mais lorsque je le réalisais, je relevais immédiatement le regard pour l'accrocher à ses yeux. J'espérais qu'il ne l'ait pas remarqué mais comme il n'avait pas cessé de me fixer, j'imaginais que ce n'était pas le cas.

- Tu es emmerdante.

Je fronçais les sourcils et sentais presque la colère monter alors que sa phrase restait en suspend, comme s'il n'osait pas la finir. Après une seconde, qui me sembla être une éternité, il reprit :

- Mais peu importe le prix, je ne t'aurais pas laissé là-bas.

Mon coeur loupa un battement face à ces mots qui sonnaient comme une déclaration. J'étais à deux doigts de fondre sur ses lèvres, de lui avouer à quel point il me troublait et à quel point il était important pour moi.

Mais quelque chose me faisait peur, affreusement peur.

- Pourquoi à n'importe quel prix ?

Il ne répondit pas. Il se passa plusieurs secondes avant que je ne me répète.

- Pourquoi ?

Ma voix s'était faite plus grave cette fois, moins assurée.

Mais le silence s'éternisa sans qu'il n'ait la moindre envie de le rompre.

Je sentis comme un coup de poignard se loger dans ma cage thoracique.

Il ne répondait pas parce qu'il avait compris que sa réponse n'était pas celle que j'espérais.

Il ne parlait pas pour ne pas me blesser.

Je sentis les larmes me monter aux yeux.

Comme je n'avais aucun moyen de les cacher, je baissais un peu la tête afin d'éviter son regard et de me cacher derrière mes cheveux.

Je savais que je m'étais fait des idées.

Je le savais.

Mais je n'avais jamais pu faire taire cette petite voix qui me disait que je pouvais au moins y croire, à défaut que cela ne se réalise.

Une larme s'échappa en dépit de mes efforts pour l'en empêcher et ma main, qui essuya mes joues, ne fut pas assez rapide pour lui éviter de finir sa course sur le visage, maintenant impassible, de Tôshirô.

HitsuKarinWhere stories live. Discover now