Chapitre 4

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Griverfall, Ontario

Lundi 24 avril

[Lylith]

Mon sac à l'épaule, je pousse les portes de mon lieu de travail. Lorsque j'arrive dans l'open space, je découvre mon patron et mes trois collègues en grande discussion.

— Salut tout le monde !

— Oh, salut Lily ! me répond ce dernier.

— C'est Lylith, monsieur.

— Ah oui, pardon. Est-ce que tu pourrais nous faire du café ?

Je souris.

— Bien sûr.

Je pose mes affaires à mon bureau et me dirige vers la petite cuisine adjacente pour m'occuper du percolateur.

Cela fait un peu plus d'un an maintenant que je travaille dans cette agence publicitaire. Nous nous chargeons de vendre nos services aux entreprises afin de créer leur publicité : brochure numérique, affiche, tout est faisable. Nous sommes là pour servir nos clients qui proviennent de toute l'Amérique du Nord, chose assez exceptionnelle pour une petite boîte située dans une ville paumée comme Griverfall. C'est pourquoi mon patron s'échine à garder cette notoriété. Aucun droit à l'erreur.

J'ai suivi un cursus par correspondance d'infographie. Avant ça, j'ai tenté les études universitaires, mais j'étais « trop médiocre ». On me l'a bien fait comprendre, alors j'ai arrêté pour suivre une formation, pas plus simple qu'une autre, mais dont l'élitisme n'était pas le maître mot. J'ai adoré, d'ailleurs. Je n'ai pas regretté mon choix.

J'ai ensuite postulé ici et j'ai été engagée. Point fort ? Ma jovialité. J'étais heureuse de démarrer dans la vie active, impatiente de créer mes propres designs à proposer aux clients.

Du moins, c'est ce que je croyais.

Dès les premiers mois, mes propositions ont toutes été recalées, car celles de mes collègues étaient toujours meilleures. Ce n'est pas grave, me disais-je, la prochaine sera la bonne. Pourtant, plus le temps passait, plus mes tâches glissaient vers de l'administratif de base et la préparation du café.

Je n'ai plus créé de projet depuis un bon bout de temps. Ce n'est pas grave. Même si ce n'est pas le travail auquel je m'attendais, je suis utile à ma façon. Mes collègues m'apprécient et je suis toujours celle qui est choisie pour accompagner notre patron lorsqu'il se déplace pour présenter les idées de la boîte à l'extérieur.

Tu es souriante et pleine de vie, c'est exactement ce qu'il faut leur montrer ! me dit constamment mon supérieur.

Ma sœur m'a déjà réprimandée. Elle dit que je suis utilisée comme un produit publicitaire et que je devrais arrêter de tout accepter.

C'est vrai. Néanmoins, ils sont sympas avec moi, même si mon boss se trompe encore dans mon prénom. Et je suis payée, donc pourquoi me plaindrais-je ?

Tu es naïve, ma chérie. Tu es trop gentille. La voix douce de ma mère résonne dans mes pensées.

Je soupire tandis que je prépare la boisson fumante.

Je pourrais déprimer, être à bout que la médiocrité me caractérise, peu importe les domaines de ma vie, mais ce n'est pas ma philosophie.

Le vrai bonheur est celui de notre esprit. Et moi, j'ai décidé de tout prendre du bon côté. Je suis heureuse comme ça.

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