XII - (L)'oubli.

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L, 2022.

Est-ce que l'oubli d'un amour passé signifie qu'il n'a pas existé?

A chaque fois, j'ai oublié ce que ça faisait d'aimer quelqu'un. Le sentiment avait quitté mon corps et mon esprit, et c'est comme si jamais ça n'avait eu lieu. Je garde précieusement les mauvais ressentiments et je revends les bons. Peut-être ai-je donné une graine d'amour à quelqu'un qui l'a fait pousser ailleurs.

En tout cas, je me souviens très bien de ce jour où je t'ai laissé.

« I wish you were a better man » raconte la mélodie en arrière plan, pendant que je traverse l'allée commerçante. Et tout me ramène à ce soir de mars où je t'ai quitté après avoir eu espoir que tu allais changer. C'est drôle comme on est capable du pire envers soi-même pour garder une personne auprès de nous!

Si tu savais comme j'ai déchanté quand les anges ont arrêté de chanter tes louanges. Je croyais avoir touché du bout des doigts un bonheur hésitant quand en réalité c'était une oasis dans un océan de tristesse.

Je me souviens avoir dit en riant que ça y est, je t'avais quitté, parce que rire c'était ne pas pleurer. J'avais honte de la façon dont tu m'as traité, je devais me sauver cette fois. Si seulement j'avais pu savoir, si j'avais pu voir, jamais je ne t'aurais dit que tu pouvais m'aimer. Il n'y a rien de pire dans ce monde que d'accepter l'amour de quelqu'un qui ne sait pas correctement nous le donner. Parce que je l'ai fait pour deux, j'y ai cru pendant tout cet été, pendant cet automne où tu m'as raconté à quel point on allait vivre le meilleur en oubliant le pire. Pendant cet hiver où tu m'as surtout fait pleurer, en me disant qu'une vie n'était pas faite que de bonheur et de jours ensoleillés.

Je me demande au fond si aujourd'hui tu as compris pourquoi je t'ai laissé seul avec toi-même. Les abysses n'ont jamais été aussi profonds que lorsque je me suis perdue pour quelqu'un d'autre. Parce que, les yeux fermés, j'aurais pu rester ainsi en apnée dans une relation qui m'étouffait. Un matin, j'ai vu mes yeux rougis et gonflés par des mots bien trop durs et blessants pour être ceux d'un amant. J'ai crié dans mon oreiller et une voix ma dit, sûrement celle que j'étais il y a 15 ans « est-ce que c'est ça aimer ? ». Et je t'ai détesté, pour la première fois, j'ai voulu entendre la vérité. Si jamais avant l'amour ne m'avait été montré, ce jour-là j'ai choisi de me l'accorder.

Ce jour-là je me suis choisie pour la première fois. Et je me suis aimée.

Est-ce que j'en ai souffert? Bien plus que toi sans doute. C'est difficile de faire ce genre de choix quand on pense ne pouvoir vivre qu'à travers celui qui nous fait face. Pourtant, toutes ces nuits où les larmes ont coulé après cette séparation, au fond, je savais que c'était pour le mieux. Une simple question de temps. J'ai flanché bien des fois, croyant mon cas perdu si tu n'étais pas là pour m'apporter le minimum. Mais, ce n'était pas ce que je méritais. Je vaux bien plus que le minimum, et c'est pour ça que j'ai eu raison de te laisser derrière moi. Car malgré moi j'étais convaincue que le maximum m'attendrait plus loin.

« If you were a better man »

Tout avait si bien commencé, quelle tragédie.

Peut-être qu'au moment où je t'écris ces mots, je regrette celui qui était parfois doux et savait me faire rire. Mais le reste du temps, tu es celui qui m'a donné envie de te quitter. Alors je sais que j'ai fait le bon choix, sinon jamais tu ne m'aurais laissé être heureuse.

La rose et les épines.Where stories live. Discover now