- Les flammes de ton cœur -

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Keigo n'a jamais aimé sortir de Rokiā. Cette cité l'a vu naître et grandir, et il y fait bon vivre. Rares sont les fois où il met un pied dehors, pour ne pas dire jamais. Néanmoins, il aurait dû s'en douter que cela arriverait un jour.

Son oncle étant le guérisseur de Rokiā, il a besoin d'herbe, de plante et d'énormément d'autres ingrédients diverses pour ses potions et pommades. La cité rocheuse offre peu de ressource et à cette époque, le commerce est encore peu florissant. Les marchés sont vides de gibier et d'ingrédient. Le seul moyen pour lui d'obtenir ce dont il a besoin est de quitter Rokiā. En bon apprenti qu'il est, Keigo le suit sans rechigner. Cela fait maintenant quatre ans qu'il apprend le métier de guérisseur. Contrairement à son oncle il n'est pas né avec ce don. Ses parents étant décédés au combat quelques années auparavant, c'est son oncle qui s'est occupé de lui. Le vieil homme est veuf et ne possède aucune descendance. À l'aube de ses soixante ans, le métier ne l'a pas réussi. Il parait plus vieux qu'il ne l'est et son dos commence à courber. Il a perdu ses cornes il y a de cela cinq ans, ces dernières étant tombées d'elles-mêmes. L'émanation des potions, le travail physique que demande les préparations ajoutés à la perte de son compagnon, c'est la compagnie de Keigo qui le garde en vie. Tant que ce dernier est encore rattaché au nid, hors de question pour le vieil homme de partir.

Tout cela pour dire que Keigo est désormais dans les rues de Oranaï aux côtés de son oncle. Les boutiques sont plus diverses et variées, et le marché plus intéressant. Son oncle a trouvé ce dont il a besoin et Keigo a hâte de rentrer. La foule ne le dérange pas car Rokiā également fourmille de vie, mais l'inconnu est sa bête noire. Il n'a jamais vu le volcan de près, ni rencontré de Drākõn de feu. Ici, il y en a partout. Depuis qu'il a atteint sa majorité, son oncle lui a dit qu'il serait bientôt tenté par la compagnie des mâles. Il ne sait pas si c'est à cause de sa timidité ou bien qu'il est différent, mais les autres mâles ne l'intéressent pas plus que ça. Pourtant, il ne manque pas de choix et de courtisan. À Rokiā, beaucoup le regardent de loin pendant que d'autres s'approchent de trop près. Il a constamment repoussé leurs avances, très peu intéressé. Certain sont plus que beaux et d'autres très élégants, mais cela ne change rien pour lui. Il est peut-être trop romantique, trop fleur bleue, mais il veut ressentir cette fameuse étincelle. Sentir les papillons dans le ventre et le feu dans ses reins. Il est niais, c'est un fait, mais il s'en moque. Avant qu'un Drākõn ne soit intéressé par son physique, il veut avant tout qu'ils aient les même goûts, ou du moins, quelques centres d'intérêts communs. Keigo ne demande pas la lune, juste un homme beau et galant.

- Tu as faim ? Demande son oncle en s'arrêtant devant une boulangerie en pleine air.

Keigo aurait voulu hurler que oui car il est connu pour être un vrai glouton, presque un estomac sur patte. Il engloutit des kilos de nourriture sans prendre un gramme et cela lui vaut son lot de jaloux. Ce n'est pas sa faute si son corps élimine vite les graisses. D'ailleurs, c'est un mal pour un bien. Keigo a toujours voulu avoir des muscles, mais il a beau faire tous les efforts du monde, son corps ne change pas. Il déteste l'effort physique mais il s'est donné un mal fou pour obtenir ne serait-ce qu'un petit muscle. Son oncle lui a dit que les muscles c'est bien mais que cela ne va pas à tout le monde. Il n'est pas bête et sait qu'il a hérité du gène porteur de son père. Son corps n'est pas fait pour se battre, mais pour porter la vie. C'est pour cela qu'il est aussi élancé et fin. Par moment, il aurait aimé prendre quelques kilos rien que pour oublier son fichu ventre plat.

Se souvenant que son oncle attend une réponse, il s'approche pour observer l'étalage. C'est traître car tout lui donne envie. Les brioches au sucre, les baguettes au chocolat et même les tartes à l'abricot.

- Je ne sais pas quoi choisir. Dit-il en se penchant plus. Tout me donne envie.

- Je vous conseille la spécialité de Oranaï, la tarte cendrée. La voix rauque fait vibrer son corps de haut en bas. Il en replie ses ailes et pivote tel un automate.

Coeur Ardent - La légende d'AteasOù les histoires vivent. Découvrez maintenant