Chapitre 44 - Naos

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Nous arrivons trop tard. Il est trop tard.

Le Fléau tient Elisaria par le cou, et elle est évanouie lorsqu'il sort un des poignards du fourreau de la jeune femme avant de lui enfoncer dans le ventre.

Le sang coule. Elle est toujours inconsciente. Le Fléau est si absorbé par son combat qu'il ne remarque pas notre présence.

Mais alors qu'il s'approche de son cou comme pour respirer l'odeur de son sang, il s'arrête. Se redresse avec une expression affolée et prend son collier dans ses mains. Il remarque un éclat lumineux sur la main qui tenait son bras et se fige.

Sa bague.

Il lui lâche le cou et tente de la réveiller en lui tapotant la joue, puis en la secouant par les épaules. Mais rien.

C'est alors qu'il pousse un cri assourdissant, qui se propage comme une onde de choc à travers les royaumes. Nous faisant tomber en arrière, Naos et moi.

Il la prend ensuite dans ses bras et disparaît.

**

Cela fait trois mois que le Fléau s'est volatilisé.

Après son départ, sa magie a cessé d'avoir un effet, et les personnes qui avaient disparu sont revenues à la vie. Réapparaissant comme par miracle aux quatre coins des Royaumes du Sud. Ils ont même gagné un surnom : les Survivants.

Chacun essaie de reprendre contact avec ses proches, et des voyageurs nous rapportent que l'onde de choc a été ressentie jusqu'à Allund.

Aster m'en veut de ne pas être intervenu. Il s'en veut aussi. Il s'est renfermé sur lui-même. Il ne cherche plus à devenir le meilleur des commandants. Nous avons tous les deux vécu les révélations du roi comme une trahison, et avons pris nos distances avec l'armée.

Nous vivons dans un petit village à deux jours de cheval de la capitale. J'ai retrouvé ma famille, et après les avoir aidés à s'adapter à leur nouvelle vie, j'ai quitté Helyra pour Oscor. Ma sœur, Evy, m'a suivie, et vit avec nous désormais.

Le roi dit être dévasté par la perte de son enfant qu'il venait tout juste de retrouver. Tout le mythe qu'il a construit autour de la princesse nous dégoûte, et nous ne supportons plus de marcher dans les rues de la capitale et de voir les statues et les portraits plus ou moins réalistes de celle que nous avons connue. Elle a pris sa place dans les histoires que l'on raconte le soir en famille au coin du feu.

Nous ne supportons plus l'hypocrisie de notre monarque, et avons décidé de partir. Nous travaillons encore pour l'armée, remplissant quelques missions de temps à autre, mais le roi sait qu'il ne pourra plus nous refuser notre démission si nous la demandons. Il n'a plus de moyen de pression contre nous, mais nous si.

Je repense souvent aux dernières phrases que j'ai adressées à Elisaria. Je m'en veux d'avoir déversé ma colère sur elle. Rien ne l'excuse, j'ai eu du mal à accepter qu'elle soit reliée au monstre qui m'a retiré toute ma famille des années plus tôt. Mais je savais aussi qu'elle est différente. En rien comme lui.

Et maintenant, il est trop tard.

Ivos 1 - Feuille d'if parmi les sapinsDove le storie prendono vita. Scoprilo ora