Phœnix Souls [PLK]

14

Elle s'appuya contre le lavabo de sa salle de bain, réalisant des inspirations de relaxation pour essayer de calmer sa nervosité. Ben était dans le salon juste à côté, l'attendant tout en choisissant un film à regarder ensemble. Lina semblait hors du temps, se dissociant complètement de la réalité pour se réfugier dans un lieu rassurant, sa tête. Toutefois, rien n'y faisait, le bruit derrière la porte l'empêchait de se concentrer. Il semblait être présent partout, par son odeur, son corps, sa voix. Il était là, la serrant comme une chaîne qui essayait de l'étouffer. Elle se retourna pour se tenir à la faïence tout en fixant son reflet dans le miroir. Elle ressemblait beaucoup trop à cette gamine apeurée qui se cachait de Franck et ses amis. Elle se demanda un instant ce qu'elle faisait là, ce qu'elle essayait de se prouver.

« Lina, tu viens ? J'ai trouvé un film. »

Elle serra la mâchoire, ses ongles s'enfonçant dans ses poings. « J'arrive. »

Elle sécha son visage moite avec une serviette avant de sortir. Ben se retourna pour la regarder, souriant mais surtout inconscient de l'état second de la brune. Il l'invita seulement à le rejoindre sur le canapé, ne la laissant que peu de choix de s'asseoir à ses côtés. Alors, elle prit place tout en essuyant ses paumes moites sur son jean. Il essaya de prendre sa main mais elle les plaça sous ses cuisses pour le dissuader.
Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Elle qui pensait avoir vaincue ses peurs se retrouvait pétrifiée sur place. Toutefois, ce qu'elle comprit que trop tard, c'était qu'elle avait toujours aimé Mathieu avec une facilité déconcertante. Elle lui avait toujours fait confiance parce que c'était lui. Ben n'était pas Mathieu.

Cependant, elle voulait croire que ce n'était pas qu'une finalité, qu'elle pouvait aimer de nouveau. Alors, quand il alluma le film, elle posa sa tête sur son épaule, complètement tendue. Il y répondit favorablement, posant sa main maladroitement sur sa cuisse.

« Ne t'endors pas. » Il la poussa gentiment, espérant d'étendre l'atmosphère. Cependant, en réalité, il n'y avait aucun risque qu'elle s'endorme tant elle était anxieuse. Le rire forcé de Lina s'éteignît en même temps qu'il remontait ses doigts.  « Sinon, on peut se reposer. »

« Non, j'ai envie de regarder. » Elle attrapa sa main pour les entrelacer mais surtout le retenir d'aller plus loin.

« Moi, je vais avoir du mal à me concentrer. » Elle quitta son épaule pour le regarder. « Tu es beaucoup trop mignonne. »

« Tu dis n'importe quoi. » Elle secoua la tête, le regard baissé, ce qui fut une invitation pour Ben qui attrapa son menton pour relever son visage. Tandis qu'elle fixait ses yeux, il semblait obnubilé par ses lèvres.

« J'ai envie de t'embrasser. » Ses doigts glissèrent le long de sa mâchoire pour rejoindre sa nuque et la rapprocher de lui. « Et j'vais le faire parce qu'il est grand temps. »

Il n'attendit pas qu'elle hésite, il s'approcha, se jetant presque sur elle. Une main se posa sur sa hanche tandis que l'autre était toujours sur sa nuque pour la rapprocher. Il tenta de passer la barrière de ses lèvres mais elle plissa sa bouche tout en tirant sur son poignet pour se détacher. Finalement, elle put s'éloigner, reprenant son souffle et une certaine constance avant de lui sourire timidement. Ben ne tenta pas une autre approche, s'éloignant à son tour sans un mot de son côté.
Il attrapa son portable comme impatient de partir. Si bien que Lina ne put se retenir de regarder l'écran. Seul un message d'un inconnu s'affichait. Ça avance ? Oublie pas que t'as un délais. Il se cacha pour répondre en la voyant espionner.

« Je dois y aller. »

Il se redressa et elle l'imita immédiatement. « T'es sûr ? Tu devais passer la soirée ici ? »

« Je sais, je suis vraiment désolé mais on m'attend. » Il tendit ses bras vers elle. « Fais-moi un câlin. » Elle acquiesça avant de rejoindre son torse, gardant les yeux ouverts tout en enlaçant maladroitement ses côtés. « Ça m'a fait plaisir de te voir ce soir. C'est toujours un plaisir en vrai. » Il éloigna son buste pour la regarder et il en profita pour l'embrasser chastement. « Et si je pouvais t'embrasser pendant des heures, je le ferai. »

« C'est vrai ? » Il papillonna ses lèvres encore une fois.

« Je t'appelle quand je suis rentré. »

Il serra encore une fois contre lui avant de s'enfuir de l'appartement, laissant Lina confuse.
Alors, elle fit ce qu'elle connaissait le mieux, cette nouvelle habitude qui était arrivée en même temps que ses amis. Elle prit son portable pour faire un appel groupé. Ses deux copines ne perdirent pas de temps pour répondre alors elle s'allongea sur son canapé, prête à déblatérer ses malheurs et inquiétudes. Inès était dans son lit, à côté d'Antoine qui ne put se retenir de lancer un regard noir à sa petite amie. Lucie, elle, était sur son canapé sous un plaid, fatiguée mais pourtant incapable de trouver le sommeil. Alors, Lina oublia complètement la raison de son appel.

« Lucie, ça va pas ? » Elle secoua la tête, les larmes déjà au bord des yeux. « Dis-nous. »

Elle secoua la tête, le menton tremblant. « C'est toi qui appelait. »

« Oublie. Tu passes avant. »

« Parle-nous. » Ines parlait enfin. Elle n'était pas proche de Lucie. Toutefois, le regard complètement noyé de la jeune femme ne pouvait laisser personne indiffèrent.

« Je... J'suis enceinte. » Antoine se redressa brusquement du lit pour essayer de voir qui parlait mais Inès quitta le lit pour s'enfermer dans la salle de bain. Lina resta bouche bée, assise en tailleur sur son canapé, le téléphone sur ses cuisses laissant seulement son menton visible à la caméra. « Dites quelque chose.  Votre silence n'arrange pas du tout la situation. »

« Du barman ? » Lina releva son portable pour regarder son amie qui hochait seulement la tête. « Une fois a suffit.. eh bah Lucie. »

« Ferme-la, j'arrive pas à croire que tu fasses de l'humour sur ça. » Malgré tout elle ria entre deux sanglots.

« Attendez mais c'est qui ce barman les filles ? »

« Lucie a rencontré un barman quand on était en Guadeloupe. »

« Qu'est-ce que tu vas faire ? »

Lucie se renfrogna dans son plaid. La douleur d'une décision d'une vie lui pesait sur la poitrine. « J'en sais rien. C'était juste une histoire d'un soir. Je me souviens même pas de son prénom... »

« Quoi que tu fasses, tu sais que tu peux compter sur nous. » Inès acquiesça les propos. « On sera là. »