Chapitre 28

24 9 2
                                    

Son corps tremblait nerveusement quand Namjoon reposa le journal intime de sa défunte fille sur ses jambes recouvertes par un draps fin immaculé. Les pièces du puzzle commençaient peu à peu à s'assembler, ce qui, dans un certain sens, ne l'enchantait guère. L'écriture brouillée et presque illisible de sa fille ce jour-là laissait montrer au père qu'elle était encore plus malmenée et malheureuse qu'il l'imaginait. Elle était malade, sous l'emprise d'une mauvaise influence et qui, pour sûr, lui a montré cet horrible échappatoire qu'est le suicide.

Il peut être normal de s'entraider, de trouver des solutions ensemble, entre amies, mais cette solution a des conséquences non seulement graves mais irréversibles. Se donner la mort est une solution à un problème éphémère, qui ne dure jamais pour l'éternité, une solution qui empêche de voir un bel avenir droit devant. Ce sont des années qui sont perdues à tout jamais, des années où l'on aurait pu trouver un charmant compagnon, un métier merveilleux, de vrais amis sur qui l'on peut s'épauler, un animal de compagnie fidèle et attachant ou encore une grande maison. Qui sait ? Personne ne peut prédire l'avenir, néanmoins le fait est que tout peut arriver là où on s'y attend le moins. Namjoon aurait souhaité de tout son cœur que Jaein ait pensé à tout cela.

À la fois attristé et en colère, il regardait autour de lui. Il ne pouvait plus supporter cette atmosphère stressante, sombre et anxiogène. L'hôpital est bel et bien le dernier lieu auquel notre protagoniste souhaitait aller, or sa santé le voulait. D'ailleurs il ne savait même pas pour quelle raison il était ici, il demandait cette question maintes fois aux infirmiers en blouse blanche qui passaient, seulement ils se répétaient. Il devait attendre qu'un médecin généraliste vienne le voir afin de l'examiner. L'envie de quitter cet endroit qui l'avait tant traumatisé d'il y a cela quelques jours ne le quitta pas, il n'avait pas sa place ici. Il regardait les nombreux brancards à sa gauche, à sa droite, en face de lui. Voir autant de malades d'un seul coup lui fit découvrir un sentiment qu'il n'arrivait point à décrire.

Plongé dans ses pensées, il ne vit le médecin qui tentait d'attirer son attention en l'appelant plusieurs fois. Ce ne fut que quelques secondes plus tard qu'il leva la tête pour apercevoir un homme assez âgé mais très élégant. Celui-ci lui demanda de le suivre, sans oublier de lui demander s'il avait besoin d'aide pour marche, ce à quoi le châtain répondit négativement, il se sentait mieux qu'au matin, même s'il était encore vidé de tout énergie. Ensemble, ils entrèrent dans une salle simple avec un lit, un bureau et plusieurs machines médicales. Le senior lui recommanda de s'allonger sur le lit en attendant une aide soignante.

Une fois arrivée, les examens commencèrent. Tout d'abord il eut droit à une prise de sang, ensuite ils observèrent sa tension – d'ailleurs bien trop haute. Premièrement quand il était allongé, ensuite quand il était assis et enfin une fois debout. Le personnel soignant suivaient cette procédure avec attention, ils voyaient bien une fatigue générale de leur patient : ses yeux se fermaient constamment, il respirait beaucoup trop lentement, son corps entier tremblait et basculait de gauche à droite. Ils firent un rapport rapide mais efficace avant de le raccompagner dans cette salle pleine de monde, en lui demandant de patienter pour la prise de sang qui devait arriver dans une trentaine de minutes.

Namjoon regardait attentivement l'aide soignante qui l'avait examiné plus tôt, elle semblait préoccupée ou peut-être avait-elle pitié pour lui, il ne savait pas. Il lui demanda, tout bas.

« Excusez moi, comment je... Comment je suis arrivé ici ? Je ne m'en rappelle plus.

- Eh bien nous avons reçu un appel d'un centre médico-psychologique non loin de l'hôpital en fin de matinée. Il nous a dit qu'un de ses patients avait fait un malaise et ne se réveillait pas. Nous vous avons transporté alors jusqu'ici mais vous avez mis peut-être plus d'une heure à vous réveiller. Il vous a accompagné tout le long du trajet avec sa voiture. Il souhaitait également rester ici pour avoir les résultats, cependant il devait repartir travailler. Il s'en excuse d'ailleurs. »

Si c'était bel et bien son psychologue qui avait appelé, il avait sûrement dû parler de ses antécédents, c'était ce à quoi pensait notre protagoniste qui comprenait mieux l'expression de la jeune femme. Il la remercia alors de lui avoir raconté tous ces faits, ce qu'aucun soignant n'avait daigné à faire, la noiraude mis sa main derrière son cou et lui dit alors que ce n'était rien. À ce geste, Namjoon crut halluciner. En effet, Jaein avait la même mimique quand elle se sentait gênée ou encore timide. Les larmes aux yeux, il observa les cheveux mi-ondulés de cette femme, son grain de beauté à l'œil gauche, ses fines lèvres, ses petites oreilles. Il se sentait si mal de la dévisager autant, mais il n'y pouvait rien.

« Vous lui ressemblez tant... Dit-il alors, le souffle coupé.

- Comment ?

- Vous ressemblez beaucoup à ma fille. Vous êtes magnifique.

- Oh... Merci beaucoup. »

Répondit-elle d'un triste sourire avant de se retirer pour rejoindre ses collègues. De son côté, Namjoon serra le journal qu'il ne quittait jamais ses bras sur son torse et regarda le plafond, exténué. Il n'en voyait jamais le bout et il ne savait plus si la meilleure solution était de se battre pour sa fille ou bien de la rejoindre. C'était si difficile de savoir tenir bon, de trouver des points positifs dans un tel désastre. Il n'en pouvait plus de tout cela, il n'en pouvait plus de lui. Pourquoi était-il aussi pessimiste ? Pourquoi changeait-il d'état d'esprit presque toutes les heures ? Pourquoi est-il encore en vie aujourd'hui ? Toutes ces questions et encore tant d'autres se bousculaient dans son pauvre cerveau, pas assez préparé à tout cela.

Un médecin vint à lui, l'air pressé, il avait probablement pleins d'autres patients à voir à en juger tous les brancards dans ce hall. Il se présenta rapidement et lui tendit plusieurs feuilles, précisant son traitement et les causes de son malaise. Une déshydratation, un manque de vitamine suite à une mauvaise alimentation. Point étonnant pour le châtain, il n'avait pas mangé un repas complet depuis pas mal de temps. Exsangue, il remercia cet homme et s'en alla aussi vite qu'il le pouvait. Il était resté bien trop longtemps dans ce centre hospitalier qu'il connaissait tant.

La nuit allait bientôt tomber, le plus favorable était qu'il rentre chez lui mais il n'en avait pas envie. Il souhaitait simplement errer dans les rues, sans but précis, à la recherche d'une quelconque idée pour trouver une solution à son mal-être.

Inutile de préciser que cette soirée fut longue. Très longue.

ꕥꕥꕥꕥꕥ

Consternation | NamgiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant