Chapitre 19:

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Abby fit le tour du pâté de maison tout entier. Errant dorénavant dans les cultures environnantes, à la recherche d'un point d'entrée, elle tentait de visualiser l'intérieur du petit immeuble, dont elle connaissait pourtant chaque pièce.

Leur équipe médicale travaillait principalement à l'étage, c'est d'ailleurs là que se trouvait le bloc opératoire.

Dissimulée entre deux pousses de maïs la jeune femme énuméra ses différentes options, il lui fallait agir au plus vite.

La porte, qu'elle n'apercevait pas, semblait être le seul point d'accès, cependant, ce côté de la façade, peu exposé et entièrement muré n'était que peu protégé. De plus il lui serait relativement facile d'escalader le mur de pierre, solide, et aux prises bien visibles.

Deux lucioles gardaient la zone, adossées contre la bâtisse, ils paraissaient presque détendus, fumant et discutant sans réellement s'inquiéter du carnage qui venait de se produire.

Ses armes à feu, bruyantes, ne manqueraient pas d'attirer les autres soldats, elle devait faire preuve de patience.

Se reculant de quelques pas dans la végétation, dense, elle saisit une pierre qu'elle lança quelques mètre sur sa droite, espérant attirer l'attention de ses ennemis.

- Putain t'entends ça!

Le second soldat, lui, était loin d'être apeuré,

- C'est juste un oiseau, ils passent leur temps à bouffer le maïs à cette saison, relax...

Abby jeta alors une seconde pierre, plus lourde et faisant bruisser et bouger les plantes qu'elle percuta.

- Merde! Je vais voir, si c'est un oiseau au moins on aura de quoi bouffer! Je crève la dalle avec ces conneries!

- Mais reviens, c'est rien j'te dis!

- Si c'est un intrus et qu'on fait rien, William va nous défoncer! C'est vraiment ce que tu veux?

L'autre homme, resté à sa place, soupira, et suivit du regard son compagnon qui s'éloigna dans la direction d'Abby.

Ce dernier pénétra dans le champ, disparaissant des yeux de son ami. Il fit un premier pas, puis un second, écartant les épaisses tiges et feuillages à l'aide du canon de son arme.

L'ancienne Wolf, tapie dans l'ombre, couteau, en main, attendait le moment opportun pour agir.

Il n'était plus qu'à quelques mètres, la jeune femme pouvait sentir son souffle s'accélérer. Ayant l'imprudence de tourner la tête un court instant, le soldat se condamna.

Apparaissant au grand jour, Abby saisit l'homme par derrière et l'égorgea lentement, en silence, accompagnant sa victime jusque sur le sol où il s'étendit, inanimé.

La survivante essuya langoureusement sa lame sur son jeans, et se dissimula à nouveau, laissant derrière elle le cadavre ensanglanté du traitre.

- Bordel! Qu'est-ce-que tu fais? Jimmy? J'espère que t'as trouvé autre chose qu'une foutue perdrix! S'amusa-t-il.

Il commençait toutefois à perdre patience, et ne voyant pas son ami réapparaitre, il décida de s'avancer à son tour.

S'approchant à tâtons des cultures qui s'étendaient à perte de vue, le soldat semblait hésitant et fébrile. Levant la tête en espérant apercevoir un quelconque mouvement plus éloigné, il fut impuissant lorsque Abby l'assaillit à son tour, plantant sa lame aiguisée dans son cou, avec une  force rare.

Le regard paniqué, la bouche bloquée par la main ferme de la jeune femme, le soldat s'abandonna à son tour à la mort.

Prenant soin de dissimuler le corps dans la végétation, elle s'en retourna ensuite vers la façade, qui depuis son pied, paraissait plus imposante.

Fébrile à l'idée de gravir ces quelques mètres, elle agrippa cependant une première prise, puis une seconde. Avançant à un rythme régulier, elle fixait son objectif, malgré ses mains tremblantes et humides.

Le vent soufflait désormais en rafales depuis le large. Posant le pied sur la toiture qui ressemblait à une véritable terrasse bétonnée, elle jeta un court regard en contrebas, puis s'écarta aussitôt du bord.

Happée par l'air marin, vivifiant, elle remarqua le village dont quelques maisons incandescentes éclairaient encore la nuit.

La porte qui donnait sur un étroit escalier métallique, fut difficile à ouvrir, rouillée par plusieurs dizaines d'années de vie.

Aucun bruit ne lui parvenait, mis à part le groupe électrogène qui fournissait le courant pour tout l'étage. Le bâtiment était grand, presque cent mètres de longueur. Rejoignant l'étage inférieur elle remarqua plusieurs silhouettes qui déambulaient dans une grande pièce aux vitres opaques.

- Le labo... Le bloc opératoire doit être plus loin... Au bout du couloir, pensa la jeune femme.

Passant devant la porte refermée, elle ne manqua pas d'écouter les brides de conversations qui lui parvenaient.

- Les autres gardent le bâtiment et contrôlent le village, William vient de me prévenir que le Commandant est mort, la zone est sûre... On va bientôt pouvoir commencer. S'enthousiasmait, bien que froide, le docteur dont Abby reconnut la voix sans difficulté.

La jeune femme n'avait pas un instant à perdre, elle longea le long couloir aux néons blafards jusqu'à l'entrée du bloc. 

Ouvrant la porte sur la pièce, elle aperçut alors Ellie, allongée, inanimée. S'avançant vers le lit, elle tomba nez à nez avec un garde, qui, assis derrière la porte, ne s'attendait sûrement pas à voir émerger Abby.

Stoïque, il ne réagit que trop tard. La jeune femme avait quant à elle dégainé son arme sans hésitation. Le soldat, la poitrine en sang, était affalé sur sa chaise le regard vidé de toute vitalité.

- Merde! C'était pas très discret ça Abby! Remarqua la jeune femme qui déjà s'activait auprès de Ellie.

Arrachant un cathéter, puis les capteurs cardiaques, elle donna quelques petites tapes aux joues chaudes et brunies de la jeune femme, l'implorant de se réveiller.

- Ça sert à rien! Elle dort pour un moment!

Abby s'apprêtait à saisir Ellie lorsque la porte s'ouvrit avec fracas.

Deux lucioles ouvrirent le feu dans sa direction, la survivante tira son ancienne ennemie derrière table d'opération qui s'effondra sur le sol carrelé.

Asseyant Ellie, inconsciente, à ses côtés, elle se tenait désormais prête à riposter, mais la voix ferme et presque bienveillante du docteur Perkins lui parvint alors.

- Baissez vos armes messieurs, allons... Abby, je sais que tu es là...

La jeune femme pouvait entendre ses pas légers dans sa direction.

- Sois raisonnable... C'est ce qu'il y a de mieux pour nous tous... Et tu le sais...

- De mieux? Allez vous faire foutre! Vous avez tuez vos propres hommes, vos amis, des familles... Le "Commandant"!

- Abby... Les civils vont très bien, nous les avons éloignés du village avant les combats... Quant au"Commandant"... Il ne comprenait pas les réels enjeux d'une telle avancée, il avait peur, était faible... Avait trop de scrupules.

Abby se tourna un instant vers Ellie, toujours inconsciente.

- Vous êtes en train de devenir ce que nous avons toujours combattu! Vous... tuez pour le pouvoir! Pour...

- Nous ne pouvions pas laisser le Commandant en vie... Abby... Notre pays a besoin d'ordre, de recouvrer un équilibre, de la sécurité. La liberté, la démocratie... Dans un monde comme le nôtre ce n'est bon que pour des utopistes, des rêveurs fous... comme l'était votre père...

Sa voix, auparavant douce, avait changée, et s'était comme assombrie.

- Et si vous non plus vous ne le comprenez pas Abby... Si vous aussi vous vous opposez à notre destin commun... Alors vous subirez le même sort que tous les autres...




THE LAST OF US PART IIIWhere stories live. Discover now