Lie tes ratures

By UmiPage

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"Montre-moi toute la grandeur de ton amour." Victor, à dix-sept ans, est follement amoureux de son camarade d... More

Avant-propos
Février
Février - 1.
Février - 2.
Février - 3.
Février - 4.
Février - 5.
Février - 6.
Mars
Mars - 1.
Mars - 2.
Mars - 3.
Mars - 4.
Mars - 5.
Mars - 6.
Mars - 7.
Mars - 8.
Mars - 9.
Mars - 10.
Mars - 11.
Mars - 12.
Mars - 13.
Mars - 14.
Mars - 15.
Mars - 16.
Mars - 17.
Mars - 18.
Mars - 19.
Mars - 20.
Mars - 21.
Mars - 22.
Mars - 23.
Avril
Avril - 1.
Avril - 2.
Avril - 3.
Avril - 4.
Avril - 5.
Avril - 6.
Avril - 7 (1).
Avril - 7 (2).
Avril - 8.
Avril - 9 (1).
Avril - 9 (2).
Avril - 9 (3).
Avril - 10.
Avril - 11 (1).
Avril - 11 (2).
Avril - 12.
Avril - 13.
Mai
Mai - 2.
Mai - 3.
Mai - 4.
Mai - 5.
Mai - 6.
Mai - 7 (1).
Mai - 7 (2).
Mai - 8 (1).
Mai - 8 (2).
Mai - 9.
Mai - 10.
Mai - 11.
Mai - 12 (1).
Mai - 12 (2).
Mai - 13.
Juin
Juin - 1.
Juin - 2.
Juin - 3.
Juin - 4.
Juin - 5.
Juin - 6.
Juin - 7.
Juin - 8.
Juin - 9.
Juin - 10 (1).
Juin - 10 (2).
Juin - 10 (3).
Juin - 11.
Juin - 12.
Juin - 13 (1).
Juin - 13 (2).
Juillet
Juillet - 1.
Juillet - 2.
Juillet - 3.
Juillet - 4.
Juillet - 5.
Note de fin
Dix secrets de tournage

Mai - 1.

274 32 7
By UmiPage

 Victor avait toujours rêvé d'être un oiseau. Il se plaisait à observer le ciel et ses habitants, battant de leurs ailes puissantes avec grâce. Leur cri perçant au petit matin avait ce quelque chose de réjouissant qui rappelait l'essence même de la vie. Depuis son enfance, il ne cessait de se demander ce que ces créatures ressentaient chaque fois qu'elles migraient, parfois pour s'enfuir à des milliers de kilomètres de leur terre natale.

Il poussa un soupir face à la fenêtre ; sentir le vent sur sa peau, voir de haut ce que le monde nous offrait, se sentir libéré de toute attache, il en rêvait plus que de raison.

— Eh, tu m'écoutes ?

Mais pour l'heure, il se trouvait sur terre et dans une bien fâcheuse position. Yann le dévisageait, un air blasé gravé sur le visage.

— Comment veux-tu avoir de bonnes notes si tu passes ton temps à rêver ? lui reprocha-t-il d'un ton sévère.

— Mais je t'écoute !

— J'ai dit quoi ?

— Que je ne pouvais pas avoir de bonnes notes si je rêvassais ?

Le blond se passa une main ennuyée sur le visage et se massa les tempes, le minimum pour ne pas s'énerver davantage. Il aimait Victor de tout son coeur, mais parfois, son manque d'attention et de sérieux l'irritait beaucoup plus qu'il ne le laissait paraître.

— Tu te rends compte que ça fait cinq fois que je te répète la même chose ?

— Ah bon ?

— Ouais.

— Tu ne préfères pas qu'on travaille sur notre roman ? La relecture ne va pas se faire...

— Non. On finit d'abord l'anglais.

— C'est nul, bouda-t-il.

In English, please.

— Ah, le cliché du prof qui ne parle qu'en anglais...

Yann leva les yeux au ciel et intima au grand enfant qui lui servait de petit ami de se concentrer. Victor tenta tant bien que mal, mais c'était peine perdue : chaque fois que Yann passait à la vitesse supérieure, tout lui semblait encore plus flou qu'avant.

— Bon, ça suffit. J'en ai marre de te voir regarder le plafond sans rien écouter ! J'abandonne.

— Non ! s'il te plaît, attends, je serai sage, promis.

— T'es irrécupérable, Victor. T'agis comme un gamin ! Je suis pas ton grand frère ou ton père ! Flemme de jouer le flic autoritaire. Je te signale qu'on a une grosse épreuve bientôt !

— C'est nul, l'anglais, de toute façon, soupira l'adolescent.

Yann souffla. Il croisa les bras, agacé du comportement de son petit ami. Ils se dévisagèrent en silence pendant plusieurs secondes.

— T'as gagné, dit-il. On abandonne l'anglais. Ouvre ton ordi, beau gosse.

— Ouais !

Attendri, Yann esquissa un sourire devant la joie de son petit ami. De toute façon, Victor était beaucoup plus doué dans les autres matières pour que ça ne lui porte pas préjudice. Leur roman remplaça donc les cahiers.

— Pauline m'a envoyé la version corrigée des quinze premiers chapitres.

— Elle bosse super vite, commenta le blond.

— Il n'y avait pas grand chose à corriger apparemment. Enfin, il y avait plus de corrections sur mes chapitres que sur les tiens...

Yann ne releva pas la remarque de Victor et alluma son ordinateur. Ils avançaient bien, mais il ne fallait pas négliger toute la part de travail qui leur restait. L'idée de voir cette masse s'élever devant eux sans savoir quand ses chaussures finiraient par craquer l'effrayait et le poussait à marcher plus vite. Laisser Victor affronter cette épreuve seul l'insupportait.

Un long moment passa durant lequel les deux garçons échangèrent sur les changements à effectuer sur leur histoire. Le ton montait mais redescendait bien vite. Victor prit alors conscience de toute l'aventure que représentait cet art. L'écriture était la montagne russe de l'âme ; la création les faisait monter très vite dans la stratosphère, tandis que les corrections et réécritures, virages nécessaires pour reposer pied à terre, s'avéraient parfois compliquées à encaisser.

Victor finit de retaper la fin du chapitre et leva la tête. Un rayon de soleil, espiègle, entra dans le salon et les frappa directement. Il plissa les yeux, ébloui.

— On a bien avancé, fit-il remarquer. Tu fais quoi ?

— Je suis en train de rédiger le synopsis, informa Yann. J'ai bientôt fini, d'ailleurs.

— Cool ! Dis, ça te tente, qu'on bouge ? J'ai les jambes un peu engourdies.

— Pourquoi pas...

— Oh, je sais ! Dépêche-toi de terminer, je vais me changer.

— Pourquoi ? cria Yann, alors que Victor avait déjà quitté la pièce.

— Pour une glace !

— Je kiffe ma vie, souffla le blond en mettant un point final à sa phrase.

Aussitôt dit, aussitôt fait : les deux garçons quittèrent la maison de Victor pour aller en ville. L'adolescent se retint de sauter au plafond ; il ne savait pas si Yann allait accepter. Il fit tout le trajet en sautillant sous le tendre de regard de l'autre jeune homme, moins pressé mais tout aussi serein.

Vingt minutes plus tard, le glacier servait devant eux une grand-mère et son petit-fils, lequel sautait de joie. Yann fronça les sourcils en voyant l'air rêveur de son compagnon.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Rien... C'est juste que je les trouve mignons.

— Oh. Petit moment de nostalgie ?

— Non... Je n'ai pas eu le temps de faire ça avec ma grand-mère. Quand je l'ai rencontrée, elle était déjà malade. Je ne l'ai pas connue longtemps. Elle était très gentille.

— Désolé.

— T'inquiète, ça fait longtemps. Et elle est toujours quelque part avec moi.

Cinq minutes plus tard, ils étaient attablés avec leurs coupes de glace remplies. La chaleur faisait goutter sur l'une le coulis chocolaté, sur l'autre le coulis de fraise. La place sur laquelle ils se trouvaient respirait la bonne humeur. L'insouciance. L'été arrivait à grands pas, les fleurs sur les balcons s'épanouissaient, les oiseaux chantaient avec plaisir.

Tout le monde semblait heureux.

— Elle est vraiment super bonne, cette glace ! s'extasia Yann. J'ai fait la quasi totalité des glaciers de cette ville, et il y a pas à dire : celui-là, c'est le meilleur. J'ai beau tester un nouveau parfum à chaque fois...

Victor l'écouta déclamer son amour pour les glaces. Fraise, vanille, avec ou sans chantilly, Yann semblait pouvoir en discuter pendant des heures. Rien n'était en mesure de l'arrêter. Et Victor n'en avait pas l'intention. Cette parenthèse lui faisait du bien. Au détour d'une pensée qui accompagnait le flot de paroles de Yann, il mit alors la main sur ce qui le dérangeait.

Ces dernières semaines, il avait accumulé de l'angoisse, de la tristesse, une incommensurable joie qui avait succédé et précédé un océan de vide. Les nouvelles s'étaient succédé rapidement, violemment. Son corps étouffait sous cette suite d'événements.

Il avait peur. Cette glace n'avait ni plus ni moins que le goût du calme avant la tempête. Profiter de cette journée lui semblait irréel. Et aussi stupide que cela puisse paraître aux yeux de n'importe qui de sensé, cette journée avait le goût de la trahison. Comment pouvait-il se prélasser alors qu'ils devaient affronter tant de choses ?

Il se gifla mentalement. Cette pensée était nocive et Yann détesterait savoir qu'il ne profite pas de cette journée. Il ne voudrait certainement pas qu'il pense ainsi. Il se concentra sur les histoires de son petit ami, qui lui parlait à présent de son chat. La petite créature qu'ils avaient recueillie avait fait grand bruit, et sa mère, d'abord sceptique, se laissa emporter par l'engouement.

— Chamallow est vraiment trop mignon... Avant que je parte pour te voir, il n'a pas arrêté de miauler pour que je le câline.

— Il ne semblait pas avoir des maîtres très cool. Le genre à ne pas donner d'attention.

— C'est dur. De ne pas se sentir désiré.

— Ouais. Mais maintenant, on est là. Pas vrai ?

Pas vrai. Yann ne serait peut-être plus là demain. Et ça terrifiait Victor. Mais il se trouvait bien démuni pour lui en parler.

Leur sorbet fut bien vite dévoré, et après plusieurs minutes à discuter sur cette terrasse festive, ils décidèrent de marcher un peu avant de rentrer. Flâner dans les rues, discuter de tout et de rien, s'arrêter devant les vitrines... Victor apprécia toute la saveur de ces trop rares moments. Il fallait dire qu'ils étaient tous deux casaniers, et que leur emploi du temps ne leur permettait pas de se retrouver souvent pour ce genre de promenades.

— Oh, regarde ! Un bébé panda !

— Oui, ricana Yann. Je l'ai vu. Tu n'as pas passé l'âge des peluches ?

— Il y a un âge pour les peluches ?

— Non. Tu la veux ?

Quelle question ! Les yeux pleins d'étoiles, Victor prit la main de Yann pour qu'ils se dépêchent d'aller acheter la peluche. Deux minutes plus tard, ils ressortirent, radieux.

— Heureux ? demanda Yann.

— Bien sûr ! s'exclama Victor.

Le sourire de Yann s'agrandit un peu plus. Voir son petit ami cajoler sa peluche l'attendrit. Bien vite, dans un souci de protection, Victor la rangea dans son sac.

Leur promenade dura encore un long moment ; le soleil tapait sur leur tête, suffisamment pour rappeler les débuts de l'été mais pas assez pour en devenir désagréable. Les vitres devant lesquelles ils passaient étaient aussi extravagantes que diversifiées ; des vêtements, des magasins de jouets, d'électronique... Bon nombre de badauds s'arrêtaient devant les grands drapés exposés à la curiosité des passants, ou devant l'éclat d'or et d'argent des bagues et autres colliers.

— Tu fais quoi ? s'exclama Victor.

— Hein ? rougit Yann. Rien... Je... Je regardais juste.

Yann se dépêcha de rejoindre Victor, planté à quelques mètres de lui. Il jeta un dernier regard envieux aux petites boîtes de velours qui accueillaient en leur sein de magnifiques bagues. Au même moment, un jeune premier à l'air ravi sortit de la boutique, un sac en main. Il s'arrêta une poignée de secondes pour contempler la bague qu'il venait d'acquérir. L'impatience se lisait sur son visage, une impatience aussi limpide que les eaux les plus claires. Une impatience au goût d'impossible...

Il reprit la route dans un silence rêveur, silence à peine partagé par son compagnon qui ne cessait de parler, de s'extasier, de courir, de roucouler, de blaguer, plus intenable qu'un enfant, plus bavard qu'un merle, plus insaisissable que le vent. L'été réchauffait leur coeur.

Ils s'arrêtèrent quelques minutes pour faire une pause : la fatigue commençait à peser sur le corps de Yann. Victor lui lançait de petits regards en coin, inquiet de l'état de son ami. Ah, par fierté, il ne dirait rien ! Il tairait son épuisement ! Heureusement, Victor savait se montrer persuasif, et c'était lui qui l'avait convaincu de ralentir la cadence et de s'installer sur un muret.

Mais le jeune écrivain, ne pouvant se résoudre à abandonner sa fierté qu'un court instant, proposa de continuer. Victor n'eut d'autre choix que de suivre. Une idée germa dans sa tête et il suggéra à son ami de prendre une autre direction. Quitte à s'épuiser, autant que cela serve à quelque chose !

Quelques minutes s'écoulèrent avant qu'ils n'atteignent leur destination. Le regard ravi du blond suffit à convaincre Victor que c'était une excellente idée. Devant eux s'ouvraient les portes du paradis : la douce fragrance du voyage émanait de ce lieu saint pour tout littéraire. L'odeur du bois transformé les emportait dans un monde à part. Les rayons dégageaient un parfum d'aventure, de plaisir, dans lequel on touchait le neuf et l'antique, l'ancien et le renouveau.

En un mot comme en cent, ils venaient de pénétrer dans la plus vieille librairie du centre-ville. La préférée de Yann, avait appris Victor en discutant de livres à la bibliothèque du lycée, quelques semaines auparavant.

— T'es vraiment comme un gosse, s'amusa Victor.

— Pas toi ? répondit Yann, ne pouvant contenir son sourire.

Les rayons regorgeaient de livres en tous genres ; les couvertures se succédaient, tantôt sobres, tantôt aussi colorées que le plus bel été, tantôt épurées, tantôt emportant les lecteurs dans un monde où les dragons et autres créatures merveilleuses faisaient loi. Victor s'attarda sur plusieurs livres, en attrapa un, l'examina sous toutes ses coutures, puis l'ouvrit, le rapprocha de son nez et en huma le parfum corporel. Il adorait sentir les livres.

On peut apprendre de tout dans un livre. Mais rien ne nous apporte plus sur le sens de la vie que l'odeur qu'il dégage.

Et aussi fantasque qu'on puisse le penser, Victor laissait une part de son choix à ce critère singulier. Aussi il porta une attention toute particulière à un vieil ouvrage, porteur de mille souvenirs, mais aussi sur une oeuvre beaucoup plus jeune.

Après une éternité — le temps ne compte pas quand on parle littérature —, les deux adolescents se dirigèrent vers le comptoir, les mains plein de livres. Le libraire les regarda avec un sourire entendu, l'air de s'extasier devant la plus incroyable des nouvelles : des jeunes gens lisent ! Quelle incroyable nouvelle ! Quel bonheur, quelle extase, quelle découverte ! De beaux jeunes adolescents ont redécouvert le plaisir de lire, là où des millions d'autres se cachent de toutes ces âmes vieillissantes pour pratiquer ce doux plaisir !

Lorsqu'ils sortirent, Victor ne put que s'étonner de la belle affaire qu'ils venaient de faire, tandis que Yann continuait de louer les mérites de cette charmante boutique. Il se tourna alors gravement vers son petit ami, et, désignant cet endroit magnifique du doigt, déclara :

— Je veux qu'on publie notre livre. Je ne sais pas si je survivrai assez longtemps pour tenir une séance de dédicace.

— Les miracles existent.

— Peut-être, mais... Je ne sais pas s'ils me sauveront. Alors écoute-moi bien, Victor. Si je ne survis pas assez longtemps pour voir notre succès, si notre roman a du succès, et je sais qu'il en aura, promets-moi de venir signer notre livre ici.

— Mais...

— Promets-le moi !

Victor inspira un grand coup. Le simple fait d'imaginer continuer sa route sans lui, sans celui qu'il aimait de toute son âme, de devoir avancer seul, portant avec lui les rêves qu'ils ont bâtis, s'apparentait à la pire des tortures. Mais il devait y faire face.

— Je te le promets.

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