Mine [en cours de correction]

By maarie_sam

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Alice et son frère jumeau, Alexis, vivent depuis près de deux ans loin du peuple lycan pour fuir leur ancienn... More

CORRECTION DE RIGUEUR
Glossaire
Prologue
Un
Deux
Quatre
Cinq
Six [réécrit]
Sept [réécrit]
Huit [réécrit]
Neuf [réécrit]
Dix [réécrit]
Onze : L'aurore avant le chaos [réécrit]
Chapter 11
Chapter 12
Chapter 13
Chapter 14
Chapter 16
Chapter 17
Chapter 18
Chapter 19
Chapter 20
Chapter 21
Chapter 22
Chapter 23
Chapter 24
Chapter 25
Chapter 26
Chapter 27
Chapter 28
Chapter 29
Chapter 30
Chapter 31
Chapter 32
Chapter 33
Chapter 34
Chapter 35
Chapter 36
Chapter 37
Chapter 38
Chapter 39
Chapter 40
Chapter 41
Chapter 42
Chapter 43
Chapter 44
Chapter 45
Chapter 46
Épilogue [réécrit]
Remerciements, suite ?

Trois

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By maarie_sam

      Un cognement à la portière nous interrompit. L'Alpha soupira un coup avant de s'écarter de moi, son regard s'attardant un instant sur mon visage. Le coin de sa bouche était rougi par mon sang. Il l'essuya avec son pouce avant de l'apporter à ses lèvres pulpeuses pour en effacer toutes les traces en un coup de langue. Mes joues rosirent face à cette scène et je me détournai rapidement. Pourquoi était-ce si séduisant ? Le lien d'âme-soeurs perturbait déjà la vision que j'avais de ce loup qui n'était en réalité qu'un inconnu. Nous ne connaissions que nos noms, et étions pourtant déjà liés par une entité qui nous dépassait. Tout ceci était trop d'un coup et la fatigue ne m'aidait pas à tout intégrer. La portière de mon côté s'ouvrit, m'arrachant à mes pensées. Une tête passa dans l'ouverture et un immense sourire rassurant m'illumina. La personne à qui appartenait ce sourire me tendit la main, m'invitant à la rejoindre. Je jetai un regard vers l'Alpha sans m'en rendre compte. Celui-ci me fit un signe de la tête et je m'exécutai. 

       Sans tarder, la louve s'empara de ma main et me tira doucement en direction des chalets. Alors que nous avancions, je me permis de dévisager plus ou moins discrètement ma guide. La femelle semblait avoir la mi-vingtaine, vu la vitalité qui faisait rayonner son visage. Elle faisait presque la même taille que moi et se démarquait par sa silhouette élancée, enjolivée par ses hanches développées. Ses cheveux châtain, qui dévalaient ses épaules, se balançaient au rythme de ses pas rapides. Nous passâmes devant plusieurs maisons, et croisâmes rapidement quelques loups qui nous jetèrent — ou plutôt me jetèrent — des regards intrigués. Mon menton resta baissé autant que possible, afin d'éviter d'attirer encore plus l'attention. Le trajet fut rapide vu la taille du village et nous finîmes par atteindre et rentrer dans la maison la plus proche de la forêt. Aussitôt, une bouffée d'air chaud m'entourait et ma température monta d'un coup. Mon crâne me lança un instant et je grimaçai. Ça, ce n'était pas normal.

Elle me fiche dans le coma et ensuite s'étonne de souffrir des effets secondaires, pouffa le Loup, amusé. C'est ça de rejeter ceux qui t'aident...

     J'ignorai sa remarque. Je fus traînée jusqu'à un grand salon où brûlait un feu de cheminée. La louve m'intima de m'asseoir sur le canapé en jetant un coup d'œil à mon cou. 

- Je reviens, me dit-elle en se dirigeant vers une porte, je me dépêche !

    Elle disparut sous mes yeux curieux pour revenir quelques minutes plus tard, les bras chargés. Elle posa à mes côtés un tas d'habits à ma gauche et une boîte à pharmacie à mes pieds. Elle me fit signe de lui tourner le dos. La louve repoussa mes cheveux et tira mon haut pour dénuder la morsure fraîche qui décorait ma nuque.

- Je m'appelle Caitlin, se présenta-t-elle en posant un coton sur ma nuque.

     L'alcool picota ma blessure.

- Je suis la moitié d'un des deux Bêtas de la meute. Tu l'as probablement vu plus tôt lorsqu'ils sont venus vous chercher à Mills

     Elle continua de se présenter, meublant la conversation pour deux alors que je restai muette. Caitlin évoqua son fils, Alec, qui venait de fêter ses six ans, ma moitié aussi. Elle m'expliqua qu'il m'attendait depuis longtemps, et à quel point la meute était contente pour lui. La culpabilité m'envahit. Lorsqu'ils découvriraient à quelle race j'appartenais, leur joie se transformerait en horreur. L'Oméga me rassura concernant mon frère, qui dormait dans un autre chalet. Il n'avait été que assommé et devait reprendre conscience rapidement. Cela ne me rassurait qu'un peu, mais je ne dis rien. Je ne pouvais que leur faire confiance. Il allait bien, c'était le principal.

- Kurt n'y a pas été de main morte, constata-t-elle en regardant la profondeur de la morsure. Il ne t'a pas forcé j'espère ?

- Non, c'était consenti.

       J'avais probablement été influencée par notre lien vu comme j'avais vite accepté d'être mordue. Sa demande était pour autant compréhensive. Me laisser livrée à moi-même, sans marque d'appartenance, était contraire à tous ses instincts. Surtout qu'Alexis lui avait, dans un premier temps, bien fait comprendre qu'il refusait notre lien. Si cette marque qui faisait de moi un membre temporaire de sa meute le rassurait, j'acceptais cela.

- Ici, c'est chez moi, m'expliqua Caitlin. Normalement tu devrais être chez Kurt mais avec le souci de ton compagnon...

- Mon frère jumeau, la coupai-je.

    La femelle écarquilla les yeux avant de sourire, amusée.

- Ça explique pourquoi vous avez des odeurs si semblables. L'Alpha pensait que vous étiez compagnons et que vous aviez mélangé vos odeurs. Tu as déjà dû lui expliquer depuis, vu comment il s'est apaisé. Avoir pu te marquer a aussi dû aider, même si ça doit être très précipité pour toi. 

      Il est vrai qu'il était bien plus calme depuis que toutes les incompréhensions avaient été éclaircies. Rien que dans la voiture, pas une fois son énervement ne m'avait réellement effrayé. Quelqu'un toqua à la porte d'entrée, nous interrompant. Des pas lourds se firent entendre, et un homme apparut dans l'embrasure de la porte.

- Voici Jonathan, me présenta Caitlin. C'est l'un des Bêtas de la meute et vu que maintenant tu en fais partie, il va pouvoir t'expliquer quelques petites choses.

        Elle rejoignit le Bêta en souriant. Il l'accueillit en lui caressant les cheveux. Caitlin colla son épaule à la sienne et la main du Bêta recouvrit sa nuque marquée avec douceur. Une des particularités des lycanthropes était qu'ils avaient tendance à être très tactiles entre les membres d'une même meute. Au-delà du fait de consolider leurs liens et de préserver l'équilibre de la meute, les loups étaient tout bonnement très friands de la chaleur humaine ou de l'affection. Certains clans pouvaient être apparentés à de véritables grandes familles. Cela semblait être le cas dans le clan de ma moitié, vu ce qui se déroulait sous mes yeux. Jonathan, le Bêta, me salua d'un mouvement de tête avant d'expliquer à la louve qu'il avait besoin de discuter avec moi au sujet de mon rôle dans cette meute. 

- Je vais monter m'occuper d'Alec et du petit, n'hésitez pas à m'appeler s'il y a un pépin ! nous prévint-elle avant de disparaître dans le hall d'entrée.

    Le silence lui répondit. Si l'accueil chaleureux de Caitlin m'avait permis de ne pas trop angoisser, ce nouvel individu me perturbait. J'avais cette impression de déjà-vu qui persistait, mais je n'arrivais à le situer dans un quelconque moment de ma vie. Mes interactions s'étaient durant toute ma vie limitées à un groupe très restreint, qui incluait ma famille, l'Alpha, et quelques rares autres loups. Rencontrer un autre loup, qui venait en plus d'un territoire assez loin de celui de mon ancienne meute me paraissait impossible.
    Le Bêta me fixait avec insistance et je devais sûrement être pareil, cette constatation me fit détourner le regard. Il me faisait penser à une connaissance d'une époque à présent révolue, qui s'était égarée dans les méandres de ma mémoire. Pourtant, ni les traits carrés de son visage ni ses yeux bruns en amande ne me revenaient. Dans ma tête, le Loup guettait avec une attention toute particulière qui m'étonna. Je ne lui demandai pour autant pas la raison de ce soudain intérêt. Le moins d'échange avec mon alter ego me permettrait peut-être de réussir à le rendormir. Pour toujours cette fois. 

- Tu sais pourquoi tu es ici, me dit le Bêta en interrompant le cours de mes pensées. En plus d'avoir pénétré sur un territoire occupé avec ton frère, tu es l'âme-sœur de Kurt, notre Alpha. Même si tu ne ressens pas encore ce qu'il ressent, votre lien est trop puissant pour que tu puisses t'en aller et j'espère que tu le comprends. 

    Il attendait visiblement une réponse, je me contentai d'acquiescer.

- Ton frère ne sera pas éjecté du territoire, il nous a clairement fait comprendre qu'il serait là où tu seras.

     Les évènements de l'après-midi me revinrent en mémoire et me firent doucement sourire. Alexis n'avait jamais été du genre à abandonner les gens, et encore moins à changer d'avis. Il était bien plus borné que moi. Jonathan passa sa main sur sa mâchoire, la mine sombre. Il s'avança dans la pièce et s'assit près de moi, sa grande et imposante silhouette me surplombant. 

- Kurt étant Alpha, tu es la Luna de notre groupe. On sait que tu auras peut-être beaucoup de mal à t'adapter à la vie en meute, c'est très souvent le cas pour les loups... solitaires.

        Le ton qu'il utilisa m'étonna légèrement mais je ne réagis pas. Il laissa le silence planer autour de nous, pensant peut-être que j'allais lui répondre. Être considéré comme des loups solitaires de naissance était la situation la plus avantageuse pour Alexis et moi. Personne ne pouvait trouver la vérité, il ne restait rien de ceux qui furent un jour les camarades et les aînés de mon jumeau. Nous avions fait tout pour effacer notre trace là-bas. Nous avions abandonné notre vie, notre jeunesse, nos noms... Ici, ils n'auront que nos noms. Jamais plus. Je ne pouvais pas me permettre de faire confiance à des loups et possiblement perdre mon frère.     

       Un mal de crâne lancinant me prit soudain et des étoiles apparurent devant mes yeux. Je sentis mes yeux se révulser et mon corps partir en arrière. Jonathan agrippa ma nuque pour m'empêcher de basculer et se rapprocha de moi jusqu'à ce que ma tête repose sur son épaule. Ma vision trouble ne me permit pas de cerner les traits de son visage alors qu'il tentait — je le supposais du moins — de m'apaiser. Une nouvelle douleur arracha les dernières forces qui me restaient. Je me recroquevillai sur moi-même et des larmes douloureuses dévalèrent mes joues sans que je puisse les arrêter. 

- Tu commences à ressentir les premiers effets du Lien de la meute, m'expliqua le Bêta d'une voix suffisamment faible pour qu'elle n'aggrave pas ma douleur. Passer de solitaire à membre d'une meute n'est pas une expérience agréable. Cela risque de durer plusieurs heures, plusieurs jours peut-être même mais ne t'inquiète pas. Ton frère sera dans la même situation que toi dès son réveil mais ne t'inquiète pas pour cela. Nous vous aiderons à supporter ça, c'est notre rôle envers la Luna de notre clan et les nouveaux membres.

     Ses mots étaient durs à entendre. Je ne voulais pas de tout ça, de ce titre, d'une meute, d'une âme-sœur et de ce Loup qui me hantait. Tout me tombait dessus d'un coup, sans prévenir, mettant à mal tous les sacrifices que j'avais dû faire. Cela me fit pleurer de plus belle, de découragement cette fois. Je ne voulais plus entendre ces paroles empoisonnées, qui me forçaient à faire face à une nouvelle vie que je voulais rejeter. 

- Mon rôle est de te protéger et de te conseiller, enchaîna-t-il sans se préoccuper de mon état. Nous sommes peut-être une jeune meute mais nous sommes forts, organisés, mais nous sommes surtout soudés et fidèles à notre Alpha. 

     Le Bêta agrippa mon menton et me força à le regarder dans les yeux.

- Ce que tu es, d'où tu viens, ou même ce que tu as fait plus jeune ne changent rien. Pour nous, tu es simplement notre Luna, c'est clair ?

    Le temps d'un instant, je crus qu'il savait qui j'étais, ce que j'avais fait. Qui j'avais tué. Mais je savais que c'était impossible. Il n'aurait pas réagi ainsi en ma présence. La colère et le dégoût auraient été les seules émotions pouvant le traverser alors qu'il me fixait ainsi. 

- Jonathan, tu lui fais peur, tenta la voix de Caitlin un peu plus loin.

    Mais Jonathan ne me lâcha pas.

- C'est clair ? répéta-t-il sans flancher.

   Je balbutiai un oui entre deux sanglots et il finit par s'écarter, en hochant la tête. Une nouvelle brique douloureuse s'abattit sur mon crâne, me faisant grimacer. Mes yeux embués de larmes entraperçurent Caitlin qui nous rejoignait. Elle grogna après son Bêta, sans se soucier un seul instant de la hiérarchie qui les séparait, et lui intima de partir. Jonathan pressa une dernière fois ses doigts contre ma nuque avant de s'exécuter. Elle le poussa vers la sortie en grommelant des paroles intelligibles et il disparut bientôt de ma vue. 

- Quel malpoli ! grommela Caitlin en me rejoignant. 

      Elle prit la place du Bêta et m'encercla avec ses bras, tentant de me distraire en racontant des choses à mon oreille.

- Ne t'inquiète pas, il n'est pas méchant. La plupart des membres de notre meute, dont lui et moi, ont grandi ensemble et c'est difficile de laisser des inconnus nous rejoindre. Surtout lorsque l'un d'eux est aussi l'âme-sœur de notre Alpha. 

    Je hochai la tête, la voix trop remplie de sanglots pour pouvoir lui répondre autrement. Elle attendit patiemment que j'arrête de pleurer. Ses mains chaudes tentèrent de m'apaiser en massant ma nuque et mes tempes mais rien ne put apaiser ma douleur. Elle finit par abandonner et me proposa plutôt d'aller me reposer dans une chambre à l'étage.

- Dormir t'évitera de subir les crises de migraines.

       Une fois montées, elle me guida par la main dans le sombre couloir et ce jusqu'à la porte du fond. Là, une petite pièce munie d'un lit attenante à une salle de bain. L'Omega me poussa vers la salle de bain et me tendit une pile de vêtements qui traînait sur une table de chevet.

- Tu peux te laver ici. Tu as encore l'odeur de ton frère partout sur toi et cela apaisera notre Alpha de te débarrasser de la plupart, me dit-elle. Crois moi, un Kurt agacé, ce n'est pas beau à voir. D'ailleurs, il risque de venir te voir bientôt. Il a préféré éviter de venir là car il sait à quel point ça peut être perturbant pour toi. Te confronter directement au comportement de ta moitié, qui est un dominant en plus, serait trop pour toi. J'arrête de m'éparpiller ! Tu peux dormir là quand tu auras terminé ou descendre si tu as faim.

        Je la remerciai et elle me laissa. Une fois la porte fermée, mes dernières résistances s'écroulèrent et je laissai de nouveau mes larmes couler. Je me déshabillai avec lenteur, laissant mes vêtements abîmés trainer par terre. Une douleur fugace continuait d'attaquer régulièrement ma tête, maintenant accompagnée de frissons incontrôlables. Je pénétrai dans la salle de bain et enclenchai directement le pommeau de douche. Sans attendre qu'elle chauffe, je me glissai sous l'eau gelée par les températures glaciales de la saison. La fraîcheur apaisa mon mal de crâne mais accentua très vite les tremblements de mon corps. Je me lavai rapidement puis me réfugiai dans une douce et chaude serviette de bain. Frissonnante, je me séchai sans tarder, fouinant dans les affaires que m'avait données Caitlin. Je pus enfiler le haut sans problème, vu comme il était grand, mais le bas de jogging était bien trop large au niveau de ma taille et glissait trop. Le tee-shirt s'arrêtant à mi-cuisses, j'abandonnai l'idée d'avoir un bas convenable et choisis de rester ainsi. Je quittai la pièce sans un regard pour le miroir, sachant à l'avance que mon visage devait être plus effrayant qu'autre chose. Mes cheveux mouillés dégoulinaient sur mon front, mes épaules et mon dos mais la motivation de les sécher était absente. Ma constitution lupine m'éviterait de toute façon de tomber malade. Probablement. 

      J'hésitai à rejoindre Caitlin en bas et à manger quelque chose mais la fatigue et la douleur prirent le dessus et mes pieds se dirigèrent seuls en direction du lit où je m'affalai. Je me contorsionnai pour glisser sous la couette froide. Un frisson me traversa et ma gorge se serra. Je reniflai piteusement, pour empêcher mes pleurs de revenir m'agiter. Le regard posé sur le plafond assombri par la nuit tombée, je me permis de penser à la personne dont j'avais voulu oublier le nom et l'existence depuis que j'étais entrée dans cette maison. L'Alpha de cette meute. Mon âme-sœur.

- Kurt.

       Je laissai son nom s'échapper de ma gorge, s'aventurer jusque mes dents, caresser mes lèvres avant de s'évader dans le vide de la pièce qui accueillait la personne épuisée que j'étais. Son prénom sonna bien. Si bien que je me permis de le répéter une fois, deux fois. Il emplit ma bouche, en déborda même et envahit l'air qui m'entourait. Différents tons, différentes intonations, différentes voix. Bientôt, il n'y eut plus que ce mot. 

       Une toux me prit, à force de le répéter sans cesse et stoppa ce monologue absurde. Suffocante, je tentai de reprendre mon souffle et réalisai. À l'instant même où le mot m'avait échappé, je m'étais laissée emporter par le souvenir encore frais du loup à qui appartenait ce nom. 

Il est déjà trop tard, susurra le Loup dans ma tête.

     Les larmes, encore, m'échappèrent. Un instant seulement avait réussi à tout bouleverser. Déjà, l'existence de cet Alpha que la déesse avait liée à moi me perturbait. Rien que son nom parvenait à me distraire de mes migraines qui jusque là me faisaient souffrir comme jamais. Le Loup avait raison, il était trop tard pour m'échapper de tout ça. Je ne pourrais bientôt plus quitter ma moitié, et être marqué par lui deviendra mon unique obsession. Puis, il découvrira ma vraie nature et je devrais de nouveau disparaître. Alors que je m'abandonnais à mon désarroi, mon alter ego en profita pour prendre le contrôle de mon corps. Mes yeux brûlaient, signe qu'ils noircissaient jusqu'à effacer mes pupilles dans leur totalité. Le Loup s'appropria mes membres, mes sens, prit le contrôle de ma respiration et de mes mouvements. Il rendit ma conscience léthargique et l'étreignit si fort que je crus que j'allais m'évaporer. Je commençai vite à m'engourdir et succombai à cette narcose. Juste avant de sombrer dans l'inconscience, je l'entendis murmurer à mon oreille à mesure que son étreinte étouffante se réduisait. Si les mots et le sens de ses paroles m'échappèrent, je ne retins qu'une chose : sa voix était, pour une fois, d'une douceur telle qu'elle apaisa mes derniers instants d'éveil.




        Je ne pus regagner conscience que le lendemain matin, après une très mauvaise nuit de sommeil. Des voix inconnues avaient résonné toute la nuit dans ma tête et même le court coma dans lequel le loup m'avait plongé ne les avait pas empêchées de me tourmenter. Le mal de crâne avec lequel je m'étais couchée ne m'avait pas quitté et c'est avec lui que je me levais. J'allais me rafraîchir le visage dans la salle de bain et tentais de me rappeler de cette nuit. En dehors des échanges des membres de la meute, je n'avais que de faibles réminiscences du reste. Je me souvenais vaguement de Caitlin qui vint me voir deux fois pour vérifier si tout allait bien. J'avais —  le Loup avait en réalité — marmonné des questions au sujet d'Alexis et Caitlin m'avait fait comprendre d'un regard qu'il était aussi mal que moi. Un peu plus tard, alors que je flânais entre l'inconscience et l'éveil, j'avais entendu une autre respiration dans la pièce, près de moi. Une main brûlante avait caressé mes cheveux un long moment, alors que mon corps oscillait entre les coups de chaud et les coups de froid. J'avais finalement réussi à me rendormir lorsque mon état s'était stabilisé. 

     À présent, les voix s'étaient tues et même le Loup ne m'importunait pas. Mes yeux se levèrent vers le miroir qui me faisait face, juste au-dessus du lavabo. J'étais seule. Une grimace tordit mon visage. J'avais le teint pâle mais les joues rouges à cause de la chaleur. J'avais sûrement eu de la fièvre durant mon sommeil. Des cernes brunes fatiguaient mes yeux et me donnaient cet aspect malade que je détestais. Une bouffée de chaleur manqua de me faire tourner de l'œil. Le Lien de la meute était très dur à établir chez moi car je n'avais jamais eu ce type de lien avec d'autres lycanthropes. Habituellement, les loups ne sont pas liés par le lien de la meute seulement quand ils sont Gamma, c'est-à-dire qu'ils n'ont pas encore subi leur première transformation. Mon cas était différent. On m'avait interdit cette connexion avec un Alpha à cause de ma condition, qui effrayait les membres de la meute avec qui j'avais pourtant grandi. J'avais donc passé dix-sept années de ma vie sans cela. Mes sens n'étaient absolument pas habitués. Je devais aussi probablement ressentir le contrecoup du réveil du Loup. Vivre tout ce temps comme une vraie humaine avait fait oublier à mon corps ce que sentir, entendre ou voir signifiait pour un loup-garou. Le Loup ricana dans mon esprit en écoutant le fil de mes pensées. Je soupirai. 

     La porte de ma chambre grinça brusquement, me faisant sursauter. Je passai la tête hors de la salle de bain, m'attendant à croiser Caitlin, mais tombais sur quelqu'un de totalement inconnu.

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