Quatre

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      L'individu n'était en réalité qu'un jeune garçon. Il était haut comme trois pommes, et semblait minuscule dans l'embrasure de la porte. Ses grands yeux curieux semblaient me transpercer de part en part et je me retins de sourire. Son manque de discrétion n'avait pas l'air de le préoccuper. Voyant que je n'avais pas l'air hostile face à sa présence, il se permit d'entrer complètement dans la pièce. Il referma la porte avec maladresse, sans faire de bruit, puis me rejoignit en souriant. Je le suivis des yeux alors qu'il s'approchait de moi en sautillant, m'attardant un instant sur ses cheveux or qui se balançaient à chaque pas. À ma grande surprise, Le Loup en moi se permit d'humer l'air et son odeur vola jusqu'à nous. Je fus presque étouffée quand elle atteignit mes narines, tant je n'étais plus habituée à des sensations si développées. Les pupilles vert pâle de l'enfant rencontrèrent les miennes.

- Tu es qui ?

       Il m'avait demandé ça de sa voix d'enfant, encore chargée de sommeil. Ses petites mains vinrent attraper le bas de mon immense tee-shirt tandis qu'il se plaquait contre moi, quémandant de l'attention et de la chaleur. Les Gamma, qui étaient donc encore tout jeunes, étaient encore plus friands des contacts physiques que les loups adultes. Ils appréciaient beaucoup notre haute chaleur corporelle et s'entraînaient, de manière inconsciente en réalité, à créer des liens avec les membres de la meute qu'ils intégreraient dès leur première mutation. Son visage se posa sur mon ventre et il ronronna. 

        Je me dandinai, mal à l'aise. Je n'étais pas habituée à ce genre d'attitude. Par le passé, ce type d'interactions avec les petits m'était interdit. Les parents refusaient de laisser leur progéniture s'approcher, car ils s'effrayaient de ma réaction. De ce que je pouvais leur faire. De jusqu'où je pouvais aller si une chose n'allait pas dans mon sens. À leurs yeux, j'étais dangereuse. Mortelle.

Il faut croire qu'ils avaient raison, pouffa le Loup.

- Alice, finis-je par lui répondre. Et toi ?

- Alec.

       Il était le petit de Caitlin et sa moitié. Il est vrai que j'avais reconnu l'odeur de celle qui m'accueillait lorsque le Loup l'avait senti. Celle-ci l'enveloppait presque amoureusement et cela me donna la nausée. J'avais l'impression d'avoir vécu toute ma vie sans odorat et que celui-ci s'était éveillé d'un coup, confrontant mon nez inhabitué à une multiplicité de senteurs nouvelles et suffocantes. Je me décidai à aller ouvrir la fenêtre de la chambre pour tenter d'atténuer la gêne. L'enfant ne me lâcha pas un seul instant, et je le sentit me darder du regard à chacun de mes gestes. Une brise glaciale embrassa mon corps lorsque j'ouvrais les volets. Dehors, le sol était recouvert de neige d'un blanc immaculé. La chambre où je séjournais donnait sur la forêt qui entourait le village. Pas un bruit ne s'échappait d'entre les grands arbres qui me faisaient face. Je remarquai néanmoins, en plissant les yeux pour tenter de voir le plus loin possible, deux billes brillantes me fixer. Un lycan. Cela devait probablement être un Delta qui faisait sa ronde sur le territoire de ma mon âme-sœur. Le loup ne s'attarda pas là plus longtemps et il ne resta bientôt plus personne. 

      Je profitai un instant de ce grand bol d'air frais avant qu'Alec n'attrape ma main et me tire vers le lit. Je me laissai faire, intriguée. L'enfant me poussa avec ses petites mains et m'incita à m'allonger sur le matelas. Je m'adossai contre la tête de lit, la respiration calme pour éviter que mes nausées ne reviennent. Alec grimpa sur moi, manqua d'écraser mon estomac avec ses pieds, s'assit. Il était lourd ! Sans s'en soucier, il s'allongea sur mon torse et se pressa contre ma poitrine en soupirant d'aise. Je le laissai faire, perturbée. 

Tu sens comme son Alpha, expliqua le Loup. Sa voix était étrangement calme. Il te reconnaît comme sa femelle.

      L'esprit sauvage avec qui je partageais mon corps remua dans le fond de mon esprit. Je sentis une emprise similaire à celle de la veille m'attraper et je grimaçai en anticipation.  Il n'en fit rien. À la place, je sentis mon alter ego prendre possession du haut de mon corps, de mon cou au bas de mes hanches. Il entoura le louveteau de nos bras, nos mains reposant sur sa nuque et sur sa chevelure blonde avec douceur. Alec ne bougea plus et, quelques minutes plus tard, il ronflait contre ma poitrine. Je passai mes doigts dans ses cheveux blonds qui tombaient sur son visage endormi. J'avais l'impression que cette fois-ci, le Loup et moi avions tous les deux le contrôle sur l'ensemble de notre anatomie. 

Mine [en cours de correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant