Entre deux océans - Tome 2

By evaaans23

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Ravensbrück, Auschwitz, Mauthausen, des noms qui inspirent la terreur. Des noms de la mort. Alors que Blaine... More

Prologue
Chapitre 1
Chapitre 2
Chapitre 3
Chapitre 4
Chapitre 5
Chapitre 6
Chapitre 7
Chapitre 8
Chapitre 9
Chapitre 10
Chapitre 11
Chapitre 12
Chapitre 13
Chapitre 14
Chapitre 15
Chapitre 16
Chapitre 17
Chapitre 18
Chapitre 19
Chapitre 20
Chapitre 21
Chapitre 22
Chapitre 23
Chapitre 24
Chapitre 25
Chapitre 26
Chapitre 27
Chapitre 28
Chapitre 30
Chapitre 31
Chapitre 32

Chapitre 29

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By evaaans23

- Blaine -

La chaleur étouffante dans la voiture me faisait transpirer à tel point que j'avais l'impression que mon t-shirt allait rester gravé à jamais sur ma peau. Le mois de mars avait vu arriver les pluies tant espérées. Sauf qu'une fois arrivées, elles ne se sont plus arrêtées. Parfois accompagnées d'orage, elles avaient provoqué de nombreuses inondations sur tout le territoire du Nord.

Nous étions maintenant en avril et nous profitions d'une accalmie Eddy et moi. Il avait déclaré qu'il ne voulait pas rester coincé un mois de plus chez lui à cause des nouvelles pluies annoncées. Pour justifier le fait qu'il m'emmenait avec lui, il avait décrété que j'avais besoin de changer d'air.

J'avais plus de mal que je ne l'avais pensé à me remettre de mes blessures. Marcher me faisait souffrir. Mon dos me faisait souffrir. Parfois, c'était les deux en même temps. La douleur arrivait telle une traitresse, quand je m'y attendais le moins et elle irradiait pendant des heures. Certains soirs, je ne pouvais même plus respirer tant je souffrais.

Pour couronner le tout, je devais porter des espèces d'attelles amovibles pour me déplacer. Contrairement aux précédentes qui m'obligeaient à me déplacer avec des béquilles, celles-ci me permettaient de me déplacer à peu près normalement et surtout sans une canne. 

Après plusieurs jours d'ennui à zapper sans but, le mur mal tapissé pour seul horizon, j'avais essayé de me rendre utile au ranch mais je n'avais été bon à rien. Je ne pouvais pas m'occuper des chevaux et personne ne semblait apprécier ma cuisine. 

- On aurait pu croire que toutes les voitures d'Australie étaient équipées de la climatisation, ai-je ironisé avec un grand sourire moqueur.

Eddy m'a jeté un regard mauvais en grognant quelque chose que je n'ai pas compris. Une insulte surement. 

- J'avais cette voiture alors que ton père était encore un mioche. Evidemment qu'il n'y a pas la clim, on ne savait même pas ce que c'était à cette époque.

- A l'époque des dinosaures ?

- Tu veux rentrer à pied ?

- Je suis étonné que la radio fonctionne. Un jour, on retrouvera l'épave de ta voiture et un archéologue en sortira la cassette coincée dans le lecteur et se demandera quel genre d'être peu avancé pouvait posséder une boite en plastique avec du papier à l'intérieur.

- Crétin ! a-t-il rétorqué en mettant la radio plus fort tandis que je riais de ma propre blague.

Nous avions prévu d'aller jusqu'à Alice Springs. C'était là-bas qu'il avait rencontré sa femme. On y resterait quelques jours avant de reprendre la route pour Ayers Rock. Un ami d'Eddy nous hébergerait près de Tennant Creek. J'étais resté perplexe sur le fait qu'Eddy était certain que son ami accepterait de nous accueillir sous son toit alors que nous ne l'avions pas prévenu de notre arrivé mais il m'avait répondu qu'en Australie, on avait le sens de l'hospitalité. 

Au début, je n'avais pas été très enthousiaste par ce road-trip improvisé qui promettait d'être long avec trop peu de pharmacie, d'hôpital et de station d'essence dans les environs mais finalement, j'étais plutôt content d'être là avec Eddy. 

- Tu en prends beaucoup, non ? m'a demandé Eddy après que j'aie gobé deux antidouleurs d'un coup.

- C'est que je souffre beaucoup.

- Fait attention avec ça. Une fois qu'on est accro, c'est dur de s'en défaire. Mieux vaut souffrir un peu.

- Tu parles d'expérience ? l'ai-je taquiné.

- Exactement, a-t-il répondu la mine grave.

Nous ne parlions pas beaucoup mais ce n'était pas pour me déplaire. L'arrivée des pluies avaient coïncidé avec mon humeurs maussade. Je prenais la mouche plus facilement qu'à l'accoutumé et ma bonne humeur semblait s'être envolée à tout jamais. J'avais échangé quelques messages avec Catherine, mais elle gardait toujours une certaine distance qui m'échappait. Je lui avais demandé une fois si je la mettais mal à l'aise ou si elle avait finalement changé d'avis mais elle m'avait répondu par la négative. De mon côté, je n'osais pas lui parler de mon accident par crainte de l'inquiéter inutilement. 

- On devrait s'arrêter à la station pour faire le plein, ai-je dit en apercevant une station au loin.

Eddy s'est contenté de l'ignorer.

- Ou pas, ai-je rajouté.

- Il sera moins cher à la prochaine station.

- Comment tu le sais ?

- Parce que depuis les années que je prends cette route, l'essence est moins chère à l'autre station.

- Et si la station n'existe plus ?

Eddy s'est arrêté au beau milieu de la route déserte, exaspéré. Il m'a jeté un regard en coin et sous mon insistance, il a fait marche-arrière jusqu'à la station. J'en ai profité pour assouvir une envie pressante et acheter de quoi grignoter.

Voyager avec Eddy était vraiment agréable. Il connaissait beaucoup de chose sur le pays y compris au sujet des peuples aborigènes et de leur croyance. Si nous croisions une pierre sacrée, il en connaissait l'histoire. La seule chose dont je me serrais passé était les sursaut de son vieux tacot qui venait chatouiller la douleur faussement endormie qui menaçait de s'abattre sur moi comme un torrent à tout moment. 

Eddy, triomphant, m'a parlé toute la soirée de l'art d'accueillir les amis que seuls les australiens maitrisaient quand son ami nous a accueillis à bras ouvert. C'était un vieux célibataire qui tenait plus de l'ours que de l'humain. 

- Ton ami connait la clim lui, ai-je nargué Eddy en sortant de la douche. 

- Va te faire voir Blaine, a répondu Eddy en croquant dans sa crème glacée. 

Nous avons repris la route le lendemain après un solide petit déjeuner et notre glacière pleine de sandwichs et d'eau. 

- Tu sais que ce ne sont pas des bonbons ?

J'ai jeté un regard torve à Eddy tout en rangeant mes cachets dans mon sac à dos. 

- Tu en prends beaucoup. Trop. Et ces trucs te rendent agressif même si tu essayes de te contenir. 

- Je ne suis pas agressif, ai-je dit plus vivement que je ne l'aurais voulu.

Eddy a haussé les sourcils en s'esclaffant.

- Tu rumines trop. Profite du voyage, c'est pour ça qu'on le fait. Et arrête de gober ces pilules comme si tu mangeais du pop-corn, a-t-il rajouté en arrachant le flacon que je venais de ressortir.

J'ai soupiré bruyamment en mettant mes pieds sur le tableau de bord. Bercé par la radio, j'ai essayé de dormir un peu sans succès. Au fond de moi, je savais qu'il disait vrai. J'étais tellement frustré de ne pas savoir marcher sans le soutient d'attèles, de ne pas pouvoir me mouvoir comme je le souhaitais et faire tout ce que je voulais. Au début, les quinze minutes de marche obligatoire par jour avait été une véritable torture. Je savais que sans la femme de Danny, j'aurais laissé tomber mais elle a toujours gardé un oeil sur moi et eu des paroles réconfortantes et encourageantes pour moi. J'étais conscient de la chance que j'avais d'avoir des gens aussi incroyable autour de moi qui ne m'avait pas mis dans un avion pour l'Ecosse quand je n'ai plus été bon à rien. 

Mon père avait été concerné mais une fois que je lui avais dit être entre de bonnes mains, il ne s'était plus vraiment inquiété. Ma soeur était la seule à encore prendre de mes nouvelles tous les jours. J'avais une fois eu la mauvaise idée de lui demander si elle l'avait dit à notre mère et ce n'est qu'après que j'eu insisté pendant presque vingt minutes qu'elle m'a répété ce que ma mère lui avait répondu. Des paroles qui me hantaient parfois. Elle lui avait dit qu'elle se fichait bien de ce qui m'était arrivé car elle n'avait plus de fils. 

L'un des effets secondaires des antidouleurs étaient les crises d'angoisse. J'en avais de temps à autre, des violentes qui vous laisse paralysé, une sueur froide coulant le long de votre colonne vertébrale pendant que vous pensez à mille et une chose en même temps. 

Je me suis finalement endormi d'un sommeil sans rêve. Quand je me suis réveillé, le soleil était haut dans le ciel et j'étais de nouveau couvert de sueur. 

- Tiens, de l'eau, m'a dit Eddy en mâchonnant de la viande séchée.

J'ai vidé la bouteille d'une traite. Je ne m'étais pas rendu compte que j'avais si soif jusqu'à ce que ma gorge me gratte pour avoir plus du précieux liquide. 

- Il est quelle heure ? ai-je demandé en réprimant un bâillement.

- Il va bientôt être 16 heures.

- 16 heures ?! Je croyais que nous devions arriver à Alice Springs dans l'après-midi ?

- Eh bien...

- C'était l'histoire de 5 ou 6 heures de route si je me souviens bien ?

- Oui, oui... je me suis perdu, voilà !

- Tu t'es perdu ? Sur une voie rapide ? En ligne droite ?

Eddy a maugréé quelque chose que je n'ai pas compris.

- Quoi ?

- J'ai voulu faire un détour pour te montrer un endroit vraiment joli, a-t-il répété plus fort.

- Laisse-moi deviner : tu ne te souvenais plus très bien de l'endroit exact et tu es donc sortis de la route pour nous perdre je ne sais où ?

- Je ne nous ai pas perdu... Je suis arrivé à Ali Curung et de là une très gentille dame m'a aidé à retrouver mon chemin jusqu'à l'autoroute. Ensuite j'ai dû m'arrêter pour faire le plein d'essence... que j'avais oublié de faire avant de repartir.

- Heureusement qu'on a du stock, ai-je dit en parlant des quatre bidons de carburants que nous avions remplis à la pompe de Katherine. Heureusement aussi que c'était juste « au cas où » et que nous n'aurions pas à les utiliser.

- Ho ça va hein ! Le co-pilote n'a rien à dire, surtout quand il a dormi la moitié de la journée.

- On arrive alors ? 

- J'imagine qu'on devrait y être vers 21 heures.

Il a fini par m'avouer qu'il s'était perdu bien avant Ali Curung et qu'il s'était retrouvé là-bas complètement par hasard. Il lui avait fallu du temps pour trouver quelqu'un de disposé à le conduire jusqu'à la route principale et quand enfin une vieille dame avait accepté, elle avait fait tout le chemin à pied forçant Eddy à rouler au pas. 

- Je ne me suis rendu compte de rien, j'ai dormi fort, ai-je remarqué. 

- C'était une longue errance dans le désert, ai-je dit suspicieux.

- Prends-en encore une poignée et tu dormiras pour toujours, a répondu Eddy en jetant mon flacon de médicament sur le tableau de bord.

J'ai préféré ne pas lui répondre mais la remarque acide que j'avais envie de lui lancer devait se voir sur tout mes traits. 

- Ils vont nous recevoir à l'hôtel ? ai-je fini par lui demander.

- Eh bien... ça te dérangerais beaucoup de passer une nuit dans la voiture ?

J'ai secoué la tête de droite à gauche sans savoir si j'étais amusé ou si j'avais envie de tuer quelqu'un. 

- Si tu m'offres le plus gros hamburger que je n'ai jamais vu, ai-je fini par répondre. 

- Et si je t'offre le meilleur restaurant américain que tu n'aies jamais mangé ? Nourriture à volonté, c'est moi qui régale.

- C'est quoi un restaurant américain ?

J'imaginais un établissement avec viande de barbecue à volonté et musique country en fond sonore.

- Un McDonald, a répondu Eddy.

- S'il y a un McDonald, il y a de la vie, ai-je plaisanté.

Mon double cheeseburger me semblait bien loin lors du quatrième arrêt en moins d'une heure.

- Tu crois qu'on y arrivera un jour ? ai-je plaisanté.

- Je suis vieux, mon arthrite me fait mal et cette ligne droite m'épuise un peu, fut son excuse. 

Au bout d'un moment, j'ai suggéré qu'on s'arrête pour manger les sandwichs que nous avait préparé son ami. 

- Il n'a pas eu la main légère sur la mayonnaise, a fait remarquer Eddy en essayant de rattraper une rondelle de cornichon qui essayait de s'échapper du pain.

- Il devait savoir qu'on aurait besoin de force.

- De cholestérol tu veux dire.

- C'était de l'allégé, je l'ai vu.

Nous avons partagé une bière sans alcool chaude et un paquet de chips.

- Je pourrais conduire, ai-je suggéré.

Eddy qui était penché sur le moteur de la voiture s'est cogné la tête contre le capot en se redressant.

- Personne ne t'a dit que j'avais l'intention de rentrer chez moi en vie ?

- Très drôle, ai-je répondu en lui tendant une bouteille d'eau afin qu'il réhydrate notre cheval de fer.

Il a refermé le capot en essuyant ses mains sur son pantalon en toile, laissant des traces d'huiles sur les poches arrière.

- Si on croise des flics et que tu es au volant je vais en baver.

- Tu es sérieux ? Y a pas âme qui vive sur cette route. A part ces satanées mouches !

Celles-ci s'activaient du lever du soleil jusqu'à la nuit tombée, essayant par tout les moyens de rentrer dans tout orifice visible.

- Tu as une patte folle. Deux pour être exact.

- C'est une ligne droite. Je n'irai pas vite. De toute façon ton vieux tacot n'est pas en état de commettre le moindre excès de vitesse, l'ai-je taquiné en tapotant la carrosserie rouge de poussière.

Eddy n'a consenti à me laisser conduire que vers vingt heures. Le soleil se couchait et il y voyait de moins en moins malgré les loupes qui lui servaient de lunettes. Il ne voulait surtout pas admettre qu'il était fatigué par le trajet, mais les trois autres arrêts, chacun un peu plus long que le précédent avaient fini par le trahir. 

- On y sera plus tard que 21 heures finalement, a-t-il dit en s'asseyant sur le siège passager.

- Je te réveille dès que je vois que j'arrive en ville.

- Qui t'a dit que j'allais dormir ?

Un quart d'heure plus tard, il ronflait plus fort encore que le moteur de la voiture. La route n'était pas éclairée et je devais redoubler de prudence. Les yeux plissés, j'étais concentré sur les quelques centimètres que la demi-lune voulait bien me laisser voir quand une vive douleur m'a saisi depuis le bas de mon dos jusque dans la nuque. 

- Blaine, tu fais quoi ?!

Eddy s'est réveillé en sursaut alors que j'avais évité de justesse le cadavre de ce que je supposais être un dingo.

- J'ai le souffle coupé, lui ai-je répondu en serrant les dents. 

- Tu veux tes cachets ?

Il les a trouvé sur le tableau de bord au milieu de la masse de déchet qui l'encombrait.

- Tu devrais t'arrêter. Arrête-toi je vais reprendre le volant. 

Je n'ai pas eu le temps de freiner qu'il était devant moi ébloui par les phares.

- BLAINE ! a crié Eddy.

J'allais un peu trop vite pour freiner à temps et j'avais trop mal pour avoir le réflexe nécessaire qui m'aurait permis d'éviter le kangourou que j'ai percuté de plein fouet dans un bruit sourd. Le pauvre animal s'est retrouvé sur le capot avant de retomber juste à côté de la voiture à l'arrêt. Sous le choc, je regardais droit devant moi, le souffle court, toute douleur disparue. 

- Blaine, ça va ? a demandé Eddy en me secouant un peu.

- Je crois. Et toi ?

- Oui, je crois.

Nous sommes sortis pour constater les dégâts. Le kangourou était couché sur le flanc, toujours vivant. J'ai voulu m'approché, mais Eddy m'en a empêché.

- Il pourrait paniquer et te donner un coup. Il a l'air assez alerte pour une victime de la route.

- Qu'est-ce qu'on va faire ? On ne peut pas le laisser ici.

- Non, mais vu l'état de la voiture on risque de ne pas aller bien loin. 

Eddy regardait avec dépit le phare qui ne fonctionnait plus, le capot défoncé et les pneus qui n'en menaient pas plus large. 

- J'ai bien peur qu'un kangourou a eu raison de ta vieille guimbarde. 

- Dis-moi que tu as du réseau, m'a demandé Eddy la voix pleine d'espoir.

Il avait refusé d'emprunter le téléphone de son fils sous prétexte qu'il n'avait jamais eu besoin de greffer une prothèse sifflante à la main contrairement à ma génération et qu'il s'en sortirait très bien sans comme il l'avait toujours fait. Heureusement, j'étais de ceux qui avait besoin d'avoir leur prothèse pas trop loin de leur main pour sentir leur coeur battre à un rythme normal et j'avais pris bien soin de charger ma batterie tant que nous étions chez son ami.

J'ai dû monter sur le toit de la voiture pour avoir une barre de réseau, juste assez pour avoir le temps de téléphoner non pas à un garagiste mais au Rescue Center le plus proche. 

- Qui pense à avoir dans un carnet les numéros des Rescue Center mais pas ceux vraiment utiles comme... je ne sais pas moi... disons d'un dépanneur ?

- Ma femme m'a appris à savoir où sont mes priorités, a répondu Eddy en s'éventant avec le carnet. 

Une dame plus ou moins agréable m'avait répondu. Elle avait réussi à deviner notre position avec le peu d'indice que j'avais réussi à lui donner et je la soupçonnais d'être un peu voyante. Assis sur le toit de la voiture, je n'avais plus le courage de redescendre, la montée avait été éprouvante même si je n'avais rien laissé paraître. 

- Elle vient d'Alice Springs ? ai-je demandé à Eddy.

- Non, sa clinique est un peu excentrée de la ville mais nous ne serons pas loin du centre-ville. A condition d'avoir une voiture. 

J'étais en train de regarder les premières étoiles naissantes faire leur apparition quand un bruit de succion m'a interpellé. Je suis descendus non sans mal, manquant de me rompre le cou en manquant de peu le capot de la voiture, permettant de ce fait à mes jambes de me rappeler que j'avais maintenant le corps d'un vieillard de 80 ans. 

- Blaine, où tu vas ?

Je n'ai pas répondu, à la place je me suis éclairé avec la lampe de poche de mon téléphone. J'ai avancé avec précaution jusqu'au kangourou. J'ai d'abord pensé qu'il devait être en train de souffrir mais il bougeait à peine, sa respiration était faible. Le bruit s'est pourtant fait plus fort. Je me suis approché un peu plus quand un léger mouvement de l'animal m'a fait sursauter. Il y a eu un léger frémissement entre ses pattes et comme j'étais à peu près sur qu'il n'était pas en état de se relever pour me proposer un petit combat de boxe, je me suis penché vers lui tandis qu'Eddy sifflait entre ses dents quelque chose qui ressemblait à "cet idiot va retourner à l'hôpital avec des dents en moins".

- Eddy ! Viens voir, vite !

Il m'a rejoint avec méfiance jusqu'à ce qu'il entende le bruit de succion. Son visage s'est éclairé.

- Un bébé ! s'est-il enthousiasmé en s'agenouillant près du kangourou.

Le petit n'était plus dans la poche de sa mère mais il était tout contre elle, recroquevillé et tremblotant. 

- Il a froid On devrait le mettre dans la voiture non ? ai-je suggéré. 

Je me suis retourné vers Eddy seulement pour constater qu'il n'était plus là. Il farfouillait dans la boite à gant à grand renfort de jurons.

- Eddy ? ai-je demandé. 

- Attend... Ah ! Voilà.

Il m'a rejoint avec une taie d'oreiller dans les mains. Je l'ai regardé, médusé, me demandant si ce n'était pas lui qui abusait de psychotropes. 

- Crétin, on ne vous apprend donc rien en Ecosse ?! Le bébé aura l'impression d'être bien au chaud dans la poche de sa mère la-dedans.

Je ne m'étais pas rendu compte que j'avais dit ça tout haut mais maintenant qu'il me l'avait dit, ça semblait plutôt ingénieux même si je ne pouvais pas m'empêcher de me demander si tous les australiens promenaient une taie d'oreiller dans leur voiture. 

- Tu crois que la mère va s'en sortir ? lui ai-je demandé tandis qu'il déposait le petit sur le siège conducteur.

- Aucune idée.

J'ai déposé ma veste sur la mère sans vraiment savoir si c'était utile ou non. 

Il nous aura fallu attendre une heure pour être ébloui par les phares d'un gros 4X4 qui est venu s'arrêter juste à notre hauteur. Une femme d'une quarantaine d'année en est descendue avec une trousse médicale. 

- Bonsoir, je suis Isabella Stampton, s'est-elle présentée tandis que je sortais à sa rencontre. 

- Je suis Blaine et voici Eddy, ai-je dit quand il nous eut rejoint.

- C'est une femelle, j'ai enveloppé son bébé dans une taie d'oreiller, a-t-il dit en lui tendant la main.

- Que s'est-il passé ?

J'allais ouvrir la bouche quand j'ai été stoppé net par le regard sévère d'Eddy qui a articulé silencieusement "ferme-là". Je me souvins alors que je n'étais pas censé conduire dans mon état.

- J'ai bien peur d'avoir un peu somnolé et il faisait tellement sombre que je n'ai pas vu le kangourou.

- Ça arrive souvent aux touristes qui veulent absolument avaler des kilomètres. C'est dangereux de rouler la nuit, a dit Isabella en se penchant sur le kangourou blessé.

- Ça va aller pour elle ? ai-je demandé.

- Oui, je vais pouvoir m'en occuper.

- Vous êtes vétérinaire ? 

- Oui. J'ai fondé le Stampton Rescue Center il y a quelques années pour y soigner tous les animaux victimes de la route. J'ai un dingo en rémission et deux bébés kangourous orphelins pour le moment. Vous m'aidez à la mettre à l'arrière ?

Eddy l'a aidé à soulever la mère avant de déplacer sa voiture pour la mettre là où elle ne gênerait personne. Je me suis retenu de demander si cela risquait vraiment d'arriver, préférant grattouiller la tête du bébé qu'Eddy venait de me fourrer dans les bras. 

Isabella nous a spontanément proposé un toit jusqu'à ce que la voiture soit en état de marche. Elle avait deux chalets qui étaient normalement réservés aux bénévoles qui venaient l'été l'aider elle est ses deux assistants. Elle n'a pas oublié de nous préciser avec un sourire sardonique qu'il n'y avait ni l'électricité ni l'eau chaude. 

- Et si vous m'aidez un peu à la clinique je vous offre les repas.

Eddy m'a jeté un coup d'oeil pour s'assurer que j'étais d'accord. J'ai haussé les épaules et il a accepter avec un empressement que j'ai trouvé suspect. 

La clinique était attenante à une jolie petite maison, modeste mais bien entretenue. Il y avait des cactus d'une taille impressionnante un peu partout. Nous nous trouvions à 45 minutes en voiture de la ville et il n'y avait pas de voisin à l'horizon. 

Nous l'avons regardé installer le kangourou et son bébé dans la clinique avant de la suivre jusqu'à ce qui serait notre logement pour un temps encore indéterminé. Isabella s'est excusée pour la chaleur étouffante qu'il y faisait et Eddy m'a donné un léger coup de coude pour me faire remarquer qu'il n'était pas le seul à ne pas voir l'utilité de la clim. 

- Si vous avez faim, je peux vous préparer quelque chose, a-t-elle proposé avec l'expression de quelqu'un qui ne voulait surtout pas qu'on accepte.

- On a de quoi manger dans notre glacière, a répondu Eddy en s'éventant avec une vieille carte routière.

Soulagée, Isabelle est partie en nous souhaitant une bonne nuit.

- Eddy.

- Oui ?

- On a oublié la glacière.

Nous nous sommes endormis en ayant faim et au réveil, non seulement j'avais encore faim mais les ronflements intempestifs d'Eddy m'avait empêchés de dormir correctement. J'ai pris une douche, qui comme promis fut froide, puis je suis sortis pour observer les environs. Tout était rouge. Du sable, de la poussière, de l'herbe brûlée. L'hiver n'allait pas tarder à s'installer et il faisait encore plus de 30°C ici, au beau milieu de nulle part, au beau milieu du pays. 

- Bonjour Blaine, a crié une voix dans mon dos.

Je me suis retourné pour voir Isabella suivit d'un énorme molosse.

- C'est Archie. Il est impressionnant, mais pas bien méchant.

J'ai tapoté la tête du chien tout en suivant sa maîtresse qui venait de m'inviter à prendre le petit-déjeuner chez elle.

- Tu pourras apporter une assiette à ton grand-père, a-t-elle dit en mettant une bonne cuillère de salade de fruit dans un bol.

- Ce n'est pas mon grand-père, ai-je répondu en savourant ma tartine de confiture.

- Oh pardon. Vous aviez l'air complice.

Je lui ai expliqué en quelques mots que j'étais un espèce de stagiaire pour Eddy mais que je me plaisais à croire qu'il était un peu plus mon ami que mon mentor.

- Je suis persuadée qu'il te voit autrement que comme un stagiaire s'il t'a emmené avec lui faire un tel voyage. 

Je l'ai aidé à débarrasser la cuisine, ai déposé une note sur la table de chevet d'Eddy qui ronflait encore pour lui dire qu'il trouverait de quoi manger dans le frigo et je suis parti rejoindre Isabella qui m'avait proposé de l'aider à la clinique. Elle m'a présenté le dingo qui se remettait d'une balle dans l'abdomen, certainement l'oeuvre d'un braconnier. Elle l'avait baptisé Igor parce qu'elle considérait qu'un nom fort donnait plus d'énergie à ses pensionnaires mal en point mais l'animal faisait peine à voir, allongé sur le flanc, des bandages sur le ventre et une perfusion dans la patte.

- Il est méchant ? 

- Il faut s'en méfier comme tous les animaux ici. 

- D'où vienne les subventions pour toi faire tourner la clinique ? Je suppose que tes pensionnaires ne paye pas le séjour quand tu les renvoies chez eux.

- J'ai des clients humains. Je vais dans les fermes pour m'occuper des troupeaux et des animaux en général. J'ai aussi quelques clients de la ville, mais ils ne sont pas nombreux à cause de la distance.

- Tu n'as pas de subside ? me suis-je étonné

- Pas par l'état. Par des touristes parfois, par des parrainages sur mon site internet.

Plus loin, la maman kangourou semblait avoir meilleur mine. Elle se tenait debout et son bébé était avec elle.

- C'est déjà un gros bébé, tu vois comme sa tête dépasse de la poche ? Il ne va plus y rester très longtemps.

- Elle a l'air d'aller mieux, ai-je constaté en regardant Isabella s'occuper d'elle.

- Elle a été sonnée par le choc mais les dégâts ne sont pas trop importants. On va pouvoir la relâcher très vite. Au fait, je me suis permis d'appeler un ami garagiste. Il a déjà été chercher la voiture. Il pense qu'il en aura pour trois ou quatre jours. Je conduirai ton ami en ville tout à l'heure pour qu'il puisse discuter avec lui des réparations et de leurs coûts.

A treize heures, j'ai été réveiller Eddy pour qu'il puisse manger avant d'aller en ville. A son retour, il semblait soulagé.

- La voiture fonctionne toujours !

- Fantastique, ai-je répondu en souriant. 

Les réparations allait lui coûter un bras mais il ne semblait pas s'en soucier. Un peu plus tard, Isabella m'a demandé si je voulais l'accompagner jusqu'à une ferme voisine où elle allait devoir vacciner quelques vaches. 

- Ce n'est pas très différent d'un ranch pour chevaux, m'a dit Eddy quand il a trouvé mon enthousiasme un peu trop agaçant. 

Il n'avait pas tout à fait tort. Comme au ranch, le travail n'avait pas l'air de manquer et les conditions de logement des employés étaient bien moins bonne que celles que nous avions chez Danny.

- Tu ferais un bon vétérinaire, tu m'as bien secondé, m'a dit Isabella sur le chemin du retour.

- Pas vraiment. Je n'aime pas voir les animaux souffrir. Et je n'ai pas vraiment la tête aux études. 

Le lendemain, elle nous a déposé en ville avec Eddy qui m'a enfin offert mon restaurant américain. Il faisait bien trop chaud pour manger aussi gras mais pas au point de m'empêcher de reprendre un cheeseburger et un milkshake après avoir fini mon premier menu. 

- Tu crois pouvoir marcher jusqu'à la station télégraphe ? 

J'ai haussé les épaules dans l'espoir qu'il laisse tomber cette idée sans que j'aie à lui dire que j'avais déjà pris un peu trop de cachet pour assourdir la douleur lancinante qui irradiait dans mes deux jambes. 

- J'ai rencontré ma femme dans le magasin en face de toi. A l'époque c'était une épicerie.

J'ai levé les yeux vers un magasin de souvenir avant de me tourner vers Eddy.

- Tu vivais ici ?

- Non, j'étais un Jackarro et j'étais venu travailler dans une ferme. C'est grave à mon père que j'ai eu cet emploi. Il y avait beaucoup de nuit à la belle étoile. Mon rôle était principalement la gestion du bétail mais j'aidais avec toutes sortes d'autres travaux. 

- Tu m'avais dit avoir toujours été éleveur de chevaux. 

- Oui, enfin, il y a eu un moment ou j'ai voulu faire autres choses. Sauf que je ne savais rien faire d'autres. Donc, j'ai échangé les chevaux contre des vaches. Un week-end par mois, mon patron laissait trois de ses ouvriers venir en ville. On dormait dans un dortoir pas cher et on passait nos soirées dans les pubs à boire de la bière pas cher. Je l'ai remarqué dès que je l'ai vu. Elle ne ressemblait à personne. Elle n'était pas spécialement jolie mais elle avait ce quelque chose qui la démarquait. Elle parlait le slang australien et elle n'avait peur de rien. Elle côtoyait beaucoup les aborigènes ce qui déjà à cette époque-là était assez surprenant. Tu as dû remarquer cette ambiance un peu électrique entre nos deux peuples.

Ça ne m'avait pas échappé en effet qu'il y avait un décalage entre les aborigènes qui semblaient vivre coincés entre deux mondes et leurs invités déreangeant qui n'avaient jamais été très affable envers eux quand il avait s'agit de partager leurs terres. 

- Bref, elle n'était pas très impressionnée par leurs différences ou par ce que pouvaient penser les autres. Jamais elle n'a vécu dans le regard des autres et ce qu'ils pourraient en dire, ça m'impressionnait beaucoup car ce n'était pas vraiment mon cas. Je n'ai pas été éduqué pour détester les aborigènes ou pour être mauvais envers eux mais on m'a vite appris à les éviter et, j'ai un peu honte de le dire, mais plus jeune j'étais un peu stupide et mes amis l'étaient encore plus et ils nous est arrivé d'asticoté un autre jeune de notre âge à cause de sa différence.            J'ai fini par vieillir et je suis devenu moins crétin, surtout grâce à elle. Elle avait une vision du monde différente, à la fois idéaliste et réaliste. C'était aussi une sacrée emmerdeuse. Elle a défié son père quand il a refusé que je l'épouse. Il voulait mieux pour sa fille.

- Il a fini par accepter votre union ? 

- Ah ça non, a répondu Eddy en riant à gorge déployée. Elle s'est enfuie avec moi quand je suis rentré à Katherine. Après ça les relations avec ses parents ont été assez froides.

- Elle te manque beaucoup, ai-je constaté en voyant ses yeux s'humidifier malgré lui.

- Plus encore que ce que tu peux imaginer. J'ai toujours pensé qu'elle allait m'enterrer et finalement, le cancer et l'Alzheimer l'ont eu.  Je l'ai vu tout oublier, nos souvenirs en commun, nos enfants. Elle s'est longtemps souvenue de Graham, mon benjamin et son fils préféré jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'un vague mirage de temps en temps. 

- Et toi ?

- Elle m'a reconnu presque jusqu'à la fin. Ça va te sembler égoïste, mais j'ai été soulagé et heureux qu'elle ne m'oublie jamais vraiment contrairement aux autres. 

Quand c'est devenu trop éprouvant pour lui de parler de sa femme, il a changer de sujet pour parler de la naissance de ses enfants, du jour où il s'était enfermé par accident dans la grange avec un taureau en furie et de son amour secret pour les opéras de Verdi. 

Trois jours plus tard, nous avions enfin récupéré la voiture. Le monteur grondait toujours autant si ce n'était plus mais elle roulait. Nous sommes restés deux jours de plus avec Isabella en attendant que l'un de ses bénévoles arrivent. Le dernier soir, j'avais préparé le repas pour remercier Isabella de son hospitalité. 

- Cinq heures du matin, ça ne devrait pas existé, ai-je marmonné en montant dans la voiture le lendemain matin. 

Eddy voulait que nous arrivions au plus vite à Uluru, refusant catégoriquement de me donner le volant quand je l'avais supplié quelques heures plus tard sur une route où il n'y avait pas une âme. Une vibration m'a averti que je venais de recevoir un message. C'était Isabella qui venait d m'envoyer une photo du kangourou et son petit avec un petit message qui disait qu'ils pourraient bientôt retourner à l'état sauvage. 

- Tu veux bien lever les yeux de ce maudit machin, a râlé Eddy.

- J'ai reçu un mail d'Isabella.

- Y a pas de réseau ici.

- Il faut croire qu'il y en avait assez pour moi, ai-je répondu en ricanant.

En fait, ça faisait des heures que je passais en revue mes albums photo à la recherche de celles de Catherine. Il y en avait plusieurs prise à la dérobée des années avant que je ne lui confesse mes véritables sentiments, d'autres de nous ensemble. J'ai éteint mon téléphone pour faire plaisir à Eddy mais un coup d'oeil dehors m'a fait froncer les sourcils. Nous venions de croiser notre quatrième car de touristes.

- Je croyais que la haute saison c'était en été.

- Imagine ce que tu vois en triple, à ronchonner Eddy.

- Tu as bien réservé une chambre d'hôtel ? Je n'ai pas envie de faire du camping.

- Mais oui monseigneur le Laird.

Je me suis étranglé avec mon rire.

- Non mais sérieusement, dans les brochures ils disent qu'il faut réserver bien à l'avance.

- Je ne suis pas un bleu en ce qui concerne les expéditions à Uluru. J'y suis venu plusieurs fois avec mes fils et mes petits-enfants donc arrête de t'inquiéter. Et arrête avec ce truc, a-t-il rajouté en m'arrachant mon téléphone des mains.  

Il s'est alors lancé dans un long monologue sur cette invention qui était selon lui démoniaque à souhait. Je ne lui donnais pas tout à fait tort mais de là à dire que c'était mon téléphone qui dictait ma vie, tout de même. 

- Tu veux que je te dise Blaine, a-t-il lâché après son long discours.

- Non, pas vraiment.

- Vous êtes lobotomisés par ce truc. Vous n'avez même plus besoin d'un livre, tout est là-dedans. L'internet. On vous bourre le crâne avec tout et n'importe quoi. Regarde mon petit-fils, il a cinq ans et il est plus fort à ce jeux là, celui avec les bonhommes qui dansent, qu'à parler sans confondre les "g" et les "l". 

Je me suis demandé de quel jeux il pouvait bien vouloir parler, il y avait bien longtemps que je ne m'intéressait plus à ma console. 

- Eddy, j'ai compris. Je te jure qu'en temps normal mon téléphone n'est pas la continuation de mon bras. Mais là je... 

- Tu ? 

J'avais un peu honte de lui dire que j'avais tellement peur de manquer un message ou un appel de Catherine que ma hantise était de me retrouver sur une route sans réseau. 

- Blaine, il faut que tu décides une bonne fois pour tout ce que tu veux faire et où tu veux être.

J'ai regardé le paysage défiler sans répondre. Se rendant sûrement compte que j'étais un peu morose d'un coup, Eddy m'a dit avec gaieté qu'on arriverai bientôt à l'un des endroit les plus beau de la planète.

- C'est un site sacré pour les véritables habitants de ce pays. Pour eux, c'est avec Uluru que tout a commencé. 

Il disait ça avec une solennité que je ne lui connaissais pas. 

- On ira au soir, au coucher du soleil. Tu verras, c'est magnifique.

Nous sommes arrivé à un hôtel spacieux avec une terrasse privée. J'ai pris une douche avant de m'effondrer sur le lit devant un épisode des Simpson. Eddy était allé siroter un verre et n'est revenu dans la chambre que pour me dire qu'il était temps d'y aller. Je mourrais de faim comme en témoignait mon ventre qui ne cessait d'émettre des borborygmes bruyants mais Eddy était certain que celui-ci pouvait attendre encore une petite heure. 

- Tu ne peux pas mourir sans avoir vu ça et vu ta propension à te mettre dans des situations dangereuses, tu pourrais mourir à tout moment. 

- Très drôle, ai-je marmonné.

Ma mauvaise humeur s'est envolée face au spectacle de couleurs que prenait le rocher. Assis sur le capot de la voiture à l'écart des spots touristiques, nous regardions Uluru se mêler au ciel qui avait pris des teinte indigo rendant l'instant magique. Malgré-moi, mon esprit à une fois encore dévié vers Catherine qui m'avait parlée de cet endroit un soir où nous parcourions une vieille lettre jaunie que Jon avait envoyé à Iain, le frère de ma grand-mère. Je l'avais retrouvé entre les pages d'un des journaux. 

Ce jour-là, elle en savait plus que moi sur cet endroit alors que moi, même entouré d'Histoire, la seule chose que j'étais certain de savoir, c'était qu'un jour je reviendrais ici avec elle. 

- Eddy, ai-je murmuré de crainte de briser cet instant enchanté. 

Il a hoché la tête pour me faire savoir qu'il m'avait entendu.

- Je vais rentrer.

- En Ecosse ? a-t-il demandé sans se détourner du rocher qui prenait différentes nuances d'ocres.

- Non. En Irlande. Je vais aller la retrouver.

Eddy s'est tourné vers moi avec un grand sourire.

- Mieux vaut tard que jamais, a-t-il dit en me donnant une grande tape sur l'épaule.

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