PERCENEIGE • (Fantasy)

Chapitre six

Le lendemain matin, Alaska fut réveillé par nulle autre que Sciotus, qui avait l'air passablement énervé de le voir endormi sur la chaise et il jura. Il avait pourtant été si sûr de pouvoir monter la garde jusqu'au matin, et qui sait ce qui aurait pu arriver à cause d'une telle négligence ?!

S'excusant profusément auprès du félin, ce dernier continua de jurer tandis qu'ils empaquetaient leurs affaires, grignotant le minimum de nourriture possible avant leur départ.

Jetant un regard à travers l'une des fenêtres couvertes de poussière, le blond remarqua que la tempête semblait enfin calmée. Il parvenait à apercevoir la forêt de Sucres d'Orge, ainsi que la couche de neige fraîchement tombée durant la nuit. Le ciel lui paraissait être d'un blanc cotonneux et il sourit - il semblerait que la suite de leur voyage allait s'annoncer d'une manière un peu plus clémente, tout comme le lui avait assuré Wilbur avant leur départ.

Reprenant donc la route, les deux voyageurs laissèrent la bicoque en bois derrière eux. Alaska espérait arriver au plus vite à la capitale, où il serait en sécurité et pourrait sûrement dormir dans un vrai lit. Celui auquel il avait eu droit chez Wilbur lui manquait énormément, sans parler de la chambre d'amis de ses grands-parents, dont le confort avait été sans pareil durant la seule nuit qu'il y avait passée depuis dix ans d'absence.

Laissant la forêt des Sucres d'Orge derrière eux, le temps était de plus en plus clément, le ciel d'un blanc cotonneux laissant place à du bleu éclatant. Aucun soleil n'était visible, tant et si bien que la neige, belle et immaculée, ne fondait pas, son manteau s'étendant jusqu'à l'horizon. Ils croisèrent de nombreuses forêts plus ou moins épaisses, des sapins touffus ou des vieux chênes dénudés, ainsi que des rivières dont l'eau glacée grondait dans son lit, et alors qu'il était presque midi et qu'ils s'arrêtaient dans un coin pour manger, à l'abri de larges pierres entassées au pied d'une butte, Alaska remarqua une haute fumée qui montait jusqu'au ciel, loin devant eux.

- Qu'est-ce que c'est que ça ? demanda-t-il, pointant du doigt les volutes d'un noir charbon qui dévoraient les nuages blancs du ciel avec délectation.

Sciotus suivit son regard et grimaça, oubliant l'espace d'un instant le repas qu'ils partageaient.

- C'est ce qu'on appelle la Déchetterie, c'est là que sont brûlés les sapins coupés après chaque fête de Noël, leur cendres étant par la suite utilisées en tant qu'engrais pour ceux plantés pour l'année suivante.

Alaska grimaça malgré lui, regardant le haut nuage noir qui s'étalait dans le ciel bleu - ils étaient en train de polluer à foison, mais dans un monde aussi peu avancé que celui-ci en technologie, leur manque de considération n'avait rien d'étonnant.

- Nous allons devoir la traverser, c'est le passage le plus rapide pour se rendre à North-Erme, continua le félin tout en terminant son repas.

- C'est autorisé ? De traverser la Déchetterie, je veux dire.

Sciotus ne répondit rien, se contentant de lui adresser un sourire carnassier en guise de réponse et le blond roula des yeux - cela n'annonçait rien de bon.

Terminant son maigre repas, il se leva et essuya ses mains en les frottant contre de la neige fraîche, avant qu'ils ne reprennent la route, se dirigeant vers la fameuse Déchetterie. Plus ils avançaient sur un chemin de pierre glissant de givre, plus la forme du grand bâtiment se dessinait à l'horizon, cubique mais penché vers l'arrière, comme une maison sur le point de s'effondrer, surmonté de deux hautes cheminées si longues qu'elles ressemblaient à des cigares pointés vers le ciel. Alaska remarqua rapidement que l'odeur de feu et de résine de pin embaumait l'air, le rendant lourd, piquant et étouffant, comme du miel tombant au fond de sa gorge, alourdissant ses mots.