Les Champions des Sectes 2

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Il s'excusa platement et quitta la table, disant au revoir aux frères de zhī dào. Yin Lan lui courut après. Les autres restèrent dans la taverne, interdits. Xian croyait foncièrement à tous les mots prononcés, bien qu'ils offensaient le Seigneur. D'accord, ses phrases avaient dépassé la bienséance ; mais, il ne les regrettait pas. Il n'avait pas conscience d'à quel point il avait blessé le Seigneur de Hù lǐ.

Ce dernier subissait les critiques et il en avait l'habitude. Toutes les Sectes se moquaient ouvertement de la sienne et bien évidemment, ces paroles blessantes exprimaient tout haut ce que ses semblables n'admettaient pas. Hù lǐ s'affaiblissait d'année en année, glorieuse par le passé, mais seules les façades brillaient à présent. Le Patriarche détenait des dizaines de gardes dans chaque pièce de son Palais, des goûteurs s'assuraient de la sécurité de ses plats et il n'invitait presque personne dans sa demeure. Ce comportement laissait entendre qu'une défaillance existait bel et bien dans leur fonctionnement. Un jour viendra où ils se retrouveront au pied du mur, impossible de reculer.

— Ne vous formalisez pas de lui, implora le benjamin, conscient de la plaie qu'avait rouverte son frère. Cet idiot de Xian-Xian ne mesure jamais l'étendue de ses paroles, n'y pensez plus ! Il ne faut pas l'écouter, s'il vous plaît... Honnêtement, j'ai l'impression de redécouvrir mon frère ces derniers temps. Il est de mauvaise humeur et bougonne dès qu'il parle. Mais, en général, il n'intervient pas dans les discussions pendant les soupers. Cela m'étonne qu'il se soit autant exprimé. En fait, je ne me souviens plus d'une tirade aussi longue. Probablement avait-il un peu bu ?

Mais, le Seigneur ne se tempéra pas. En lui, une rage bouillonnait. Cette colère ne se dirigeait pas vers le Jeune Maître, mais vers sa propre Secte. En rentrant chez lui, après son combat contre le Bashe, les siens l'avaient traité en héros. Parce que, finalement, un homme de Hù lǐ brandissait une arme hors de leur territoire, se battait à l'unisson avec les autres Sectes et faisait quelque chose contre les démons, quelque chose d'important. Sa blessure l'avait décrédibilisé, néanmoins... Surtout en apprenant qu'il avait été le seul des quatre à revenir avec une plaie suintante. Ils avaient été déçus. 

Un désappointement qui ne dura pas. Après tout, personne ne pouvait lui en vouloir. Les serviteurs avaient jasé et les rumeurs s'étaient répandues ; un Jeune Maître de Zhī dào, l'héritier, lui avait sauvé la vie, parce qu'il avait été impuissant. Sa jambe se remémorait encore la douleur. Il avait boité durant des mois et avait toujours du mal à marcher correctement. Son membre ne guérirait pas.

— Cela compte-t-il si je vous demande pardon à sa place ? 

Cette voix. Loin d'un timbre fluet du benjamin. Hiwang sentit la présence nonchalante de cet héritier belliqueux dans son dos, et pouffa. Il pinça vigoureusement ses lèvres, ses larmes menaçant de couler. Il tenta en vain de contrôler un rire nerveux qui décontenança Yin Lan. Le Seigneur fit volte-face et dévisagea l'aîné avec toute la désinvolture dont il était capable, les orbes luisants d'humidité. Xian, sous les encouragements de ses frères, était sorti dans le but de réparer ses torts.

Son attitude hautaine se brisa à la vue de ce Seigneur, l'orgueil en morceaux. Yin Lan prit congé, regagnant la taverne, les autorisant à s'expliquer en face-à-face. Au milieu de ce Comptoir, arborant un sourire faux, Hiwang amorça un mouvement de retrait, ne tenant pas à une autre confrontation pour ce soir. Quelques pas en arrière qui furent suivis de plusieurs pas en avant de Xian. Comme si le Jeune Maître était lié à lui par un fil imaginaire.

— Pourquoi ? Pourquoi voulez-vous discuter plus longtemps avec moi ? Vous sentez-vous coupable ? Supportez-la, cette culpabilité. J'en ai marre de vos critiques. Je ne vous pardonne pas. 

Des mots qui réconfortèrent le Jeune Maître, en un sens. S'il était encore en mesure de pester contre lui, alors il avait une chance de s'excuser. Xian combla les mètres qui les séparaient et hésita à s'exprimer. Hiwang présuma qu'il lui demanderait pardon, ce que toute personne sensée ferait, mais il ne le lui permit pas. Impérieux, le Seigneur lui adressa un signe de se taire, puis il pivota et avança entre les échoppes, suggérant placidement à l'aîné de l'imiter, de le suivre en silence.

La fosse des LamentationsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant