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20. confiance.

Matthijs pousse un grognement désemparé en regardant son portable. L’écran affiche toute sorte de notifications, mais aucune ne provient de Annekee. La jeune femme n’a pas répondu à son message ce matin, et même s’il se doute bien qu’elle a une vie et d’autres obligations, cette situation le plonge dans un état de frustration intense. Sans dire qu’il est vraiment amoureux d’elle, Matthijs commence à éprouver des sentiments de plus en plus forts à son égard. En fait, le footballeur néerlandais a réellement envie que la jeune femme fasse partie de sa vie. 

Savoir que Annekee est dans une situation difficile, en détresse, et qu’il pourrait potentiellement faire quelque chose pour lui venir en aide le ronge depuis leur dernière rencontre. Matthijs revoit sans cesse son coquard, sa mine triste et son regard quelque peu éteint. Pourtant, à deux, ils seraient sûrement en mesure de trouver une solution, mais Annekee refuse catégoriquement de parler de ses problèmes. En dépit de son insistance, Matthijs est bien conscient qu’il peut pas la forcer à se confier à lui. Alors il a l’impression de faire face à un mur infranchissable, sans issue de secours et sans marteau pour construire un trou. 

Matthijs entre dans les vestiaires, le coeur lourd et la tête ailleurs. Ses coéquipiers et amis hurlent et dansent sur de la musique, tout en se changeant pour l’entraînement qui ne va pas tarder à commencer. L’Ajax Amsterdam affronte Heerenveen dans trois jours, alors les joueurs doivent se préparer au mieux pour cette rencontre. Matthijs salue ses compères avant de s’asseoir près de Frenkie, Donny et David. Les trois footballeurs discutent et rient, tandis que Matthijs fixe un point dans le vide. Comment pourrait-il aider Annekee ? 

— Matthijs ? 

La voix préoccupée de Frenkie le tire de ses pensées. Matthijs fronce les sourcils, avant de se mordre l’intérieur des joues. 

— Hé, les gars… Si vous saviez qu’une personne a des problèmes, et que cette personne comptait vraiment beaucoup pour vous, mais qu’elle refusait de vous en parler, qu’est-ce que vous feriez ? 

Donny arque les sourcils, assez surpris par sa question, pendant que David et Frenkie se tournent vers lui pour le dévisager un court instant en silence. Matthijs lève les yeux pour capter leurs regards, soupire ensuite devant leurs mines perplexes, puis passe une main enragée dans ses cheveux, les décoiffant allègrement au passage. Le jeune capitaine de l’Ajax se sent désemparé et inutile.

— Non, Matthijs maugrée finalement. En fait, rien, laissez tomber. 

— Déjà, Donny intervient tout de même, l’air plus grave qu’à son habitude. Si cette personne te raconte pas ses soucis tout de suite alors que vous êtes proches, faut pas que tu te dises que c’est pas parce qu’elle t’aime pas ou te considère pas. C’est juste sa manière à elle de gérer les choses pour le moment, je suppose.

Frenkie pose une main encourageante sur l’épaule de Matthijs, comme pour apporter un peu de réconfort à son meilleur ami. 

— Je suis d’accord avec Donny, pour une fois, Frenkie décrète sur le ton de la plaisanterie, avant de reprendre, un peu plus sérieux. Ça peut être frustrant, mais la meilleure aide que tu peux lui offrir actuellement, c’est de respecter sa volonté de pas vouloir te parler de ses problèmes. 

— Ouais, mon gars, David surenchérit en commençant à lacer ses crampons. Force pas, parce que ça risquerait de provoquer l’effet inverse : un repli sur elle-même et une sacrée dose d’engueulades. Laisse-lui du temps, tu verras que ça finira par aller mieux ensuite.

Sauf que Matthijs croit sincèrement qu’il ne faut pas garder ses problèmes pour soi—sinon ça pourrit la vie. Il conçoit toutefois que d’autres personnes aient besoin de se recueillir et de réfléchir seul pour mieux être en mesure d’appréhender les difficultés. Parfois, elles ont aussi besoin de temps pour poser des mots sur leurs maux. Mais dans le cas de Annekee, c’est inquiétant parce que Matthijs a un mauvais pressentiment. Après tout, il imagine que la seule source de son malheur—à part le décès de son père et ses relations tendues avec sa grande sœur—est le connard qui ose poser la main sur elle. 

Matthijs ne peut donc pas se permettre de lui laisser du temps. Parce que les heures qui passent où il n’est au courant de rien aggravent davantage sa situation, il en est persuadé. 

— OK, Matthijs souffle, lèvres pincée. Mais si sa vie est en danger, je fais quoi ?

— Alors sois d’autant plus patient, David hausse les épaules. Si elle estime qu’elle a pas besoin que toi ou que quelqu’un intervienne tout de suite, reste quand même à proximité au cas où. Insiste seulement si tu juges que c’est hautement nécessaire. 

— Elle me fait pas encore assez confiance, je sais pas comment agir pour l’aider à aller mieux, Matthijs désespère, les poings serrés sur ses cuisses.

Donny secoue la tête : 

— Je te redis, mec, c’est pas une question de confiance. Parfois, on a peur de la réaction des autres parce qu’on a honte de l’image qu’ils vont avoir de nous ensuite.

Matthijs accuse le coup. Peut-être bien que Donny a raison, que Annekee ne veut pas lui parler de ses problèmes parce qu’elle est effrayée à l’idée qu’il la considère comme une victime frêle, une faiblarde incapable de se défendre contre son oppresseur. C’est stupide—c’est la bête qui la bat qui devrait se montre honteuse—mais Matthijs est capable de se mettre à sa place. Frenkie se penche vers lui après quelques secondes : 

— Quand Annekee sentira que c’est le bon moment, Frenkie murmure, je suis certain qu’elle se tournera vers toi.