⚜️46. Le départ de Faral⚜️

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« Si vous arrivez à convaincre mon frère de m'accompagner, vous viendrez avec moi à Arleim, la capitale de mon royaume. »

Les mots d'Esperanza résonnaient encore dans la tête du poète : nouvelle vie, nouveaux paysages, nouveaux visages. Cette promesse allait lui ouvrir de nouveaux horizons et il trépignait d'impatience.

Il avait finalement réussi à trouver Klazi. Il s'en était fallu de peu pour le convaincre : dire qu'il l'admirait, satisfaire son égocentrisme, lui expliquer que Vergaï l'avait torturé et qu'il n'était plus le bienvenu. Enfin, il lui proposa de surveiller Esperanza pour lui et de devenir ses yeux et ses oreilles. Klazi avait immédiatement accepté, ne voyant en Faral qu'un pauvre petit poète qui n'aurait jamais une chance d'attirer le regard d'Esperanza sur lui, un sous-homme.

Après cela, le poète s'était enfermé dans sa chambre et avait commencé à écrire, sa passion le dévorant comme un monstre affamé. Il coucha sur le papier sa fièvre, s'enfermant dans son monde pour apaiser son cœur. Sa plume faisait des va-et-vient, son attention entière était consacrée à ces mots que son imaginaire lui faisait former, et peu à peu, tout ce qui l'entourait, allant des murs de la pièce jusqu'à la flamme de la bougie posée près de lui, disparurent. Il était seul. Avec ses mots et ses maux.

« Toile du peintre endormi
Intitulée « La Nuit »,
Tu me voles mon sommeil
Pour le donner au soleil.

Toile du peintre endormi,
Toi qui à ce point me nuit,
Tu m'arraches mon âme
Et la donne à cette dame.

Toile du peintre endormi
Ponctuée d'astres qui brillent,
Tu me souffles et m'amuse,
En devenant ma muse.

Toile du peintre endormi,
De toi je suis si épris,
Avec toi je peux rêver
Tout en étant éveillé.

Toile du peintre endormi.
Des poèmes tu écris
En vers et contre tout
Tes mots soignent ma toux. »

Sa plume s'arrêta et, pris d'une colère grandissante, Faral s'empara du papier, le déchira et frappa la table du poing. Il était mal, il sentait sa gorge se nouer, sa vue se peignant de noir et de blanc. Pourquoi fallait-il que cela soit aussi dur ? Pourquoi tant de faiblesses en lui ?

Nira avait été sa campagne de route pendant si longtemps, elle avait été là avec ses sourires, ses faiblesses et ses forces. Elle lui avait fait confiance malgré sa peur, elle l'avait accompagné et inspiré malgré tout.

Et il la trahissait ainsi. En partant.

Et pourtant, il n'arrivait pas à totalement se blâmer. Même le discours de Tar avait sonné creux, se répercutant dans ses oreilles pour en être éjecté.

Il voulait s'élever. Il voulait devenir grand. Il en avait le droit ! Il pouvait rêver de cela ! Ses rêves étaient si minimes par rapport à ceux des grands conquérants, ses rêves étaient en accord avec son expérience de la vie ! Il voulait de la grandeur, du respect, de l'honneur et de la puissance !

Il s'approcha de ses affaires, boucla le tout en très peu de temps, et attendit un serviteur pour s'en occuper.

Il allait partir. Pour de bon. Sa vie allait changer. Il lança un regard à son carnet de notes, un petit carnet noirci de ses poèmes quand il avait accompagné Nira. Il le prit entre ses doigts et encore une fois, sa gorge se noua.

Il l'aimait.

D'une certaine façon.

Assez pour avoir envie de verser une larme à l'idée de ne plus voir son visage. Qu'adviendra-t-il d'elle quand il partira ? Aura-t-elle son trône ? Épousera-t-elle Klazi ? Ou cette vipère répondant au nom de Vergaï ? Mourra-t-elle lors de son périple ?

The Frozen Throne : le royaume des démons blancsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant