Je m'en veux presque d'avoir laissé le coup de fil d'Isa gâcher ce moment que j'avoue avoir tellement apprécié que c'en est malsain.

— Ton baiser avait un goût de bolognaise, lâché-je subitement en regardant dans la même direction qu'elle.

Je la vois me regarder du coin de l'œil mais comme elle précédemment, je ne relève pas mon regard vers le sien. Je m'efforce de retenir mes lèvres quand elles osent se courber vers le haut.

— Je ne sais pas si tu as déjà embrassé quelqu'un avant, déclare-t-elle et je sens déjà le sarcasme dans sa voix, mais ce n'est pas très commun de décrire le goût propre du baiser. La prochaine fois, évites seulement.

J'aurais pu rétorquer avec autant d'aplomb et d'ironie mais juste lorsque elle évoque l'éventualité d'une « prochaine fois », je frissonne, perdant l'intégralité des phrases cinglantes à lui balancer que je m'étais préparée pour ce genre de moment.

— J'y penserais, souri-je en prenant bien soin de ne pas rencontrer son regard.

Mon cœur bat assez vite pour que je ne doive encore le mettre à l'épreuve.

Ensuite, lorsqu'on regarde l'écran toute les deux, je la sens se rapprocher de moi et mes hypothèses se confirment lorsqu'elle pose sa tête sur mon épaule. Elle semble retissante car je la sens tendue et maladroite donc comme si ça pouvait arranger les choses, j'attrape sa main dans la mienne en caressant le dos de celle-ci avec mon pouce. L'effet désiré est immédiat car je la sens se détendre et être assez à l'aise.

Nous sommes restées une bonne heure dans cette position à regarder ce film que j'ai finalement apprécié. A la fin du générique, nous étions toujours éveillée et je me sentais juste bien.

Sa chaleur, son odeur, le bruit de sa respiration, c'était presque devenue vitale, une sortes de drogue. Évidemment, j'ai peur. C'est une fille, c'est Abigail Walter, c'est mon ennemie. Je ne sais plus ce que je fais et ce que je dois faire mais je veux la laisser me guider parce que c'est si bon d'être avec elle.

— Tu veux regarder un autre film? demande-t-elle me sortant de mes pensées.

Je secoue la tête alors qu'elle soulève son regard vers moi et je ne peux m'empêcher de la trouver incroyablement mignonne sous cette angle.

— Qu'est-ce que tu veux faire alors? m'interroge-t-elle.

— On pourrait peut être parler, dis-je un peu hésitante.

Je ne connais pas Abigail. A part savoir qu'elle peut être une véritable peste quand elle en a envie et qu'elle est attirée par les filles, je ne sais rien d'elle. Elle ne parle jamais d'elle, de ses études, de sa famille, de ses passes temps, même quand nous sommes essentiellement entre amis.

Pourtant, elle se crispe à mes mots et prononce d'une voix incertaine :

— De quoi est-ce que tu veux parler?

— J'en sais rien, ris-je nerveusement en haussant les épaules. De toi, peut être.

Soudainement, elle quitte mon regard comme si elle était en danger, qu'elle essayait de fuir cette conversation et je me demande en quoi parler d'elle pouvait la rendre aussi vulnérable.

Sa main se sépare de la mienne et elle se lève en un rien de temps, quittant le plaid qui nous couvrait.

— Une autre fois, dit-elle en prenant bien soin de ne m'accorder aucun regard – je déteste quand elle fait ça, il fait une chaleur à en crever ici, je vais aller prendre l'air sur la terrasse.

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