𝐣𝐚𝐦𝐚𝐢𝐬 𝐬𝐞́𝐩𝐚𝐫𝐞́ • 𝐟𝐚𝐧𝐟𝐢𝐜𝐭𝐢𝐨𝐧

18

➰

Je descend les marches en bois de l'escaliers qui mènent au rez-de-chaussée et rejoint maman et George qui m'attendent. Aujourd'hui, nous fêtons noël. Cela me parait encore fou, tout est passé tellement vite.

J'enfile ma veste et mes bottes. J'enroule mon écharpe chaude autour de mon cou, prête à supporter l'hiver froid qui règne dehors. George porte un bonnet bleu, je ne compte plus le nombre de chapeau qui traîne dans son armoire. De mon côté, je n'en porte pas souvent, j'en pique quelques fois à George, lorsqu'il fait vraiment froid.

-Tout le monde est prêt ?

George et moi hochons la tête, impatient de partir.

-On peut toujours pas savoir où on va ? demande George.

-C'est Noël ! On garde la surprise !

Nous saluons papi et mamie, que nous retrouverons ce soir pour fêter Noël avant de partir. Nous montons en voiture, se demandant où peut bien nous emmener maman.
Nous arrivons après quelques minutes de route, dans une ville au bas de la montagne. C'est une assez grande ville où on trouve de nombreuses activités. Nous venons souvent ici pour manger au restaurant ou encore pour faire les courses. C'est une ville sympathique et animée, contrastant avec l'univers calme de la montagne.

Nous suivons maman jusqu'à un grand bâtiment. Lorsque nous approchons, je reconnais le cinéma de la ville. Je me retourne vers maman, des étoiles dans les yeux. Je n'ose pas m'imaginer que c'est ici qu'elle nous emmène, de peur d'être déçue. Nous allons tellement rarement au cinéma que c'est pour moi magique de pouvoir assister à une séance.

-Nous sommes arrivés, annonce celle ci avec un sourire.

George et moi lui sautons dans les bras, heureux comme jamais. Cela ne se voit pas forcément de l'extérieur, mais maman a de nombreux problèmes d'argent. Nous avons donc vécu depuis notre enfance dans un confort restreint. Nous avons toujours eu ce dont nous avions besoin, grâce à papi et mamie qui aidaient, nourriture, habits, fourniture pour l'école... mais jamais plus. Grâce à cela, nous avons appris à vivre avec ce que nous avions, et profitons de chaque occasion.
Pour maman, c'était compliqué. S'occuper de jumeaux seule, ce n'était pas chose simple. Car jumeau signifiait deux fois plus de nourriture, d'habits, de meubles aussi... Et de temps, beaucoup de temps. Mais elle n'a pas laissé tombé, elle s'est battu. C'est un véritable exemple pour nous. Et même si elle est souvent assommée de travail, nous savons que tous les efforts qu'elle fait sont pour nous, pour nous permettre la meilleure vie possible.

Avoir la chance d'aller au cinéma est pour moi un cadeau inespéré. Nous entrons et achetons nos places, impatient comme deux enfants. La salle est immense, les fauteuils rouges nous attendent. Nous nous installons au milieu, ni trop loin ni trop près de l'écran. George reste silencieux à côté de moi, concentré sur l'écran, sourire aux lèvres. Je prend mon téléphone et attire leur attention. Je prend une photo, pour ne pas oublier. Ces moments qui peuvent paraître futiles mais qui sont magiques si on les vit comme si c'était les derniers. J'ai appris à profiter, à me rappeler, à immortaliser tous ces moments qui passent.
Et quand je me demande pourquoi je suis différente, pourquoi je ne m'intéresse à aucun garçon, pourquoi je n'ai pas de but dans ma vie, je regarde ces photos, ces sourires, ces souvenirs et je me rappelle.
Je me dit que j'ai de la chance, car j'ai une famille, une vie modeste. Et je pense à tous ceux qui n'ont pas cette chance, qui frissonnent dans les rues, cherchant où se réfugier, ceux qui travaillent pour tenter de survire, ceux encore qui sont né handicapé, malade et tous ceux qui meurent d'un accident, toutes ses personnes courageuses pour qui chaque jours est un combat et qui, jamais, ne se plaignent. Je pense à eux et je me dit que, oui, j'ai de la chance.
Alors je profite simplement, je profite pour tous ceux qui rêveraient d'être à ma place.