Chapitre 9

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(Tom)

Dimanche soir, j'ai appris que Gabrielle était interne. Une chose qu'elle s'était bien gardée de me dire. Peut-être qu'elle voulait mettre un peu de distance entre nous, car nous avions parlé tout le week-end. J'ai appris aussi que ses parents étaient séparés. Les miens sont toujours ensemble, et je n'en espère pas moins ! On avait longuement parlé de la colère qu'elle entretient, chaque jour un peu plus, envers son père.

C'est fou, mais je ne pensais pas qu'une si gentille personne, et aux allures inoffensives, puisse renfermer autant de colère, de haine, de mal en elle. On avait parlé tard dans la nuit ce fameux dimanche soir

- J'ai du mal à comprendre la haine que tu portes envers ton père...


- Je vais essayer de mettre des mots sur ce que je ressens, pour que tu puisses comprendre la relation que j'ai avec lui alors.


- Oui si ça ne te dérange pas...


- Je regrette le père que j'avais petite, mais je hais celui qu'il est devenu. Pour moi, ce n'est pas le même homme. Mais c'est difficile à comprendre pour ceux qui ne savent rien de l'histoire, comme toi.


- Explique-moi alors, j'ai tout mon temps.

Elle m'avait expliqué toute l'histoire. Elle avait raconté toute cette histoire qui la faisait souffrir, des mensonges de son père, jusqu'à ses trahisons. Sans oublier aucun détail, aucune date. Elle se souvenait de tout, comme si son cerveau avait été programmé pour se souvenir de tout, comme si sa vie en dépendait. Cela la bouffait de l'intérieur, elle se détériorait, mais n'en parlait à personne. J'avais réussi à la cerner, et ma plus grande surprise a été lorsque j'ai découvert qu'elle ne parlait que très peu de ses soucis, de ses malheurs, de ses amours, enfin de toute ces choses qui constituent votre vie. Lorsque je lui avais demandé pourquoi elle parlait si peu d'elle, de sa vie, elle m'avait répondu, mot pour mot : Je ne veux pas que les gens aient pitié de moi. C'est une des choses que je déteste le plus, la pitié. Ses paroles m'avaient laissé perplexe pendant un petit moment. Mais je savais que la routine de la semaine allait changée, avec elle.

Alors que je suis allongé, me demandant comment se passerai ma journée du lendemain, je repense à ce qu'elle m'a dit. C'est étrange, une fille comme ça. Celles que je connais sont complètement différentes. Il faut qu'on s'intéresse à elles, car elles existent uniquement comme ça. Elles ont besoin de l'attention de tout le monde. Mais pas elle. Justement, elle préférait ne pas en avoir du tout. C'était comme si cela la répugnait. C'est décidé, je m'intéresserai à elle dès demain.

Elle m'intrigue énormément, j'ai envie de tout savoir d'elle, de sa pire honte, à l'histoire de son premier amour. De savoir si elle est capable d'aimer quelqu'un. D'apprendre tout, d'être incollable sur sa vie. De pouvoir déchiffrer ses réactions, et même les prévoir. Est-ce que je la reconnaîtrais si jamais je la croisais dans les couloirs ? Je réfléchissais à tel point que mon cerveau était au bord d'exploser, lorsque je me suis endormi.

Un Doux Matin D'HiverWhere stories live. Discover now