Ses conséquences

206 19 14
                                    

Andréas,

Aujourd'hui.

Elle est partie. Elle méritait que je lui accorde cette chance. J'opère pour la justice et plus rien ne m'oblige à la retenir aujourd'hui.

Plus rien d'officiel.

C'est elle la victime dans tout ce merdier. Cependant, cette dernière phrase ne cesse de tourner dans ma tête. Elle me l'a lancée comme ça, avant de s'éclipser sans se retourner. Elle aurait simplement pu prendre les clés et s'enfuir en courant, comme l'aurait fait n'importe qui à qui on offre la liberté après tant de souffrances. Elle aurait pu m'insulter, me dire à quel point j'ai gâché sa vie. Mais non, elle s'est juste contentée de me dire qu'elle ne m'en voulait pas, car je la rendais... vivante.

Je ne comprends pas, elle devrait réagir autrement. Bien sûr qu'elle devrait. Ça doit être quelque chose comme le syndrome de Stockholm ou quelque chose dans ce genre-là. Je ne vois pas ce que ça pourrait être d'autre. Il est impossible que j'aie apporté, quelque chose de bien, à cette fille.

Cette fille...

Je dois rentrer et dormir. La fatigue prend le dessus sur ma raison et je réfléchis un peu trop à mon goût. Il me reste quelques minutes de marche avant d'atteindre la villa. Je vais dormir et demain matin, je retournerai au domaine en bécane. J'ai de nombreux dossiers à rouvrir. Il faut que je retrouve ce William et m'assurer qu'il cessera de chercher Carla. Mais je dois également comprendre les failles qui ont permis à Rory de me retrouver et de me percuter. Il savait que j'étais sur le chemin de l'aéroport, donc je dois découvrir comment il connaissait ma position ce jour-là.

Je me lève et trinque avec la bouteille de Rhum en direction de la maison de Jon.

- Je reviens vite mec, ta fin est pour bientôt. Profite bien de ta vie de merde.

Je profite de la mienne.

Le visage de Carla ne cesse de me marteler l'esprit durant le trajet. Je ressens un vide que je n'avais pas prévu. Ses paroles m'ont fait éprouver des choses que je n'avais pas anticipées non plus. En réalité, je ne savais pas comment les décrire ni trouver les mots pour exprimer l'impact qu'elle a sur moi. Elle l'a fait à ma place. Elle m'a fait prendre conscience que moi aussi, j'étais plus vivant depuis un certain temps. Il a fallu qu'elle s'en aille et qu'elle me lance ses derniers mots pour que je le comprenne.

Mais merde, je me ramollis là. Je dois me faire une raison. Il n'y avait aucune excuse valable pour la garder avec nous. Elle ne fait ni partie de l'unité, je n'ai plus de mobile pour la retenir et la mission '' Carla Rivera '' est clôturée. Comme on le dit, choisir implique de renoncer à certaines choses. Quand j'ai signé ce contrat d'entrée dans l'unité, j'ai accepté d'abandonner certains aspects de ma vie. Je savais que mon mode de vie sociale serait différent de celui du commun des mortels. Je savais aussi que je deviendrais un aimant à problèmes et que je ne pourrais plus penser uniquement à mon propre intérêt. Je dois toujours penser aux autres avant moi.

Carla n'était qu'un contrat pour moi. Rien de plus. Il faut que je me le foute dans le crâne. Je ne dois pas être "vivant", je dois rester celui que tout le monde craint. Je suis un tueur. Un putain de tueur. Je prends la vie des gens, car c'est ma mission, ma nature.

Car j'en ai besoin.

Carla m'empêche de rester celui que je dois être.

Cela vaut mieux pour tout le monde et de toute manière, elle n'est plus là. J'ai entendu le bruit des pneus crisser, elle a démarré rapidement et doit déjà se trouver à plusieurs kilomètres d'ici.

Gazelle    [ Darkromance ] Where stories live. Discover now