27. AU REVOIR, BÉBÉ CHIEN

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J'ai besoin d'un peu de temps loin de Pablo. Quelques heures, rien de plus. J'ai besoin de m'éloigner de ses accès de colère et de toutes ses émotions déroutantes. Juste une sieste, juste quelques bouffées d'air, sans papillons dans le ventre ni ouragans dans le cerveau.

J'ai besoin d'un peu de temps pour réfléchir, avec l'esprit clair et sans distractions. Il me reste encore quelques détails à peaufiner sur le plan que je viens d'expliquer à Gustavo.

On sait tous que Juan se méfie de moi, mais pour notre bien à tous, on peut pas le laisser découvrir l'histoire de mon enlèvement.

Et donc, j'ai décidé, je vais lancer un grand leurre pour ce gros thon.

Je vais me passer de retourner à l'écurie pour finir ma leçon d'équitation. Au lieu de ça, dès que je sors du bureau de Gustavo, je me précipite dans ma chambre. Je monte l'escalier quatre à quatre, les sourcils froncés, le menton baissé, déjà concentrée et trop occupée à penser à comment je vais résoudre les moindres failles de mon plan.

"Salut, Bébé Chien," s'exclame Oso quand il me voit foncer dans le couloir.

"Hey Big Papi," je réponds, reprenant mon souffle après ma course folle jusqu'au troisième étage. "Tu peux me faire une faveur ? Fais en sorte que personne n'entre dans ma chambre. Surtout pas Pablo."

"C'est la maison de Pablo," dit-il en fronçant les sourcils, "Je peux pas dire non."

"On s'en fout," je gémis. "Empêche-le de rentrer. Dis-lui que je suis toute nue ou quelque chose comme ça. Ça devrait marcher."

Je ferme la porte derrière moi et respire profondément. J'entre dans la lueur dorée d'un rayon de soleil, et je me laisse sourire et soupirer.

Je suis intelligente, je peux réussir, je vais survivre et partir loin d'ici. J'ai en tête un plan génial, un plan parfait. Je vais lui faire croire qu'Emilia Kovács est une espionne infiltrée.

Je suis une espionne infiltrée, parce c'est le seul moyen d'expliquer pourquoi je cache ma véritable identité. Et par ce mensonge, j'éloigne tout le monde de la vérité que j'ai en fait été kidnappée.

Ma cible ? Juan Sandoval. Non seulement c'est qui avait le plus de soupçons, mais c'est aussi probablement la seule personne au monde qui est assez stupide pour y croire.

Le plan semble un peu con au départ, peut-être même complètement fou, mais avec un peu de prudence et beaucoup de préparation, je suis à peu près sûre que ça peut fonctionner. Parce que même si le fait d'être une espionne infiltrée ferait de moi une menace, je sais qu'en tant que petite amie de Pablo, je suis intouchable– du moins par les Sandoval.

Le mieux que Juan puisse faire, c'est d'avertir Pablo lui-même, et comme Gustavo me l'a dit, ça, c'est déjà fait. Ensuite, l'équipe de Pablo peut me couvrir. Ils n'ont qu'à lui dire qu'ils se pencheront sur le sujet, histoire de le faire attendre un peu, et mon secret serait en sécurité pendant au moins deux semaines.

Ensuite, ils pourront lui mentir, en disant que grâce à son tuyau, ils ont découvert que je suis en effet une sorte d'espion, mais qu'ils peuvent se servir de moi pour fournir de fausses informations aux services secrets.

Ils lui diront de garder le silence, de ne pas me mettre au courant que l'équipe de Pablo a découvert cette vérité fictive sur moi. Ça l'empêcherait d'éveiller les soupçons des autres, et me laisserait tranquille pendant au moins deux mois. Et puis...

Et puis...

Et puis, ce qui suit, c'est ce qu'il me reste à décider.

Plus j'y pense, plus je me rends compte que j'ai encore beaucoup de petits problèmes à résoudre dans mon plan. Je sais même pas comment convaincre Juan que je suis une espionne. C'est pas comme si je pouvais lui dire en face que j'en suis une, ça serait trop gros. J'ai besoin de jouer un rôle, mais comment ?

Drogues, Trahisons et Autres DémonsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant