CHAPITRE 22 - Loup

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LOUP

Mardi 18 juillet 2017
Las Vegas, États-Unis


   Le lendemain matin, je traîne au lit, appréhendant la discussion avec mon père. Finalement, c'est lui qui vient à moi en fin de matinée.

   — Bon, commence-t-il.

   Son ton est moins sec qu'hier, mais je l'observe depuis le fond de la pièce, le dos voûté, prêt à subir sa colère.

   — J'ai réussi à tout arranger avec l'équipe. Ils ont dit aux fans qu'un incident technique s'est produit et que vous êtes désolé. Je pense que ça devrait suffire pour étouffer toute cette affaire.

   Je l'écoute sans intervenir, attendant le moment où il va hausser le ton, mais il se retourne déjà vers la porte.

   — C'est tout ? je demande, surpris.

   — Oui, c'est tout.

   — Je peux retourner au tour-bus alors ?

   — Pas encore. Je te veux le plus loin possible de ce garçon pendant que je règle cette histoire.

   — Saïd ? Quelle histoire ?

   — Une fois qu'il sera parti, tu pourras rejoindre tes amis, lâche-t-il avant de quitter la chambre et de refermer la porte derrière lui.

   Je reste assis sur le lit, les bras ballants, le visage décomposé. Comment ça « une fois qu'il sera parti » ? Les pas de mon père dans les escaliers ma ramènent à la réalité et je bondis pour me lancer à sa poursuite.

   — Tu ne peux pas faire ça ! je hurle.

   Ma voix résonne dans la cage d'escalier tandis que je dévale les marches.

   — Je t'en supplie papa, laisse-le tranquille.

   Les mots sortent de ma bouche à toute vitesse, ma voix est aiguë, implorante. Jamais je n'aurai imaginé supplier mon père un jour, mais si je dois le faire, c'est forcément maintenant.

   Ma mère apparaît depuis la cuisine, alertée par mes cris et je me retrouve perché sur la première marche des escaliers au moment où mon père saisit son manteau. Ses chaussures déjà aux pieds, il est prêt à partir et son indifférence me met hors de moi.

   Je me lance vers la porte et place mon corps devant pour lui barrer le passage. Il me repousse d'une main ferme, le regard loin au-dessus de moi. Je ne lâche pas et le suis pieds nus jusqu'à sa voiture, le suppliant de renoncer. Mais il continue de m'ignorer, comme à son habitude.

   — Je ferais tout ce que tu veux !

   Toujours aucune réaction.

   — Si Saïd part, je quitterais le groupe.

   Il se fige, à moitié installé derrière son volant, avant d'enfin se tourner vers moi.

   — Ce garçon est en train de détruire ta réputation et la mienne au passage. C'est comme ça que tu veux que les gens te voient ? Il te fait passer pour un pédé devant le monde entier et tu crois que je vais le laisser faire ?

   Sur ces mots, le moteur se met en route et la voiture quitte l'allée dans un crissement de pneus qui me fait mal aux dents.

   Les mots crus de mon père me frappent en pleine poitrine, mais venant de lui, ils ne font pas si mal. Cette douleur n'est rien comparée à ce que j'ai pu ressentir le jour où j'ai été confronté à son homophobie pour la première fois. Enfin, il avait déjà sûrement prononcé de telles paroles devant moi avant ça, mais c'était la première fois qu'elles étaient dirigées sur moi.

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LE JOUR OÙ LES ÉTOILES ONT CESSÉ DE BRILLERWhere stories live. Discover now