Chapitre 40 : Le guérisseur

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Leurs grands-parents arrivèrent sur les lieux du drame les derniers. Sa grand-mère poussa un cri et porta une main à son front quand elle vit son fils à nouveau humain et le sang autour de lui. Elle vacilla et son mari la rattrapa avant qu'elle tombe à la renverse. Trop choquée pour parler, elle resta dans les bras de son époux sans détourner les yeux du corps balafré de Maximilien. Thérance se remit du choc le premier. Il lâcha son épée qui tinta avec un vacarme d'acier et essuya ses mains sanglantes sur son pantalon. De grosses gouttes de sueurs perlaient à son front et il était pâle comme la mort. Il s'adressa à eux d'une voix rauque :
- Je...Je ne voulais pas.
Ces mots brisèrent l'état végétatif de Wilhelm. Il marcha jusqu'à son jumeau et l'empoigna par le col, hors de lui.
- Tu ne voulais pas ? Tu ne voulais pas ?! Je t'ai dit de ne pas le faire ! Je t'ai dit que tu blesserais quelqu'un ! Tu n'as rien écouté ! Tout est de ta faute !
Une larme glissa sur la joue de son frère mais sa fureur l'empêcha de ressentir la moindre once d'empathie.
- Ce n'est pas ce qui devait se passer...
- Ah oui ? Et alors quoi ? Tu comptais tuer l'enchanteresse ? Est-ce que tu es aussi stupide ? Je me fiche de ce que tu voulais ! Regarde ce que tu as causé avec ta manie de vouloir jouer au héros !
- Wilhelm arrête, dit doucement son père.
Mais Wilhelm refusait de s'arrêter. Il ouvrit les vannes et déversa le flot de sa haine sur son jumeau en espérant le noyer :
- Tu n'es qu'un sale égoïste qui ne pense qu'à lui ! Tu fais le mal autour de toi et tu considères ça comme de la bravoure ? Qu'est-ce que tu cherches à prouver Thérance ? À quel point tu es bon, fort et preux ? Tu penses que ta naissance dans une famille aussi « héroïque » que celle des Rosenwald te donne le droit de verser le sang, de causer la souffrance des autres pour ta gloire personnelle ? Si tu penses comme ça Thérance alors c'est que tu es pourri jusqu'à la moelle. Tu as ta place aux côtés de ceux que tu hais le plus !
- TAIS TOI ! hurla son frère en roulant des yeux fous.
La douleur qui transperça le côté droit de Wilhelm le fit crier. Tout s'était déroulé en un battement de cil. Thérance avait plongé sur l'épée et il venait d'entailler son jumeau juste en dessous des côtes, d'un geste circulaire de la lame. Wilhelm porta la main à sa plaie et la retira écarlate. Est-ce que c'était bien son sang ? La douleur paraissait si lointaine...
Alors que son père arrachait l'épée des mains de son frère et le giflait comme il ne l'avait jamais fait auparavant, Wilhelm remonta son tee-shirt. La blessure était nette mais peu profonde. Pourtant, le sang qui en coulait l'effraya. Il pressa sa main contre sa chair balafrée pour stopper le saignement et grimaça.
Thérance avait le regard vitreux, comme si son âme l'avait quitté et qu'il ne restait qu'une coquille vide. Un frisson hérissa l'échine de Wilhelm. Son jumeau, le double de lui-même, venait de le blesser. C'était autre chose que les coups de poings ou les insultes. Si Thérance avait mieux visé...
- Vous êtes devenus fous ! s'exclama leur père en les regardant à tour de rôle.
Thérance baissa la tête comme un enfant prit en faute mais Wilhelm conserva son port de cou droit. Il avait lutté toute la journée pour empêcher cette tragédie et il avait échoué. Il se remémora l'enchaînement des événements de ces dernières heures et se demanda ce qu'il aurait pu faire différemment pour éviter cette catastrophe.
S'il avait été honnête dès le départ, est-ce que son jumeau aurait avorté ses projets ? S'il lui avait révélé la vérité et l'étendue de ce qu'il savait, est-ce que Thérance aurait fait demi-tour ? Mais on ne refaisait pas le monde avec des hypothèses. C'était trop tard : le conte s'était accompli. Et maintenant ? Comme les autres il ignorait ce qui se produirait dans les heures à venir. Sans ses contes pour le guider, il était aveugle.
- Le guérisseur pourrait nous aider, intervint Henri à voix basse.
Jonas réfléchit avant de hocher la tête.
- Montez dans la voiture, ordonna-t-il à Wilhelm et Thérance. Si vous vous battez, je peux vous assurer que vous recevrez une punition dont vous vous souviendrez jusqu'à la fin de vos jours.
La colère vibrait dans sa voix et les deux garçons s'en allèrent sans protester. Wilhelm marchait moins vite que son jumeau à cause de sa blessure. La douleur augmentait peu à peu et chaque inspiration devenait un enfer. Quand Thérance voulut l'aider, il l'esquiva. Il lui en voulait terriblement : sa rage lui brûlait le ventre et compressait sa gorge comme un étau. Il rêvait de hurler et de cogner mais pas maintenant : Maximilien était la priorité.
Ils s'installèrent à l'arrière de la voiture, à l'opposé l'un de l'autre. À présent Wilhelm n'en doutait plus : son frère avait les tripes de le pousser dans un puits sans fond. Il commençait à prendre conscience que ce moment arriverait tôt ou tard et qu'il ne pourrait pas y échapper. Il se concentra sur la douleur de sa blessure plutôt que sur son destin incertain.
Leurs grands-parents montèrent dans une autre voiture avec le corps de Maximilien. Ils roulèrent vers le centre-ville et s'arrêtent devant une petite maison avec un crépit grisâtre, coincée entre un magasin de pêche et une boutique de lingerie fine. Le lieu manquait d'entretien et n'avait rien d'accueillant. Des herbes hautes colonisaient la minuscule parcelle de jardin, la peinture bleue des volets s'écaillait et quelques fissures lézardaient la façade. Leur père et Henri portèrent Maximilien avec mille précautions tandis que leurs grands-parents sonnaient et toquaient contre la porte.
- Ouvrez ! hurla Madeleine d'un ton impérieux rendu hystérique par la panique. Ouvrez !
À ce rythme, elle finirait par réveiller tout le quartier mais Wilhelm aurait employé la même méthode à sa place. Une lumière s'alluma à l'étage et, après une entente infernale, la porte s'ouvrit enfin.
Wilhelm ne s'attendait pas à ce que Léonard Longus soit le propriétaire de ladite maison. L'infirmier portait un jogging et un tee-shirt informe orné du logo d'un quelconque groupe de rock. Il passa une main dans ses cheveux relâchés qui lui tombait aux épaules. Les cernes noirs sous ces yeux encore plus sombres lui donnaient une apparence presque cadavérique. C'était lui, le guérisseur ?
- C'est quoi ce boucan ? On peut plus dormir tranquille dans cette ville de malheur ?
- Nous avons besoin de vos services monsieur Longus, dit leur grand-père d'un ton autoritaire.
- Votre prix sera le nôtre, ajouta leur grand-mère.
L'homme leva les yeux au ciel et grogna :
- Mon prix c'est bon vent et foutez-moi la paix.
- Monsieur Longus ! intervint Wilhelm.
Une lueur passa dans les yeux ternes de l'infirmier.
- Tiens, tiens, mon petit épileptique préféré. Qu'est-ce que tu as au ventre ? Tu t'es blessé pendant une de tes crises ?
- Ce n'est pas pour moi que nous sommes là mais pour mon oncle, expliqua Wilhelm. Il a été blessé par...une épée.
Il mobilisa toute sa bonne volonté pour ne pas dire « par Thérance ». Son frère avait eu son compte pour la soirée et la culpabilité qui l'étoufferait bientôt serait une punition suffisante.
- Il a besoin de soins, insista le jeune homme.
- Tu peux entrer avec Henri et Jonas. Mais les autres attendent dehors et en silence.
Sa grand-mère ouvrit la bouche pour protester mais son mari la prit de vitesse :
- Nous ferons selon votre bon vouloir, monsieur Longus.
Jonas et Henri portèrent Maximilien dans la maison du guérisseur. Wilhelm ferma la marche en pressant sa blessure, de laquelle le saignement s'estompait. L'infirmier fit claquer la porte derrière eux en grommelant des mots incompréhensibles dans sa barbe. L'intérieur contrastait avec l'extérieur. Tout était propre, bien rangé et rien ne dépassait, comme si un maniaque de la propreté était passé ici.
- Enlevez vos chaussures puis posez-le sur la table, ordonna Léonard Longus.
Il quitta la pièce pendant que Jonas et Henri s'exécutaient. Wilhelm s'interrogea sur le côté attribué par les Grandes Roues à l'infirmier. Plutôt héros ou antagoniste ? Difficile à dire. Il travaillait dans un établissement réservé à la progéniture des plus viles créatures de contes mais il acceptait d'aider le sommet de la hiérarchie des protagonistes. Cependant, il avait refusé que ses grands-parents posent un orteil chez lui. Qu'est-ce que ça signifiait ?
- Si tu n'étais pas intervenu en notre faveur, nous ferions toujours le pied de grue devant chez lui, soupira Henri. Longus est dur en négociations.
- Pourquoi ? Il est du côté obscur de la force ? se moqua Wilhelm.
- Donc tu es aussi au courant pour ça, dit son père avec désolation. Non, Longus est de notre côté. Sa femme et sa fille l'étaient aussi. Mais son allégeance a changé après un tragique accident dont les détails nous sont inconnus. La rumeur raconte qu'un sort que sa femme a lancé à la demande d'un homme puissant de notre camp aurait mal terminé. Il se serait retourné contre elle, porteur d'une malédiction qui l'aurait touché, ainsi que sa fille. Elles ont été transformées en monstres incapables de supporter la lumière du jour ou leur reflet dans un miroir. Depuis, elles vivent dans la cave sans jamais en sortir.
Comme pour confirmer ses dires, des grattements sourds résonnèrent sous leurs pieds. Wilhelm en eut la chair de poule. Dans un nombre incalculable de ses contes, la magie devenait une puissance dangereuse, un outil destructeur entre des mains inexpérimentées. Il comprenait mieux pourquoi l'infirmier de Charles Perrault semblait crouler sous le poids de l'existence. Depuis combien de temps sa famille était-elle maudite ? Il osa demander, pour détourner son attention de cette histoire déprimante :
- Et moi ? Qu'est-ce que je suis ?
Son père partagea un long regard avec son vieil ami qui répondit :
- Nous l'ignorons. J'ai tiré les cartes à ton sujet de nombreuses fois mais elles ne révèlent rien.
- Ce n'était pas le sens de ma question. Moi, qu'est-ce que je suis pour vous ?
Léonard Longus revint avec une sacoche en cuir avant que les deux hommes puissent s'exprimer. Il s'installa au chevet de Maximilien et débuta son travail en silence. Ses mains gantées prenaient toutes sortes d'outils qui n'avaient rien de chirurgicaux. Leur odeur piqua les narines de Wilhelm et il devina la magie prisonnière à l'intérieur. Le guérisseur passa une étrange pierre translucide veinée de rouge sur la blessure de Maximilien. Le cristal vira au bleu saphir et il déclara :
- Les organes sont intacts même si la plaie est profonde : le pire est évité. À quelques centimètres près, la lame aurait pu lui transpercer le ventre et les intestins. Wilhelm, arrête de te tourner les pouces et donne-moi un coup de main.
Wilhelm se retrouva à jouer les assistants. Il ne faisait que tendre des objets au guérisseur à l'aide de sa main libre, l'autre toujours pressée sur son entaille. Cependant, à la fin de son opération, Léonard Longus déclara :
- Tu te débrouilles comme un chef gamin. Tu as déjà songé à devenir médecin ?
Wilhelm haussa les épaules, plus accaparé par la cicatrice sur le corps de Maximilien que par les propos de l'infirmier. La blessure hideuse n'était plus qu'un mauvais souvenir et une ligne blanche à peine visible la remplaçait. Le guérisseur n'avait utilisé rien d'autres que des crèmes, des herbes et des pierres aux teintes improbables. Qui sait de quels miracles la médecine moderne serait capable avec de la magie ?
- Maintenant à ton tour, déclara Longus en l'empêchant de réfléchir à la question plus en détail. Pour une fois qu'on t'emmène à moi pour autre chose que des malaises...
Wilhelm remonta son tee-shirt : sa blessure ressemblait à une égratignure comparée à celle de son oncle. Il évita de trop la regarder, dégoûté par le sang et l'odeur métallique qui s'en dégageait. Il laissa la magie du guérisseur œuvrer et le soulagement le gagna à mesure que la blessure refluait. Il sentit sa peau tirailler et gratter à cause de sa cicatrisation rapide. À la fin, l'entaille n'était plus qu'une petite balafre pâle de quelques centimètres de long.
Léonard passa une main sur son visage amaigri. Les deux guérisons successives l'avaient épuisé. Sous le plancher, des bruits plaintifs s'élevèrent. Un éclair de souffrance traversa le regard de l'infirmier et il se ratatina sur sa chaise.
- Partez, dit-il.
- Et votre paiement ? demanda Henri.
- Gardez votre sale argent. Ce n'est pas de lui dont j'ai besoin.
Jonas et Henri soulevèrent délicatement Maximilien, dont la pellicule dorée se délitait peu à peu. Ils franchirent le seuil mais, quand vint le tour de Wilhelm, les bruits en provenance de la cave redoublèrent d'intensité. Des craquements retentirent et Léonard bondit de sa chaise, abasourdi.
Il y eu un raclement rapide de griffes contre du bois accompagné d'un son de cavalcade et la bête explosa la porte de la cave. Elle roula dans la cuisine et se redressa en s'ébrouant. Léonard demeura interdit, le teint cendreux. La mâchoire de Wilhelm se décrocha.
La créature faisait la taille d'un poney mais elle avait la taille fine et la démarche d'un félin. Son corps tout en plaques et en écailles luisait d'un noir huileux. Ses longues pattes se terminaient par cinq doigts garnis d'une griffe recourbée et épaisse. Sa queue de crocodile traînait au sol et s'agitait de droite à gauche avec lenteur. Son faciès allongé ne ressemblait en rien à celui d'un humain. C'était un croisement entre un tigre à dents de sabre et un serpent. Ses yeux argentés aux pupilles fendues se braquèrent sur Wilhelm. Il devina que c'était lui qu'elle voulait. La créature approcha, tapie au sol.
- Mon amour, l'appela Léonard dont le visage n'exprimait plus que de la souffrance.
- Wilhelm, sors d'ici ! cria son père, paniqué. Sors !
Il ne l'écouta pas. La bête s'assit à deux pas de lui et tendit sa patte griffue dans sa direction. Elle attendait, tranquille, son corps musculeux relâché et la tête penchée sur le côté dans une interrogation muette. Malgré les ordres qui lui sommaient de fuir, de s'écarter, Wilhelm combla le dernier mètre qui les séparaient. Ce n'est pas la peur qui le faisait frémir mais la curiosité. Il referma sa main sur la griffe polie.
Quand la vision l'assaillit, il était prêt. Cette fois, il ne s'écroula pas. Il sentit sa pensée se faire aspirer par un trou noir et flotta dans cet espace que plus aucune loi naturelle ne régissait avant que la scène s'impose à lui dans un flash lumineux.
Il se tenait au centre dans un salon qui ne manquait pas d'opulence. Le luxe se lisait partout grâce au mobilier et aux œuvres d'art disséminés dans la pièce aux murs lambrissés. Un homme aux cheveux roux avec un verre d'alcool dans la main faisait face à une cheminée éteinte et tournait le dos à une femme aux yeux gris et aux cheveux châtains coupés en carré. Il devina qu'il s'agissait de la femme de Léonard. Son visage en sueur transpirait un étrange mélange de dégoût, de peur et de fierté. L'homme, dont il ne distinguait pas les traits, demanda d'une voix sévère :
- C'est fait ?
- Oui...J'ai réussi. Elle l'a.
- Et l'autre ?
- Je pense que l'opération l'a...dépouillé.
Elle prononça ce mot avec difficulté et gagna une teinte de blanc. L'homme ne lui fit pas l'honneur d'un regard et déclara :
- Prenez votre argent et partez. Rappelez-vous notre engagement : personne ne doit savoir. Si jamais vous ouvrez la bouche, les représailles seront lourdes de conséquences pour votre famille.
La femme du guérisseur hocha la tête et sortit de la pièce en hâte. Alors qu'elle traversait les rues pour regagner son foyer, elle se mit à pleurer, le corps parcourut de tremblements nerveux.
- Qu'est-ce que j'ai fait ? Qu'est-ce que j'ai fait ?!
Soudain, elle s'agrippa le ventre à deux mains et tomba à genoux. La stupéfaction se grava sur son visage. Elle convulsa sur le bitume, seule dans la nuit noire. Ses os craquèrent et sa peau ondula comme si des serpents vivants rampaient sous sa chair. Son cri se mua en rugissement alors que ses cheveux tombaient et que des griffes remplaçaient ses ongles. Elle se cambra et un craquement résonna au niveau de sa colonne vertébrale alors que son épiderme se durcissaient. Wilhelm détourna les yeux de ce spectacle, l'estomac retourné. Quand la métamorphose s'acheva, il ne restait plus rien d'humain chez la femme de Léonard Longus.
Elle hurla dans la nuit à la manière d'une bête blessée. Autour de Wilhelm, le décor partit en fumée. La créature s'éteignit en dernier. Seul dans le noir, il se retrouva face à la personne encapuchonnée. Celle-ci leva la paume, dans laquelle miroitait l'image de l'homme aux cheveux roux et au visage inconnu, de dos.
- Il est la fin de leur monde et le début de notre ère, chuchota-t-il.
Wilhelm réintégra la réalité aussi brutalement qu'il l'avait quitté. Rien n'avait bougé depuis son départ, hormis Henri et son père qui se dressaient de part et d'autre de lui avec des visages crispés. L'angoisse de ses proches était palpable. Il serra plus fort la griffe de la créature entre ses doigts moites.
- Qui vous a fait ça ?
Elle secoua la tête. Elle n'avait pas le droit de le dire mais elle avait tenté de lui transmettre un indice. L'homme de la vision ne pouvait être personne d'autre que le coupable. Mais qui était-il et qu'avait-il demandé à l'épouse du guérisseur ? La femme métamorphosée inclina la tête devant lui en guise de salut et fit demi-tour après un regard pour son mari qui hésitait à l'approcher. Dès qu'elle eut disparu, Henri demanda à Wilhelm :
- Qu'est-ce que tu as vu ?
- Rien, mentit-il effrontément.
Elle ne lui avait montré que ce qu'il avait besoin de savoir.

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