PARTIE 54 - Le retour de Jol

172 12 2
                                    


Jol avait passé une assez bonne semaine, bien qu'un peu monotone. C'était toujours ainsi lorsqu'elle rendait visite aux amies de sa grand-mère.

Entre les potins, le thé importé du BordMonde, les petits plaisirs sucrés, les balades à cheval, la couture et la broderie... tout était tristement répétitif.

Elle mourrait d'envie de s'enfuir à cheval, galopant dans les champs en quête de liberté. Mais elle se retenait, gardant une attitude parfaite et un sourire à toute épreuve.

Constamment bien habillée, la tête couverte et de beaux bijoux pour la mettre en valeur.

Elle ne comptait plus le nombre de fois où la Dame de la Rose avait demandé :

« Toujours pas de prétendant ? Il est pourtant temps de te trouver un bon parti. »

Et chaque fois, elle finissait inéluctablement par ajouter :

« C'est si dommage que tes sourcils gâchent ton beau visage. Qu'elle tristesse qu'une aussi adorable jeune femme ne soit pas de race pure. Au moins, tu n'as pas hérité des vilaines oreilles de ton père. Ce qui n'est pas le cas de ta sœur, n'est-ce pas ? Pauvre enfant. »

Jol détestait recevoir ces remarques. Si elle avait pu choisir, elle aurait apprécié être plus étris qu'humaine. Elle ne l'avouerait à personne, mais elle aimait les oreilles de son père et enviait sa petite sœur d'en avoir hérité.

Pourtant, ça aurait pu arriver.

Les Etris avaient des attributs physiques liés à leur animal totem. Et bien qu'elle ait hérité du sang humain de sa mère, elle en avait également un.

Le chat. Un animal détesté, chassé et victime des superstitions, mais dont les douces oreilles étaient adorables.

Jol secoua la tête. Ça ne servait à rien de ressasser tout ça, elle ne pouvait pas changer son corps, peu importe à quel point elle le souhaitait.

Aujourd'hui, elle rentrait enfin de son court voyage. Comme toujours, Nora et Merry lui avaient manqué énormément. Elle aurait adoré pouvoir partager ces instants avec eux.

Leur faire découvrir le thé, les sucreries, les balades à cheval... rendre beaux ces moments en les partageant avec ses proches. Avec l'homme qu'elle aimait.

Elle imaginait parfaitement Nora plisser le nez devant le gout amer du thé du Bordmonde, et Merry se goinfrer de gâteaux avec les joues rougies de plaisir.

Mais ce n'était pas possible.
Et elle se sentait mal chaque fois qu'elle y pensait.

Lorsqu'elle rentra de son voyage, Jol fut accueillie par sa mère

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou télécharger une autre image.

Lorsqu'elle rentra de son voyage, Jol fut accueillie par sa mère. Toujours rayonnante et douce, elle l'étreignit avec amour.

Avec toutes les règles qu'elle devait respecter pour être une fille de bonne famille parfaite et délicate, elle ne pouvait pas se montrer trop chaleureuse avec ses parents.

Mais Jol aimait la douceur de sa mère. Alda avait cette manière de la prendre dans ses bras, qui était pleine de tendresse.

C'était bien différent des étreintes de son père, qui l'étouffait et l'écrasait à chaque fois, sous le regard désapprobateur de sa grand-mère.

Mais lorsqu'ils soupèrent tous ensemble, dans un silence pesant, Jol sentit immédiatement que quelque chose n'allait pas. Ses parents semblaient tendus. À fleur de peau.

Évidement, elle remarqua l'absence d'Öta, mais ne s'en formalisa pas. Ce n'était pas inhabituel. Il ne participait pas toujours aux dîners, et ces derniers temps il était souvent enfermé dans sa chambre.

Ce dont elle ne se plaignait pas, au contraire : elle était bien heureuse de ne pas le croiser tous les jours.

Depuis que Nora lui avait dévoilé les menaces qu'Öta avait proféré à son encontre et la violence dont il pouvait faire preuve, elle n'avait plus aucune envie de le voir.

Alors, lorsque Alda lui expliqua à la fin du repas qu'Öta serait absent quelque temps, Jol s'en réjouit.

Enfin le retour de sa tranquillité !

Mais au fond d'elle, bien qu'elle avait du mal à se l'avouer, elle se sentait tout de même légèrement mal. La dernière fois qu'elle avait vu Öta, il était en train de pleurer.

La vision du jeune homme, le visage tordu par la douleur et le désespoir lui avait fait mal au cœur.

Elle avait aussi remarqué les étranges feuilles qui lui poussaient sur les bras, et qu'il s'arrachait avec violence. Elle se posait de nombreuses questions à ce sujet.

Tout était toujours si bizarre avec lui...

Après le repas, comme elle était épuisée du voyage elle décida de se coucher tôt. Alors qu'elle était dans sa chambre, sur le point de se changer, on toqua à sa porte.

Étonnée, elle l'ouvrit et tomba nez à nez avec son père.

« Père ? Que puis-je faire pour vous ?
- J'aimerais te parler. Je peux entrer ? »

HISTOIRE ILLUSTRÉE - David & ÖtaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant